Bienvenue à vous

Ce site, qui sent bon le maroilles et la tome de Cambrai, est la suite du site Bêtises de Nervien ( https://betises-de-nervien.cms.webnode.fr/ ), désormais malheureusement inutilisable à causes d'insidieux problèmes techniques .


Sinon, à part cela, comme vous l'expliqueront les habitués des Bêtises de Nervienil ne s'agit que d'essayer, modestement et sans prétention, de vous offrir, le samedi et  le dimanche, de petits instants de détente. 

Avertissement


Plutarque affirmait catégoriquement et parfaitement à jeun que de tous les Gaulois, les Nerviens étaient les plus sauvages. Les plus sauvages des Gaulois, les Nerviens ? Les Nerviens dont les personnages emblématiques sont Martin et Martine, un attendrissant couple d'amoureux, les Nerviens dont la spécialité est de fabriquer un savoureux bonbon auquel ils ont humblement donné le nom de bêtise, les Nerviens dont l'hymne est « Min t'cho quinquin», une innocente et affectueuse berceuse. 


Plutarque, vins al mason, comme cha ech' 15 d'août in ira minger des frites al ducasse (Plutarque, viens à la maison, comme ça le 15 août on ira manger des frites à la fête foraine).  

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929 - Samedi 16 décembre 2023


Fauteur de guerre


Ils avaient convenu d'aller acheter leurs maroilles quotidiens ensemble, puis d'amener leurs billons au contrôle technique bisannuel obligatoire. Voilà pourquoi, au mitan de cette matinée du cinquante-neuvième jour avant la saint Zébulon du Rigodon, ils se dirigeaient résolument et de conserve vers l'établissement officiellement accrédité pour vérifier la fiabilité de leurs massettes en bois de charme. Chemin faisant, ils s'offraient l'agrément de s'adonner au convial plaisir de l'échange verbal.


- « Ta femme, tes enfants, ça va, Nathalas ? »


- « Oui, ça va, Napolidore. Et toi, ta femme, tes enfants, ça         va ? »


- « Oui, ça va. Ton billon, tu l'a fait réviser ? »


- « Oui, je le fais toujours, parce que je n'ai pas envie de payer une contre-visite .»


- « Moi, c'est pareil. Sinon, que penses-tu des gens qui ne connaissent pas le billon et de ceux qui affirment que, dans toute l'Histoire, il n'existât point de plus sanguinaire belliciste que Napoléon ? » 


- « Aux premiers, j'adresserai l'expression de ma plus sincère et profonde compassion. »


- « Quant aux seconds ? »


- « Rien »


- « Comment cela, rien ? »


- « Ce sera pour moi un sujet éternel de regret que nos deux nations qui, pour de nombreuses raisons devraient être amis, ait été conduites dans une querelle si peu justifiée. »


- « Hein ? »


- « N'avons-nous pas fait tuer assez de gens et provoqué suffisamment de misère ? Pour moi, si les offres que j'ai l'honneur de vous faire pouvaient sauver la vie d'un seul homme, je m'en considérerai plus fier que de la gloire triste que peut procurer une victoire militaire. »


- « Hein ? »


- « Rassure-toi, Nathalas, je ne divague point. Je citai simplement, mais néanmoins brillamment, des extraits de lettres écrites par Napoléon au roi de Prusse et à l'archiduc d'Autriche. Et toi, dis-moi, finalement, que penses-tu de ceux qui affirment que, dans toute l'Histoire, il n'existât point de plus sanguinaire belliciste que Napoléon . »


- « Rien » 

930 - Dimanche 17 décembre 2023     


Scandale sanitaire


Tandis qu'il attendait son TUC1, il sentit soudain poindre en lui l'ombre angoissante d'un doute. Il se mit alors en devoir de vérifier le contenu de son panier. Il devait recéler une galette, un petit pot de beurre et un maroilles, destinés à sa mère-grand. Son contrôle confirma que rien n'avait été oublié. Il en ressentit une intense satisfaction et une profonde paix intérieure. 


Ses craintes se trouvant apaisées, il tourna ses pensées vers d'autres horizons. La vie, songea-t-il, se complait à nous faire accomplir maintes choses semblables et pourtant si différentes. Ainsi, par exemple, ma matinée et mon après-midi de ce jour sont tous deux consacrés à des visites. Cependant, l'une ne se peut en rien comparer à l'autre. Si la seconde, que je m'apprête présentement à effectuer, est de courtoisie, puisque dévolue à ma mère-grand, la première  fut médicale, attendu que je la fis à mon médecin. 


Ce praticien, aussi compétent que dévoué et sympathique, lui avait délivré une réfllexion qui lui avait donné matière à réflexion. 


« Cher patient et néanmoins ami, lui avait-il déclaré, vous tenez une forme insolemment mathusalemmienne. Sachez qu'il s'agit là d'un état beaucoup plus rare que vous semblez le croire. Le lot commun consiste à se trouver affligé de la rate qui se dilate, à avoir le foie qui n'est pas droit, le ventre qui se rentre, le pylore qui se colore, etc... etc. En effet, 95,7% des personnes souffrent au moins d'une des trois-cent-une maladies, atteintes physiques, aussi bien chroniques que passagères, ou d'une des deux-mille-trois-cent-trente-sept séquelles invalidantes, répertoriées à ce jour. Seuls 4,3% de la population sont parfaitement saines et ne souffrent d’aucun mal d’aucune sorte.

Il quitta le cabinet du médecin en s'interrogeant dubitativement. Les gens n'avaient-ils donc rien de mieux   à faire que de passer leur temps à tomber malade ?          



1 : à l'intention de nos amis apéritophiles dijonnais, roannais, voir sarladais, qui sans doute et à bon droit l'ignorent, précisons qu'ici « TUC » ne désigne pas le délectable petit gâteau salé originaire d'Anvers, mais les Transports Urbains du Cambrésis, qui permettent aux populations de se déplacer en bus dans l'agglomération cambrésienne et ses alentours. 


 

931- Samedi 23 décembre 2023  



Conte de Noël


Atrabilaire par nature, chicaneur par vocation et enquiquineur par ailleurs, il considérait que toute chose  représentait une source potentielle de critique. Il ne vivait que pour se répandre en ergotages, désapprobations, aversions. Ces antipathiques penchants le poussaient à ne point montrer de considération envers quoi que ce soit et donc à ne s'investir en rien, pas même dans les festivités majeures. Cependant, cette année, il consentit à  faire une exception. Il sacrifia à l'une des grandes traditions liées aux célébrations du 25 décembre : écrire une lettre au Père Noël. Ou du moins un mail, parce qu'aujourd'hui plus personne ne s'adonnait à l'art épistolaire. 


Monsieur Noël

D'abord et avant tout, je me demande à quel genre de parents appartenaient votre maman et votre papa pour vous avoir affublé d'un  prénom aussi saugrenu que « Père ». En bonne justice, une telle indignité parentale aurait dû leur valoir le retrait de votre garde et votre placement dans une famille d'accueil, dûment agrée par les services accréditeurs, bien entendu. Mais, enfin bref, passons et venons-en au cœur de mon propos.


Je vous rappelle que, si sur le territoire de la République Française, la violation de domicile ne permet, malheureusement, pas l'application de la stand-your-ground law, elle entraîne cependant celle de l'article 226-4 du Code pénal. Celui-ci prévoit que ce délit « est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ». 


Aussi, je ne saurais trop vous déconseiller de passer subrepticement par la cheminée pour vous introduire frauduleusement dans mon logis. Je vous invite fermement à mettre vos pratiques en conformité avec les lois en vigueur. Pour ce faire, vous voudrez bien déposer mes cadeaux sur le pas de ma porte, sans esprit de dissimulation ou de fourberie.  

Afin que vous puissiez atteindre mon huis sans encombre, le 24 décembre au soir, je désactiverai les alarmes ainsi que les pièges protégeant ma résidence et garderai à l'intérieur mes quatre doberman, entre 19h00 et 19h10. 

J'ajoute, à l'intention de Tornade, Danseur, Furie, Fringant, Comète, Cupidon, Tonnerre, Éclair, Rudolph, que je suis détenteur d'un permis de chasse et donc, jusqu'au 29 février prochain, je suis en droit de les abattre sans sommation, comme bon me semble. 

Joyeux vous


P.S: ma liste de cadeaux est en pièce jointe

 

Commentaire

Est-ce que l'on peut se prévaloir de la stand-your-ground law dans le cas où un foie jaune essaye de venir voler votre maroilles dans votre salle à manger ?

Stephen Fuller Austin

932- Dimanche 24 décembre 2023  


Ça coûte rien de vérifier


Il n'en croyait pas ses yeux qui se trouvaient presque au bord des larmes. Il souhaitait voir la chose se réaliser depuis si longtemps et aujourd'hui son rêve devenait réalité. Il appela immédiatement son épouse.


- «  Aldebarde ! Aldebarde ! Aldebarde ! Ma Mie ! »


Sortie de son sommeil en sursaut, elle interrogea, glacée d'angoisse :

- « Hein, que, quoi, que se passe-t-il ? Il pleut ? Il y a le feu ? Tu as encore eu une idée de génie? J'ai oublié d'acheter du maroilles ? »


- « Non, viens voir, le Père Noël est passé . »

- « Quoi ! Ça ne pouvait pas attendre ?! Il est deux heures du matin, Fernandeau !  »


- « Allez, cesse de râler et rejoins-moi vite. »


Elle se leva, enfila son élégante robe de chambre en pilou-pilou du Nunavut et chaussa ses coquettes mules d'intérieures, en velours matelassé, dessus, et fourrées pure laine de yak soyeux, dedans. Elle quitta la chambre conjugale en maugréant :


- « J'aurais dû épouser un pilote de ligne. Comme, il occupe les trois quarts de ses journées en l'air, il ne passe pas son temps à vous le pomper. »  

En entrant dans la bibliothèque où ils avaient dressé le traditionnel sapin décoré, elle trouva son Fernandeau de mari assis derrière le bureau. Sur ce dernier trônait un truc       étrange ressemblant en tous points à un bidule bizarre. Devançant la question de son épouse, il l'informa d'un ton extasié :


- « C'est un Voight-Kampff. »


- « Enchanté, et, sans indiscrétion, c'est quoi, un  Voight-Kampff ? »


- « Il s'agit d'une sorte de détecteur de mensonge dont se servent les blade runners1 pour démasquer les androïdes. Assieds-toi bien en face du Voight-Kampff, je vais vérifier que tu es bien humaine et non pas un robot. »


- « Ça va pas ! T'es pas bien ! Tu trouves que j'ai une tête de D2R2 ? »


- « Non, absolument pas, tu ressemles plutôt à la princesse Leyla, mais il ne faut jamais se fier aux apparences. »


- « Je le crois pas... Allez, vas-y, amusons-nous un brin, voight-kampffe moi. »  


- « Détends-toi et vide ton esprit. Je vais te proposer de réagir rapidement et brièvement à un certain nombre de situations. Le Voight-Kampff s'occupera du reste. Ne t'inquiète pas, l'exercice ne présente aucun danger et se montre totalement indolore. 


- « Encore heureux ! Manquerait plus que toi et ton machin  Kampff, vous mordiez. Et si tu découvres que je suis un robot, que comptes-tu faire de moi ? Me vendre à la férraille ? »


- « Fichtre, non ! Je tiens beaucoup trop à toi ! Je te garderai et je te convertirai en vélo d'appartement électrique. »


- « Je suppose que je devrais être profondément émue et pétrie de reconnaissance ? »

- « Bien évidemment, bon, je commence. On te donne un bol de café à la chicorée au lait et une tartine de maroilles. »



- « Je mange la tartine de maroilles en la trempant dans le café à la chicorée au lait. »

- « Tu es en voiture. Tu ressens soudain le besoin d'un peu d'air frais. »


- « Je baisse le carreau. »


- « Nous sommes dimanche. Tu as envie de faire un tour de manège. » 


- « Je vais à la ducasse. »

- « Deux fois dix égalent ? »


- « Vinte »


- « Il drache. »


- « Je prends mon parapluie. »

- « Tu prépares de la crème brûlée. »

- « J'utilise de la cassonade pour la caraméliser. »


- « Tu vois de l'eau sur le carrelage. »

- « Je l'éponge avec une wassingue. »

- « On te demande le nom des meilleurs acteurs du monde de tous les temps.»


- « Philippe Noiret, Pierre Richard »


- « Tu as une belle portion de frites dans ton assiette. »


- « Je les assaisonne généreusement avec du vinaigre. »


- « Cafougnette, 14 ans, discute avec son grand-père, âgé de 75 ans. L'aïeul lui explique : mon petit, quand j'avais ton âge,  je travaillais déjà. »     
 
- « Et moi, lui répond Cafougnette, quand j'aurai le tien, je travaillerai encore. »    


- « Tu as besoin d'un clou pour y accrocher au mur le cadre  dans lequel se trouve mon magnifique portrait photographique, en couleur. »


- « Avant, j'aurais été en acheter un à La Cave, mais maintenant...    »     

- « Voilà, j'en ai terminé, merci. »

 

- « Alors, satisfait ? Suis-je ou ne suis-je pas une androïde ? »


- « Ben, honnêtement, je ne saurai le dire. En revanche, ce dont je suis à présent intimement et définitivement convaincu, c'est que tu es une véritable Cambrésienne. »



1 : voir bêtises 580, 593, 645, 694 , sur Bêtises de Nervien  ( https://betises-de-nervien.cms.webnode.fr/ ) - Note de Nervien


2 : pour ceux qui souhaitent en savoir plus sur le sujet, vous pouvez lire le livre et voir le film           « Blade Runner », celui de 1982. L'histoire du second ne reflète pas tout à fait le premier, mais est néanmoins très bien. Note de 

Rick Deckard 


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932 bis - Dimanche 24 décembre 2023 


Le gars, là, sur la photo, c'est un blade runner et le machin  posé devant lui, sur la table, c'est un Voight-Kampff. Le Voight-Kampff n'est pas livré avec un blade runner et réciproquement     

Petit jeu gratuit pour les cinéphiles : quel point commun existe-il entre ce blade runner et D2R2 ?


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933 - Samedi 30 décembre 2023 

De la science et des chemins de la gloire

Il se montrait de plus en plus convaincu que, de toutes les qualités, le bon sens se trouvait devenir la moins bien mise à profit par ses contemporains. Le manque de jugeote triomphait toujours davantage. Il allait bientôt totalement nous encercler et nous réduire à sa merci. Il en avait encore reçu un vivant exemple dernièrement. 


Un de ses amis de quatorze ans et trois mois était venu lui faire part de l'état d'indignation dans lequel il se trouvait. Il s'offensait de voir nos scientifiques ne point bénéficier de la reconnaissance à laquelle ils pouvaient légitimement prétendre. Leurs remarquables découvertes leur donnaient trop peu souvent la possibilité de sortir de l'anonymat et de pouvoir ainsi bénéficier de la gratitude des foules admiratives. 


Il en voulait pour preuve ces chercheurs de l'Université technologique de Compiègne qui avaient réussi à mettre au point l'eau en poudre. Ces insignes savants étaient parvenus   à ce résultat en enfermant chaque goutte d'eau dans une coquille d'anti-agglomérant. Ils obtinrent ainsi une poudre   qu'il suffisait de piler pour avoir de l'eau liquide. Bien qu'elle datât de 2018, qui avait jamais eu connaissance de cette fabuleuse invention ?


Il assura son ami de quatorze ans et trois mois qu'il comprenait et s'associait à sa juste consternation. Cependant, en son for intérieur, il pensait de toute autre manière. Fallait-il vraiment s'étonner d'une telle situation ? Si ces chercheurs avaient possédé un peu de bon sens, ils n'auraient pas conçu l'eau en poudre, mais plutôt la bière en poudre. Et là, nul doute que l'on se fût intéressé à leur découverte et qu'on les eût célébrés et portés aux nues. 

  

Solution du petit jeu gratuit pour les cinéphiles


Ce blade runner est Harrison Ford, en personne. Lui et D2R2 ont joué dans La guerre des étoiles. Bravo, à ceux qui ont trouvé. 



934 - Dimanche 31 décembre 2023 


Mise en perspective chronologique


La photo sur son calendrier de la Poste représentait des petits zoziaux picorant des miettes de maroilles dans une assiette en porcelaine de Saint-Amand-les-Eaux. En y jetant  un coup d'œil machinal, il songea qu'une année se finissait. L'univers allait prendre un an de plus, si tant est qu'il ait vu le jour le lendemain de la Saint-Sylvestre. Lorsque que vous êtes déjà âgé de plusieurs milliards d'années, cela ne devait revêtir que peu d'importance.


A la suite de cette réflexion, dont il ne se sentit pas peu fier, il lui revint à la mémoire une image, l'image de son premier professeur d'Histoire. Souvenir d'un temps, aussi mélancolique que lointain, que les moins de vingt ans ne pouvaient pas connaître, un temps où les profs d'Histoire ne se faisaient pas décapiter. Pour faire comprendre à ses élèves ce que représentait l'ancienneté de l'Homme au regard de celle de l'univers, l'enseignant leur avait fait, craie blanche en main, la démonstration suivante.   


Réduisons l'évolution de l'univers à l'échelle d'une année, leur avait-il dit. L'univers se crée le 1er janvier, à 00h00. Trois semaines plus tard, les premières étoiles commencent à briller. Les galaxies se forment durant le mois de février.


Le 09 septembre, notre soleil s'allume et des planètes s'agrègent dans son orbite. Le 13 septembre, à 6h00 du matin, la Terre prend sa place parmi ces dernières Le lendemain, la Lune vient tourner autour d'elle.


Vers le 25 septembre, les bactéries. apparaissent. L'atmosphère, composée d'azote et d'oxygène, se met en place entre octobre et début décembre. Le 19 décembre, les poissons montrent le bout de leurs nez. Le 20, les plantes terrestres éclosent. Le 21, les animaux peuplent les continents. Le 23, les arbres s'élèvent vers le ciel. Le 25, les dinosaures arrivent, le 26, ce sont les oiseaux, le 27, les fleurs, le 28 les fruits et le 30, les dinosaures disparaissent.



Le 31 décembre, aux alentours de 15h00, des primates décident de quitter leurs arbres pour vivre sur le sol.  A 22h30, ils se mettent à marcher debout : l'Homme. était né.  A 23h45, il invente le feu. Il peint les grottes de Lascaux à minuit moins trente-trois secondes, bâtit les pyramides à minuit moins dix secondes. Il se lance dans la conquête spatiale à deux centièmes de seconde avant  minuit.

  

En revenant au temps présent, il se rendit compte que sa montre s'était arrêtée.


  

935 - Samedi 06 janvier 2024


« Les corps et les caractères, tout autant que le paysage, sont façonnés par la Burle, ce terrible vent hivernal qui glace jusqu’aux os »

Souventes fois, il oyait d'aucuns tenir des discours qui l'ébaubissaient vigoureusement. Au premier rang de ces quidams se trouvaient les contempteurs du maroilles. Puis venaient ces frustrés qui se désolaient que les « trucs badass, style le triangle des Bermudes, ils étaient pas dans la France, mais toujours dans l'étranger ». 


En premier lieu, l'anglicisme argotique « badass », à l'étymologie aussi disgracieuse que sa sonorité, lui écorchait les tympans, qu'il avait fragiles, il est vrai. Ensuite, il s'offusquait qu'il se puisse proférer une telle affirmation. Elle attestait que, d'une part, ses auteurs ignoraient crassement qu'un hexagone peut se diviser en six triangles et que, d'autre part, dans l'Hexagone, il existait celui de la Burle.


Cette lacune lui paraissait d'autant moins excusable que  trouver ce triangle relevait du jeu d'enfant. En effet, il se situait tout simplement à 45° 02′ 39″ de latitude nord, 3° 53′ 09″ de longitude est 44° 54′ 40″ de latitude nord, 4° 11′ 42″ de longitude est et 45° 23′ 00″ de latitude nord, 4° 34′ 20″ longitude est. Ou en d'autres termes, pour ceux qui montreraient des tendances à la complication, il s'agit d'une zone localisée à l'est du Massif Central, entre le Puy-en-Velay, en Haute-Loire, le mont Mézenc, en Ardèche et le massif du Pilat, dans la Loire.  


De 1944 à nos jours, plus de 80 catastrophes aériennes se sont produites à l'intérieur de ce triangle. Le 13 mai 1948, l'une d'elle causa la mort de Kathleen Kennedy, soeur cadette du futur président américain John Fitzgerald Kennedy. Le 21 janvier 1971, une autre, décapita la totalité de l'élite du nucléaire français, en tuant le directeur du Commissariat à l’Energie Atomique et 13 savants atomistes. 

A cette longue série de drames, il fallait ajouter deux évènements des plus singuliers Le 18 décembre 1980, la gendarmerie déclencha une opération de sauvetage suite au crash d'un avion. Parvenus sur les lieux de l'accident, les gendarmes ne trouvèrent aucune trace de l'appareil. Des  faits similaires se produisirent deux mois plus tard.


Comme quoi, nous n'avons rien à envier aux Bermudes et à son triangle, disait-il. Mais devait-on vraiment s'en féliciter, lui répondait-on ?



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936 - Dimanche 07 janvier 2024


Fait trop chaud


La prévenance pour le futur de planète représentant désormais la préoccupation la plus furieusement tendance, les hommes modernes ne pouvaient que s'y intéresser. Se reconnaissant comme l'un d'eux, il se sentait tout naturellement astreint à afficher clairement son intérêt pour cette cause. 

Il soutenait publiquement toutes les directives, les lois, décrétant la décarbonation obligatoire. Il suivait  assidument les bulletins météos, s'alarmant bruyamment au moindre degré centigrade excédentaire. Il baissait, éteignait, décalait, avec enthousiasme, au vu et au su de tous. Il affichait son investissement dans la réduction de l'élevage bovin en ne proposant plus de maroilles à ses invités. Enfin, il se montrait, par les rues et les routes, au volant d'un   véhicule automobile aussi électrique que criard. 


Mais voici qu'un copain vint à lui offrir un bouquin   commis par un professeur universitaire émérite, directeur de laboratoire au CNRS. Dans son ouvrage, ce docte et savant personnage livrait les résultats de l'étude mathématique  qu'il avait menée sur la pertinence des mesures contre le réchauffement climatique. Ce qu'il y découvrit, le laissa comme deux ronds de flancs bringuebalants, 

L'Europe produisait moins de 10% des gaz à effet serre émis dans le monde. Dans ces 10%, la part de la France ne comptait que pour 1%. Un million de véhicules à moteur thermique, expulsant chacun 100gr de dioxyde de carbone au kilomètre et parcourant chacun un million de kilomètres, n'entraînaient une hausse de la température planétaire de seulement deux milionième de degré centigrade. La totalité des rejets de dioxyde de carbone causait un réchauffement annuel de l'atmosphère de sept millionièmes de degré. Par ailleurs, une trop forte réduction du dioxyde de carbone mettraient en danger l'existence de l'humanité parce qu'il se révèle indispensable à 94% des espèces végétales cultivées. Quant au méthane, son incidence était négligeable et bien moins importante que celle de la vapeur d'eau naturellement présente dans l'air.  

Il en demeura longuement bouche largement bée, se sentant plus désorienté qu'un porteur de lunettes de soleil, perdu dans l'épaisse obscurité des galeries d'une mine privée d'éclairage durant une nuit sans lune. Fallait-il donc prendre pour billevesées et coquecigrues tous les discours moralo-accusatoires que lui tenaient journaux, radios et télés ? En allait-il les raisons réelles du réchauffement climatique comme de la       vérité ? Etaient-elles ailleurs ?


937 - Samedi  13 janvier 2024 



Histoire de visionaires        

- « Monsieur Dufaël Ducracelle, humble habitant de Saint Python et grandiose vendeur par correspondance de sirop contre la toux sèche et de gouttes nasales pour berserkers hypocondriaques, appelle de ses vœux de pouvoir s'exprimer sur deux idées dont il se fait fort de démontrer inexactitude. Dufaël, c'est la moindre des choses et un grand plaisir que de vous laisser le loisir de démontrer fort. » 


- « Soyez-en remercié jusqu'à la cinquantième génération. Bien qu'inébranlement déterminé, je ne monterai pas     dans les tours, mais j'en parlerai, en l'occurrence, de celle dite d'Eiffel. »


- « Monument qui possède une notoriété presque aussi universelle que celle du maroilles. »

- « Si le maroilles porte bien et légitimement son nom, il ne se peut affirmer la même chose à propos de la tour Eiffel. »

- « Est-ce à dire que vous soupçonneriez une usurpation d'identité, sensasionnel Dufaël ? »   

- « Vous me voyez abasourdi d'admiration devant la puissance de vos capacités de déduction, aérien Nervien.     Malheureusement, la Justice ne peut sévir. D'une part, parce que, eu égard à leur ancienneté, les faits bénéficient du délai de prescription et parce que le coupable a été retiré à l'affection des commerçants de son quartier, le 27 décembre 1923, d'autre part. Néanmoins, je tiens à vous exposer les éléments constitutifs du délit. »


- « Constituez, constituez, fraternel Dufaël. »


- « En mai 1884, l'ingénieur franco-suisse Maurice Koechlin occupe les fonctions de chef du bureau d'étude de la société Eiffel et Emile Nouguier, ingénieur franco-français, celle  de responsable des études techniques et des montages dans la même entreprise. Ils imaginent ensemble une très haute  tour métallique afin de « donner de l'attrait » à l'exposition universelle, qui se tiendra à Paris, en 1889. Ils présentent leur idée et leurs plans à Gustave Eiffel, mais ce dernier ne se montre guère emballé. »


- « Oh, le débile profond ! »

- « Non, profond, non, puisqu'il laisse ses deux employés poursuivre leur projet. Leur collègue architecte, Stephen Sauvestre, les rejoint pour les aider à peaufiner leur ouvrage. Les trois compères proposent le résultat de leur travail à leur patron, en septembre 1884. Cette fois, le Gustave est partant à 100% et dépose un brevet aux noms d'Eiffel, Nouguier et Koechlin. » 

- « Et ensuite, il présenta la tour aux responsables de l’Exposition Universelle de Paris. »


- « Pas du tout, il trouve plus génial de la proposer à la municipalité de Barcelone pour son exposition universelle de 1888. Le maire de la ville, Francesc de Paula Rius i Taulet, refuse. Il trouve le prix demandé excessif, mais surtout que le monument ne possède aucun intérêt et que, de toute manière, sa construction est techniquement impossible. »

- « Oh, el profundamente estúpido ! »

- « Alors, là, Eiffel s'adressa à Paris. Donc, en résumé, premièrement, la tour Eiffel devrait s'appeler Koechlin-Nouguier-Sauvestre. Deuxièmement, les Parisiens ne doivent sa présence sur leur sol qu'au fait que le señor Francesc de Paula Rius i Taulet a eu autant de pif que le gars qui pensait pouvoir mettre l'économie russe à genoux, en quinze jours chrono. »  


 - « Non, mais, là, c'est  pas pareil. C'est que l'économie russe, elle a de l'arthrose, du coup, elle peut pas plier les genoux. » 

938 – Dimanche 14 janvier 2024

 

Deux plus deux égalent quatre, ou pas


Chacun s'accordait à le trouver affable, à le considérer comme un bon gars, le genre pas méchant pour un sou. En sus de ces sympathiques qualités, personne ne doutait qu'il dût certainement en posséder beaucoup d'autres. Un garçon aussi poli, aussi propre sur lui, ne pouvait posséder qu'un bon fond et avoir bien du mérite, ma bonne dame. 


Cependant, sans que cela ne diminua en eux l'estime qu'ils lui vouaient, ses concitoyens s'étonnaient tout de même qu'il tînt tant à la CRS. Pourtant, qui avait-il d'étonnant à cela de sa part ? En effet, il était le fondateur, le directeur, le seul membre et l'unique sympathisant de la Centrale Ruvignoise de Statistiques. 


A l'origine de la création de cette prestigieuse et célèbre institution se trouvait sa passion pour l'étude des chiffres. Plus précisément, il montrait un intérêt enthousiaste à  observer leur capacité à influencer notre perception de la réalité. 


Ainsi, expliquait-il, si l'on prenait le cas d'un quidam qui déclare une augmentation de 60% de son ingestion mensuelle de tome de Cambrai et une diminution de 50% de celle de maroilles. Ce bouleversement nutritionnel ne signifiait pas obligatoirement que ce fromageophile mangeait désormais plus de tome de Cambrai que de maroilles. Si sa consommation de tome grimpait de 100 à 160 gr, il n'en restait pas moins qu'elle demeurait inférieure à sa dégustation de maroilles, puisque la réduction de cette dernière le faisait passer d'une quantité de 10 à 5 kg.


Il prenait également pour autre exemple, beaucoup moins gastronomique mais plus macabre, celui de notre estimation de l'importance des pertes militaires subies lors d'un conflit. La guerre du Vietnam, en un peu plus de huit ans, coûta à l'armée des Etats-Unis 58 000 tués. Ce sanglant bilan nous semblait, à raison, très lourd. Mais, en demeurerions-nous convaincus si nous savions, qu'en 1945, la prise de Berlin, qui dura trente jours, entraina le décès de 85 000 soldats soviétiques ?


Sinon, ce qu'il aimait avec les chiffres, c'est qu'ils lui permettaient de vérifier qu'il ne se faisait pas arnaquer quand on lui rendait la monnaie.

 

939 - Samedi 20 janvier 2024



Droit de réponse concis, courtois et pondéré


D'aucuns, dont je tairai charitablement les noms, afin d'éviter que mes millions d'admirateurs offusqués ne leur jettent, à bon droit, des tombereaux de cailloux, de bûches et d'enclumes, sur le coin de la figure, insinuent sournoisement que je posséderais l'irritante tendance à me complaire dans l'écriture de phrases d'une longueur si inconsidérée que leur temps de lecture dépasse la durée de vie d'un maroilles.


Pour être Nervien, je n'en suis pas moins gentilhomme, aussi, bien qu'ils ne le méritassent point, je leur répliquerai, avec grâce et distinction, que je me garderai de les comparer au dernier du plus puant des rats pourris, afin de ne pas faire gravement offense à ce dernier et je terminerai mon propos en apostrophant ces avariés du bulbe de la manière suivante : « Holà, faquins, marauds, sales   crevards ! Avant que de m'accabler de votre misérable et injuste vindicte, voyez donc cette phrase de monsieur Marcel Proust  :  

« Sans honneur que précaire, sans liberté que provisoire, jusqu’à la découverte du crime; sans situation qu’instable, comme pour le poète la veille fêté dans tous les salons, applaudi dans tous les théâtres de Londres, chassé le lendemain de tous les garnis sans pouvoir trouver un oreiller où reposer sa tête, tournant la meule comme Samson et disant comme lui: “Les deux sexes mourront chacun de son côté”; exclus même, hors les jours de grande infortune où le plus grand nombre se rallie autour de la victime, comme les juifs autour de Dreyfus, de la sympathie – parfois de la société – de leurs semblables, auxquels ils donnent le dégoût de voir ce qu’ils sont, dépeint dans un miroir, qui ne les flattant plus, accuse toutes les tares qu’ils n’avaient pas voulu remarquer chez eux-mêmes et qui leur fait comprendre que ce qu’ils appelaient leur amour (et à quoi, en jouant sur le mot, ils avaient, par sens social, annexé tout ce que la poésie, la peinture, la musique, la chevalerie, l’ascétisme, ont pu ajouter à l’amour) découle non d’un idéal de beauté qu’ils ont élu, mais d’une maladie inguérissable; comme les juifs encore (sauf quelques-uns qui ne veulent fréquenter que ceux de leur race, ont toujours à la bouche les mots rituels et les plaisanteries consacrées) se fuyant les uns les autres, recherchant ceux qui leur sont le plus opposés, qui ne veulent pas d’eux, pardonnant leurs rebuffades, s’enivrant de leurs complaisances; mais aussi rassemblés à leurs pareils par l’ostracisme qui les frappe, l’opprobre où ils sont tombés, ayant fini par prendre, par une persécution semblable à celle d’Israël, les caractères physiques et moraux d’une race, parfois beaux, souvent affreux, trouvant (malgré toutes les moqueries dont celui qui, plus mêlé, mieux assimilé à la race adverse, est relativement, en apparence, le moins inverti, accable celui qui l’est demeuré davantage), une détente dans la fréquentation de leurs semblables, et même un appui dans leur existence, si bien que, tout en niant qu’ils soient une race (dont le nom est la plus grande injure), ceux qui parviennent à cacher qu’ils en sont, ils les démasquent volontiers, moins pour leur nuire, ce qu’ils ne détestent pas, que pour s’excuser, et allant chercher comme un médecin l’appendicite l’inversion jusque dans l’histoire, ayant plaisir à rappeler que Socrate était l’un d’eux, comme les Israélites disent de Jésus, sans songer qu’il n’y avait pas d’anormaux quand l’homosexualité était la norme, pas d’anti-chrétiens avant le Christ, que l’opprobre seul fait le crime, parce qu’il n’a laissé subsister que ceux qui étaient réfractaires à toute prédication, à tout exemple, à tout châtiment, en vertu d’une disposition innée tellement spéciale qu’elle répugne plus aux autres hommes (encore qu’elle puisse s’accompagner de hautes qualités morales) que de certains vices qui y contredisent comme le vol, la cruauté, la mauvaise foi, mieux compris, donc plus excusés du commun des hommes; formant une franc-maçonnerie bien plus étendue, plus efficace et moins soupçonnée que celle des loges, car elle repose sur une identité de goûts, de besoins, d’habitudes, de dangers, d’apprentissage, de savoir, de trafic, de glossaire, et dans laquelle les membres mêmes, qui souhaitent de ne pas se connaître, aussitôt se reconnaissent à des signes naturels ou de convention, involontaires ou voulus, qui signalent un de ses semblables au mendiant dans le grand seigneur à qui il ferme la portière de sa voiture, au père dans le fiancé de sa fille, à celui qui avait voulu se guérir, se confesser, qui avait à se défendre, dans le médecin, dans le prêtre, dans l’avocat qu’il est allé trouver; tous obligés à protéger leur secret, mais ayant leur part d’un secret des autres que le reste de l’humanité ne soupçonne pas et qui fait qu’à eux les romans d’aventure les plus invraisemblables semblent vrais, car dans cette vie romanesque, anachronique, l’ambassadeur est ami du forçat: le prince, avec une certaine liberté d’allures que donne l’éducation aristocratique et qu’un petit bourgeois tremblant n’aurait pas en sortant de chez la duchesse, s’en va conférer avec l’apache; partie réprouvée de la collectivité humaine, mais partie importante, soupçonnée là où elle n’est pas, étalée, insolente, impunie là où elle n’est pas devinée; comptant des adhérents partout, dans le peuple, dans l’armée, dans le temple, au bagne, sur le trône; vivant enfin, du moins un grand nombre, dans l’intimité caressante et dangereuse avec les hommes de l’autre race, les provoquant, jouant avec eux à parler de son vice comme s’il n’était pas sien, jeu qui est rendu facile par l’aveuglement ou la fausseté des autres, jeu qui peut se prolonger des années jusqu’au jour du scandale où ces dompteurs sont dévorés; jusque-là obligés de cacher leur vie, de détourner leurs regards d’où ils voudraient se fixer, de les fixer sur ce dont ils voudraient se détourner, de changer le genre de bien des adjectifs dans leur vocabulaire, contrainte sociale, légère auprès de la contrainte intérieure que leur vice, ou ce qu’on nomme improprement ainsi, leur impose non plus à l’égard des autres mais d’eux-mêmes, et de façon qu’à eux-mêmes il ne leur paraisse pas un vice. »

 

940 - Dimanche 21 janvier 2024



« La, la, la, mine de rien, la voilà qui revient, la chansonnette »


Comme cet après-midi-là, chaussé et vêtu de sportive manière, il devait passer à grands pas athlétiques devant la crèmerie, Célionois lui avait humblement quémander de faire pour lui provision de tome de Cambrai et de Maroilles. Bien entendu, il avait donné une suite favorable à cette sollicitation et venait livrer sa provende fromageaire chez le requérant.

- « Salut à toi, Célinois ! »

- « Bonjour, Dalcourt ! »

- «  Avec mes hommages, voici tes fromages, tout droit sortis de la crèmerie, mon ami. »


- « Je t'en saurai gré jusqu'à la fin de mes jours, Dalcourt. »

- « Point n'est besoin, mon copain, de te sentir mon obligé pour l'éternité. N'en parlons plus. Dis-moi plutôt quel était cet air que tu fredonnais mélodieusement, lorsque de ton logis je franchissais l'huis ? »


- « Eh bien, sans aucune prétention, je chantonnais, A La Claire Fontaine. »


- « Comment ai-je pu ne pas immédiatement reconnaître cette aimable et romantique chansonnette française qui a  vaillamment traversé les siècles. »


- « Oui et non...»


- « Oui et non ? »


- « Oui, pour son ancienneté parce que, effectivement, cette chanson vit le jour entre le XV eme et le XVIII eme siècle. Oui et non, dans la mesure où elle appartient autant au folklore de la France qu'à celui du Québec, puisqu'elle est originaire de la Belle Province. Romantique, oui et non, étant donné qu'elle fut un chant de résistance pour les patriotes québécois qui se révoltèrent contre l'Anglais, au XIXeme siècle. La claire fontaine symbolisait le  majestueux fleuve Saint-Laurent. » 


- « Et c'est qui qu'avait comme chant de guerre La danse des canards ? »  

941 - Samedi 27 janvier 2024



La vérité est encore ailleurs


Parce que les initiales de son nom étaient F.M et qu'il travaillait comme agent spécial du F.B.I, il ne comptait plus les fois où, non seulement, des inconnus, mais aussi des inconnues, le prenaient pour monsieur Fox Mulder. 


Naturellement enclin à l'empathie et à la clémence, il ne leur en tenait jamais rigueur. Il se contentait simplement de leur signaler poliment la méprise en les saisissant fermement par les oreilles pour leur hurler à la figure qu'il s'appelait Fernand Mouillette, agent spécial du Federal Binouze Institute d'Aubenchel au Bac et qu'il mangeait du maroilles et pas des graines de tournesol, nom d'un chien ! 


Cela étant dit, il menait les mêmes recherches que Fox. Il en tirait des conclusions identiques à celles de son collègue américain, sauf au sujet de la rétro-ingénierie. Cette question demeurait pour lui une source de scepticisme. Il ne se montrait pas complètement convaincu par le fait que certains aéronefs n'eussent pu voir le jour sans ses apports.


Il ne possédait pas la certitude absolue que des machines volantes aient bénéficié de techniques inspirées d'engins extra terrestres, gardés au secret dans les hangars de la zone 51, de la base de Wright-Patterson ou de la Dugway Proving Ground. Pour lui, si technologie d'ailleurs il y avait il doutait qu'elles provinssent de vaisseaux spatiaux intergalactiques, accidentellement chus dans la région de Roswell ou de Kecksburg.


Après avoir découvert l'existence de la Couzinet RC 360 et du Dassault nEUROn, il pensait plutôt que les Américains n'avaient pas copié les plans des extra-terrestres, mais ceux, bien terrestres, des Français. 


Commentaire

Mais, cependant, je m'interroge. Ne pourrait-on envisager que se soient les Français qui aient dérobé des plans aux  Américains qui les auraient, auparavant, eux-même dérobé   aux extra-terrestres ? 

OSS 117

941 Bis - Samedi 27 janvier 2024


Documents fournis par l'agent spécial  Fernand Mouillette :

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Couzinet RC360

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Capture d'écran 2024-01-19 211134.png

Dassault nEUROn

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US Avrocar

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US B.21

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942 - Dimanche 28 janvier 2024      



« Il vaut mieux être un samouraï dans un jardin qu’un jardinier dans un champ de bataille »

Son humilité innée eut voulu que ses qualités restassent dans l'ombre, mais comment la chose eut-elle été possible avec un physique aussi suravantageux, une force aussi surpuissante, une virilité aussi surmasculine, un intellectel  aussi surdimensionné, une élégance aussi surdistinguée, une empathie aussi surardente, un cholestérol aussi surveillé ? En plus, avait-il l'habitude d'ajouter, j'ai la peau douce et je sens bon, mais qui puis-je ? Les adjudants sont des êtres merveilleux et le leur était le plus merveilleux d'entre eux, ils le savaient.


- « Garde à vous ! Repos ! Garde à vous ! Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! » 


- « Merci sergent, repos messieurs ! Messieurs, si je me fie à ma mémoire, dont je n'ai aucune raison de douter vu ses phénoménales capacités, dues à une consommation régulière de maroilles, il ne vous a pas encore été donné l'honneur et le plaisir de m'entendre vous parler de la guerre cognitive, exact ? »

- « EXACT, IL NE NOUS A PAS ETE DONNE L'HONNEUR ET LE PLAISIR, MON ADJUDANT ! »


- « Bien, donc je vais vous donner l'honneur et le plaisir. Sachez, en premier lieu, que champ de bataille sur lequel se déroule cette guerre est l'esprit humain. »

- « WOUAH ! »

- « Sa tactique consiste à altérer chez l'ennemi sa perception des réalités sociales, culturelles et économiques, de son environnement, par le biais des informations qu’il reçoit. »


- « Ben, en somme, mon adjudant, c'est de la propagande. »


- « Pas du tout, caporal, l’effet final recherché de la propagand  est de démoraliser l'ennemi, alors que celui de la guerre cognitive est de l'affaiblir, en modifiant son mode pensée afin de pouvoir lui imposer notre volonté. Question, problème, état d'âme ? Oui , Machin, je t'écoute.» 


- « Non, moi c'est pas Machin, je suis Truc. Alors, je voulais vous demander, mon adjudant, dans la guerre cognitive, quand est-ce que l'on tire dans le tas et que l'on balançe des grenades ? »



Commentaire

Reprenez-moi si je me trompe, mais n'y aurait-il pas, dans le civil, des petits malins, qui tenteraient d'utiliser les principes de la guerre cognitive pour nous embrouiller, si vous voyez ce que je veux dire ? »

Pausanias  

943 - Samedi 03 févier 2024   


Etymologie avicolo-policière

Maroillophage de nature  et policier de métier, il ne dédiait cependant pas l'intégralité de son temps à sa vocation tant fromageaire que professionnelle. Il aimait mêmement se consacrer à comprendre le comportement des populations menant leur existence dans la société au sein de laquelle il évoluait.

Ainsi, éprouva-t-il le besoin de découvrir pourquoi il se faisait que certains de ses contemporains francophones usaient du terme de poulet pour désigner les gens de sa corporation. Il n'existait pourtant pas de rapport entre les occupations de ces gallinacés et les activités liées aux fonctions des gens de la police. Rien dans leur apparence physique et vestimentaire ne pouvait également justifier qu'ils fussent assimilés à de jeunes oiseaux de basse-cour. Pour percer ce mystère, il décida de mettre à contribution son art : il mena l'enquête. A l'issue d'un patient et minutieux travail de recherche, il découvrit toute la vérité. 

Durant les évènements de la Commune, en 1871, un incendie détruisit les bâtiments de la préfecture de police de Paris et du département de la Seine, situés rue de Jérusalem. Jules Ferry, maire de la capitale à l'époque, permit alors à la police de Paris et du département de la Seine d'installer son siège dans la caserne de la Cité. Cette dernière avait été construite sur l’emplacement de l’ancien marché aux volailles. Cela donna l'idée aux marchandes des quatre-saisons d'attribuer l'ornithologique surnom de poulet aux policiers qui venaient patrouiller aux Halles.

 

Cela étant dit, se demanda-t-il, par cette dénomination, ces commerçantes exprimaient-elles une certaine malice ou bien un sentiment d'affection vis-à-vis des gardiens de la paix ?

      

944 - Dimanche 04 février 2024    


Es gab probleme mit der druckerei


- « Monsieur Antoineau Panzanno, paisible administré de la commune de Rejet-De-Beaulieu, consignataire de la réserve de maroilles et grand boutillier en chef du C.D.H.R.R.P.P.R.E.S.S.F.F, entend se fendre d'une mise au point historique, qu'il juge indispensable à l'éclatement de la vérité sortant de son puits. Antoineau, mon tout beau, je vous en prie, faites comme chez vous, fendez, fendez ! »


- « S'il faut en croire nos voisins d'Outre-Rhin et ce qui se dit encore dans le peu de cours d'Histoire subsistant dans les programmes scolaires imposés par le Ministère de l'Education Nationale, le sieur Johannes Gutenberg aurait inventé l'imprimerie à caractères métalliques mobile, à Mayence, en 1448. »


- « Antoineau, cher et fier damoiseau, il m'a semblé déceler comme une pointe de scepticisme dans vos propos. »


- « Il vous a semblé fort bien, Nervien. » 


- « Nous pouvons donc, à bon droit, envisager que vous seriez habité par une certaine défiance à propos de l'origine germanique de l'imprimerie. »


- « Considérez plutôt qu'il n'existe pas le moindre doute dans le recoin le plus reculé de mon for intérieur. Ce gut Gutenberg a été précédé. La technique d'impression, dont on le gratifie, a été inventée quatre-vingt ans avant lui, par des moines bouddhistes du royaume de Goryeo, qui se situait dans l'actuelle Corée. »

- « Je vous confesse que vos révélations me laissent tellement tout abasourdi que j'en pleure d'ébahissement. »

- « Quand vous aurez séché vos grands yeux de héros au regard si doux, transportez-vous en les murs de la Bibliothèque Nationale de France. Vous pourrez y voir le Jikji, le plus ancien livre imprimé au monde, connu à ce jour. II a été édité dans la ville coréenne de Cheongju, en 1377. » 


- « Oui, mais je ne goûte jamais beaucoup d'avoir à quitter Cambrai pour aller à Paris. Alors, je vais commander ce bouquin au Furet du Nord. »


1 : Collectif pour la Défense du Droit des Hommes à Réclamer le Rétablissement du Port de la Perruque à la Régence Enduite de Saindoux et Saupoudrée à la Farine de Froment


 945 - Samedi 10 février 2024   


Estime inter Armes


Selon le site internet du ministère des Armées  « L'Infanterie est la reine des batailles. Elle est l'Arme des 300 derniers mètres. Par le combat rapproché avec l'ennemi, elle conclut la victoire par la prise et le contrôle durable du terrain. ». 


Il souscrivait avec enthousiasme à ces propos. Sa condition de mangeur de maroilles et de fantassin n'entrait nullement en ligne de compte dans son jugement. Simplement, « si c'est le ministère qui le dit, c'est forcément vrai ». D'ailleurs,  la Tradition militaire, elle-même, reconnaissait, avec beaucoup de tact, mais néanmoins clairement, les limites des autres Armes :  


Si tu es intelligent, va dans la Cavalerie, tu seras le seul. 

Si tu es bien élevé, va dans l'Artillerie, tu seras le seul. 

Si tu es propre, va dans le Génie, tu seras le seul. 

Si tu sais compter, va dans l'Intendance, tu seras seul. 

Si tu es Républicain, va dans la Marine, tu seras le seul. 

Si tu es modeste, va dans l'Aviation, tu seras le seul. 


Concernant les aviateurs, il les croyait également fort susceptibles. Il le pensait depuis qu'il avait eut connaissance du geste commis, le 7 août 1919, par le pilote Charles Godefroy. Il l'avait commis parce que lui et ses collègues s'étaient sentis vexés d'être obligé de défiler à pied, au 14 juillet. Cependant, il devait à la vérité de reconnaître que les héritiers de Guynemer et Saint-Exupéry se montraient beaucoup moins ombrageux que leurs Anciens. A sa connaissance, à ce jour, aucun n'avait fait avec son Rafale que ce Godefroy fit avec son Nieuport 11

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I

946 - Dimanche 11 février 2024


Génie en action


 L'air était pur, le ciel limpide, tout n'était qu'ordre et beauté, calme et volupté, maroilles et dessert, lorsqu'un cri déchira l'espace.


- « Eurêka ! Victoire ! Bingo ! Hourra ! Youpi ! Aldebarde ! Aldebarde ! Ma mie ! Rejoins-moi toute affaire cessante ! »


- « Bernardeau, qu'y a-t-il de si important qu'il te faille  m'obliger à intempestivement interrompre mon travail ? »                
- « Ton travail ? Historienne, Aldebarde, ma douce, soyons sérieux, s'il s'agissait réellement d'un métier, cela se saurait. Et épargne-moi, s'il te plaît, les maximes éculées du genre : les peuples qui ignorent leur passé n'ont pas d'avenir ou qui ne connait pas son Histoire se fera toujours avoir. Notre temps est au présent, à l'instant, à la startup nation. Et quand bien même tes occupations releveraient-elles de l'essentiel, je ne t'aurais point dérangée pour rien. Je ne suis pas de ces nombrilistes insignifiants qui croient que le moindre de leurs gestes inutiles, de leurs pensées creuses, représentent des évènements mondiaux. Je m'en vais te le prouver à l'instant. »  


- « Ô mon aimé, toi que je célèbre et honore, excuse l'insignifiante chose que je suis d'avoir osé songer un seul instant que, par rapport aux tiennes, mes occupations puissent revêtir une quelconque importance.

    

    -   « Je te pardonne, mais ne refais jamais ça. »


    -   « Parfois, je me demande si tu le fais exprès ou si tu l'es             vraiment. » 

    - « Si je suis vraiment quoi ? »


- « Bon, alors, dis-moi tout. »


- « Eh bien, une fois encore, je fus génial1. Il est né en mon esprit fécond le projet d'une recette follement originale, dans laquelle se mijotent ensemble dans de la graisse d'oie, haricots blancs secs, poitrine et couenne de porc, cuisses de canard confites, saucisses, oignons, gousses d'ail, carottes, bouquet garni et purée de tomates. »


- « En somme, tu viens d'inventer le cassoulet toulousain. » 


- « Quoi ? Le cassoulet ? Les Toulousains ? N'importe quoi, tant qu'on y est pourquoi pas des Toulousains inventant une saucisse ou des Toulousains fabriquant des Concorde, des Airbus ? »


1: voir  https://betises-de-nervien.cms.webnode.fr/  -  bêtises N° 580, 593, 645 

Bêtise 932


   

947- Samedi  17  février 2024 


A bas le vent !                                                                                 


La sociabilité ne faisait pas partie de ses qualités majeures.   Il n'aimait que la compagnie de son maroilles et de lui- même. Toutes les personnes se présentant dans son espace vital, l'irritaient. Et parmi elles, celles et ceux qui l'exaspéraient le plus étaient les joviaux qui, du premier décembre au trente et un janvier, lui cassaient les oreilles en entonnant béatement : Vive le vent d'hiver et bonne année grand-mère ! 


Si une loi l'eut permis, il eut, galanterie oblige, seulement mis une baffe sur le minois des premières et botté le fessier des seconds. Il fallait avoir intégralement renoncé au principe de civilisation, avoir atteint les tréfonds de la dépravation, pour musicalement célébrer les courants d'air glaciaux hivernaux. Les citoyens sains, en général, et les grands-mères en particulier, n'appréciaient guère ces éléments venteux qui vous gelaient les joues et vous mettaient la goutte au nez.


Quant aux ethnologues de salon parlant d'une touchante tradition folklorique française, là, on touchait du doigt, jusqu'à l'épaule, au grand n'importe quoi. Cette chanson, du XIXeme siècle,   intitulée Jingle bells (tintez clochettes), venait de l'Etat de Géorgie, aux Etats-Unis. Elle fut composée pour célébrer la fête, on ne peut plus américaine, de Thanksgiving. Contrairement à sa version francophone, elle n'évoquait ni vent, ni grand-mère, ni Nouvel An.  

A tout prendre, il préférait entendre le Casatchok, de feue madame Rika Zaraï. Au moins, on y conseillait de se réchauffer, de manger et de boire un bon coup.



948 - Dimanche 18  février 2024 


Shocking


Ainsi qu'il le faisait régulièrement, il venait rendre visite à Bétonin, son ami d'enfance, d'adolescence, de régiment et de toujours. Ce dernier l'invita à s'asseoir à sa table et à partager avec lui un maroilles et une bouteille de Haute- Marne Rouge. Leur futur proche s'annonçait donc sous les meilleurs auspices, pourtant son copain faisait grise mine.

- « D'où te vient cet air bien chagrin, mon bon Bétonin ? » 


- « J'ai regardé un documentaire britannique sur la première guerre mondiale, mon cher Gabérial. » 


- « Comment cette anodine, mais néanmoins culturelle,  occupation a-t-elle pu allumer en ton cœur pur la flamme de ce profond désarroi qui assombrit ton regard d'habitude si enjoué ? »


- « J'ai vu comment certains professionnels audiovisuels anglo-saxons se permettent, sans vergogne, de prendre quelques libertés avec la vérité historique. »


- « Concrètement, en quoi ont-ils si honteusement fait offense à cette vérité, que tu t'en sois à ce point trouvé affligé ? »


- « Tout d'abord, je les entendis expliquer que le premier tank fut créé par les ingénieurs anglais William Triton et Walter Gordon, en 1915. Or, le capitaine français Léon René Levavasseur avait déjà mis au point un char d'assaut, en 1903. »


- « Je comprends ta légitime contrariété et je m'y associe. Cela étant dit, les Britanniques furent les premiers à combattre avec des chars d'assaut, lors de l'offensive de la Somme, en 1916. »

- « Ben, tiens, à propos de la Somme, le documentaire a présenté cette offensive comme une opération décidée par les Britanniques. Son but consistait à amener les Allemands à retirer des troupes de Verdun, afin de donner aux Français la possibilité de gagner la bataille. Sauf que, premièrement, l'offensive de la Somme a été planifiée conjointement avec les Français. Deuxièmement, elle a été préparée plusieurs mois avant qu'il ne vînt à l'esprit de Falkeyhan l'idée d'aller saigner l'Armée française à Verdun. Troisièmement, aucune troupe allemande ne fit mouvement vers la Somme. »


- « Par ailleurs, il me semble que les Français participèrent largement à l'offensive de la Somme et que, contrairement aux Britanniques, ils atteignirent les objectifs fixés. »


- « Assurément, mais cette vidéo d'Outre-Manche a   complètement passé ce fait sous silence   »


- « Toutes ces approximations ne relevaient sans doute pas de mauvaises intentions. Il s'agissait certainement de présenter les choses sous un jour permettant d'accentuer la valeur et le courage des soldats britanniques. »  


- « Croire que la valeur et le courage soldats britanniques aient besoin de se voir accentuer, est une insulte à leur  mémoire. »


- « It's not false. »



949 - Samedi  24  février 2024 

    

Continuons     le combat     

 

Pour lui, dans l'Histoire millénaire de la France,     après celle    de la naissance du maroilles, il n'existait qu'une date méritant vraiment d'être retenue et célébrée.  Il s'agissait du jour où le pays sortit des noires ténèbres de la vétusté pour entrer dans la blanche lumière du progrès. Le Français, jusque-là archaïque, pour ne pas dire préhistorique, devint alors un homme moderne.


Le 1er octobre 1968, pour la première, il put voir son petit écran occupé par de la publicité. Cinq spots, d'une durée totale de deux minutes, apparurent après le journal du soir, à 20h30. Bien sûr, il ne s'agissait encore que de l'aube des temps nouveaux. Il fallut attendre de nombreuses et longues années, avant qu'il puisse bénéficier d'espaces publicitaires d'une durée digne de ce nom. 


En effet, ce ne fut qu'avec la loi du 1er janvier 2009, qu'il obtint le droit et le bonheur de voir porter le temps des réclames à 12 minutes par heure d'horloge. Puis, la même année, il eut la divine surprise de la loi du 5 mars. Elle donna aux chaînes la possibilité, tant attendue, de procéder à deux interruptions publicitaires lors de la diffusion d'une œuvre cinématographique ou audiovisuelle. Cependant, jusqu'à ce jour, le total des messages publicitaires ne peut malheureusement dépasser 3h24, par période de 24 heures. 


Nous sommes donc loin d'avoir atteint la modernité dans sa complète et entière plénitude, pensa-t-il. Plus que jamais, il demeure nécessaire de mener le combat. L'homme moderne devait se battre sauvagement pour que les chaînes télévisuelles réduisent la place acordée aux émissions et aux films afin d'en donner une plus grande aux publicités. Aux armes citoyens ! Marchez ! Marchez ! Qu'un flot de pubs abreuvent nos télévisions !

 

950 - Dimanche 25  février 2024 


Shocking, once more


Bétonin ne manquait jamais de rendre à Gabérial les visites qu'il lui favait faites. Comme tout le monde le savait, du moins ceux qui ont lu la bêtise 948 du samedi 17 février 2024, Gabérial était son ami d'enfance, d'adolescence, de régiment et de toujours. Ainsi que le voulait leur tacite habitude, Gabérial l'accueillit avec un beau maroilles et une jolie bouteille de Montbazillac. Donc, tout se présentait pour le mieux dans le meilleur des mondes, pourtant Bétonin affichait derechef un air dépité.


- « Ne me dis rien, Bétonin. Je parie que tu as encore regardé un documentaire britannique sur la première guerre mondiale. »


- « Absolument pas, je n'ai pas regardé de documentaire télévisé britanique sur la première guerre mondiale, mais sur la seconde. »


- « Qu'allais-tu faire dans cette galère ? Bon, alors comment des amateurs de cricket ont-ils encore réussi à rendre chagrin un champion de billon tel que toi ? »

- « Ils l'ont pu à cause de leur présentation de la bataille d'Angleterre. Ils ont occulté le fait que la Luftwaffe ne parvint pas à posséder de supériorité numérique parce qu'elle avait perdu 1428 appareils. »  

 

- « Qu'en avait-elle fait ? Elle ne se souvenait plus de l'endroit où elle les avait rangés ? »


- « Non, ils avaient été abattus en mai, juin, 1940, par les Français qui, comme chacun sait, ne s'étaient pas battus. » 

- « J'ignorais. »

- « Inutile de laisser le rouge de la honte te monter au front et de battre ta coulpe, tu n'es point le seul. Au cours des quatre mois que dura la bataille d'Angleterre, 1887 avions   allemands furent descendus. Le documentaire made in Albion ne précise pas que le plus grand nombre d'entre eux furent envoyés au tapis par des pilotes polonais. »       


« Des pilotes polonais ? »


- « Oui, Polonais et il y avait également des pilotes français, belges, canadiens, australiens, sud africains, indiens, tchèques, irlandais, américains. Eux aussi, n'ont pas eu l'honneur d'être mentionnés. »   


- « Tu devrais visionner des émissions  françaises. »


- « Elles ne sont pas forcément meilleures et il y en a tellement peu, que tu passes plus de temps à les chercher qu'à les regarder »

    

953 - Samedi 09 mars 2024    

   

« Que la stratégie soit belle est un fait, mais n'oubliez pas de regarder le résultat » 



Le froid de l'aube naissante était plus mordant qu'un loup enragé. Pourtant, nul n'en avait cure. Non, rien de rien, non, ils ne ressententaient rien, ni les engelures, ni les gerçures, tout cela leur était bien égal, seul comptait l'agrément de  voir leur adjudant approchant de leurs rangs. Bientôt, ils le virent apparaître dans le blanc et vaporeuse halo d'un rayon de soleil venu percer la brume matutinale. Il était bronzé comme un dieu égyptien, sculptural comme un dieu grec, festif comme un dieu gaulois, combatif comme un dieu scandinave, zen comme un dieu japonais et parfumé comme un maroilles. 



- « Garde à vous ! Repos ! Garde à vous ! Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! » 



- « Merci sergent, repos messieurs ! Messieurs, je vous parlerai aujourd'hui de nos relations avec la mère patrie de la kidney pie. Par le passé, durant un grand nombre d'années, qui finirent par constituer plusieurs siècles, les Anglais nous furent antipathiques, à cause de leur propention à systématiquement nous causer des contrariétés. Il nous fallut l'Entente cordiale et deux guerres mondiales pour les apprécier et, qu'en dehors du Tournoi des six Nations, nous ne possédions plus aucune raison d'avoir le plaisir de leur rentrer sauvagement dedans. »

                                                                                              « Mon adjudant, une question nous brûlent incandescemment les lèvres et nous savons tous qu'il n'est que vous pour y apporter une réponse pertinente. Aussi, au nom de mes camarades et du mien, me permettez-vous de vous la poser ? »


- « Je te permets de poser, caporal. »



- « Si vous deviez résumer l'Anglais en un seul mot, quel serait-il ? »


- « Esthète » - « Esthète ? »


« Oui, esthète, parce que le seul général au monde qui ait un jour exprimé la poétique volonté de faire des batailles des œuvres d'art. se nommait John Frederick Charles Fuller. Et il était Anglais ! »


« Of course, sir »


- « Pour terminer ce rassemblement, sans transition, eu égard au contexte actuel, je soumets à votre réflexion, les deux vers suivants : 



 Que reste-t-il des idéaux sous la mitraille 

Quand les prêcheurs sont à l'abri de la bataille »


 

954 - Dimanche 10 mars 2024



Manga


S'il reconnaissait sans problème leur réalité et leur importance, contrairement à Immanuel Kant, il n'avait, jusqu'ici, jamais accordé de véritable intérêt aux phénomènes de mode. Ce fut celui déclenché par Kiyoko Matsumoto  qui le fit changer d'attitude. Cette volte-face intellectuelle ne l'amena pas, à l'instar du penseur allemand,  à une quelconque réflexion philosophique. Par contre, il   engendra en lui un sentiment de consternation qui n'eut  d'égale que sa profonde perplexité.


Kiyoko Matsumoto (松本 貴代子, en version originale) n'était pas, comme son nom le laissait présager, une charmante étudiante bérichonne, mais une charmante étudiante japonaise. Le 12 février 1933, à l'âge de 19 ans, selon les uns, de 21, selon les autres, elle mit fin à ses jours de façon plutôt originale. Elle se jeta dans le cratère du mont Mihara, un volcan actif situé sur l'île d'Izu Ōshima.

Ce tragique et bien triste fait divers déchaîna une véritable frénésie médiatique qui déclencha deux effets de modes. Le premier amenait les personnes branchées à se rendre sur les lieux de la mort de la malheureuse Kiyoko Matsumoto. Les affaires étant les affaires, la compagnie maritime Tokyo Bay sauta sur l'occasion pour ouvrir une liaison quotidienne avec l'île d'Izu Ōshima et les pêcheurs locaux pour proposer des promenades à dos d'âne jusqu'au sommet du volcan.


Le second consistait à imiter Kiyoko Matsumoto. Ainsi, durant l'année 1933, 804 hommes et 140 femmes se jetèrent-ils dans le cratère du mont Mihara. Plus de 2000 personnes se tuèrent de cette manière, avant que cette mode ne prît.


Franchement, pensa-t-il, je ne vois pas dans tout cela quoi que ce soit qui puisse m'inciter à éprouver le moindre remords de faire partie des démodés, voire des désuets. 

 

955 - Samedi 16 mars 2024


Fatalitas


Parmi les gaziers qui gravitaient dans son environnement naturel, il n'en pouvait plus de ces geignards qui se plaignaient du caractère itératif de certaines contrariétés. Ces pleurnichards lui échauffaient d'autant plus la bile qu'il fallait en plus qu'ils cherchassent une explication à ces  tracasseries cycliques. 


La plupart de ces énergumènes pensaient que la survenance de ces embarras récurrents relevaient de la « loi de Murphy », également connue sous la dénomination plus poétique de « théorie de l’emmer...ment maximum ». Le principe plein d'optimisme de cette dernière voulait que « tout ce qui est susceptible d'aller mal, ira mal ».


Il aurait été possible de leur opposer que, d'une part, ce dogme ne comportait aucune affirmation quant à l'aspect répétitif du phénomène. Et d'autre part, l'esprit humain générait des corrélations dites illusoires, à cause de sa fâcheuse tendance à exagérer la relation de cause à effet entre deux événements se produisant en même temps.  


Il ne prenait cependant pas la peine de s'attarder sur  ces arguments. Il trouvait plus constructif de trouver des solutions à ces inconvénients récidivistes. Or donc, c'était toujours quand vous vous vous trouviez sous la douche et que vous veniez tout juste de finir de vous savonner de la tête aux pieds, que le téléphone sonnait. Ou alors, quand à la suite d'un geste maladroit ou d'un moment d'inattention, vous laissiez tomber votre tartine de confiture, elle atterrissait toujours sur le sol, côté confiture. 


Eh bien, lui, plutôt que de se lamenter, il agissait. Il ne prenait plus de douche, il avait revendu son téléphone et il ne mangeait plus que des tartines de maroilles. 



956 - Dimanche 17 mars 2024


De jure uxoris


Afin de renouveler les plumets de leurs javelots, Zéphérinus et Ydonil se rendaient pedibus cum jambis jusqu'à l'atelier   de l'artisan adéquat. Javeloteux aux jarrets affermis par une consommation régulière de maroilles, ils affrontaient sans  crainte et de conserve ce pédestre effort. La durée du trajet à effectuer le leur permettant largement, ils devisaient cordialement.


- « Ydonil, que penses-tu de nos congénères mâles qui pensent que les femmes ne sont pas nos égales ? »


- « Ydonyl, la question ne se pose pas tellement la réponse me paraît évidente : ils ont raison. »


Ydonyl s'arrêta sur place plus brutalement qu'une Deux Chevaux pilant à mort devant les chenilles d'un char d'assaut lui refusant la priorité.


- « Quoi ?! Mais comment peux-tu ne pas t'empourprer de honte à énoncer d'aussi honteux propos, tant en plein XXIeme siècle qu'en plein air ?! »


- « Au contraire, je m'en montre particulièrement fier et n'en démordrai pas. Je persiste et signe : la femme n'est pas notre égale. Elle nous est supérieure. »


- « Ah, bon... D'accord... J'avais cru que tu... » 

- « Elle est beaucoup plus imaginative, plus créatrice, que nous le sommes. »


- « Bien que j'acquiesce avec empressement, il ne me vient pas d'exemple à l'esprit. »


- « Laisse-moi donc t'en donner un.»


- « Lequel ? »


- « Celui de Lü Zhi, elle épouse en juste noce l'empereur Han Gaozu, qui règne sur la Chine de 202 à 195 avant Jésus Christ. A la fin de sa vie, l'impérial époux tombe sous le charme et l'influence d'une favorite nommée Qi. Cette dernière tente d'évincer du trône Lü Zhi et son fils. »


- « Je ne vois pas en quoi... »


- « Blessé lors d'une bataille, Han Gaozu meurt avant que Qi ne parvienne à ses fins. Veuve aussi éplorée que rancunière, Lü Zhi fait arrêter son ex rivale, Qi. Elle ordonne qu'on lui crève les typans, qu'on l'ampute de tous ses membres, qu'on lui arrache la langue et les yeux, puis qu'on la soigne afin qu'elle demeure en vie. Elle condamne ensuite Qi, rendue sourde, muette, aveugle, sans bras, ni jambes, à passer le restant de ses jours dans des latrines. Connais-tu un seul homme capable d'une telle  puissance inventive, d'une telle force d'innovation ? »

   

- « J'avoue que même le gars Léonard de Vinci n'arrive pas à la cheville de cette dame. »


957 - Samedi  23  mars 2024


Banzaï sur la Californie       


Hier encore, il aurait parié sa dernière part de maroilles, qu'en dehors de Pearl Harbor, les combats de la seconde guerre mondiale ne touchèrent pas directement le territoire des Etats-Unis. Il se félicita de n'en avoir rien fait lorsqu'il découvrit les évènements de Los Angeles, du 25 février 1942. 

Ce jour-là, à 2h25 du matin, toute la population de Los Angeles est réveillée par les sirènes d'alerte. Une attaque aérienne menace la ville. Pendant près d'une heure, au moins un million de Los Angéliens observent la DCA qui se déchaîne contre des appareils japonais qui survolent leur cité.   

A la fin de l'attaque, côté américain, le bilan se solde par 1430 obus anti-aériens tirés, six tués et de nombreuses habitations détruites, avec un bon nombre de leurs occupants blessés. Côté japonais, aucun avion n'a été abattu, aucune bombe n'a été larguée. Les destructions matérielles et les habitants blessés sont dus à des obus de DCA défectueux, qui sont retombés et ont explosé au sol. Les tués, pour trois d'entre eux, l'ont été dans des accidents de la route entraînés par la chute de morceaux provenant d'obus de DCA qui, eux, avaient bien explosés en l'air. Les trois autres personnes décédées ont été victimes de crises cardiaques causées par la peur.


Voilà, une bien tragique et singulière affaire, s'était-il dit. D'autant plus singulière que, selon la myriade de témoins de cette « attaque », les aéronefs ne ressemblaient en rien à des avions. De plus, après la guerre, lorsqu'ils eurent accès aux archives de l'armée de l'air nippone, les Américains découvrirent qu'elle n'avait jamais envoyé une quelconque force aérienne au dessus de Los Angeles. 


Mais alors se demanda-t-il, qui se baladait dans le ciel de Los Angeles, le 25 février 1942 ?     


Commentaire 

Hawaï ne fut pas le seul territoire des Etats-Unis à avoir été  touchés par les combats de la seconde guerre mondiale. 


En, 1942, les Japonais s'emparèrent les îles d'Attu et de Kiska, à l'extrémité Ouest de l'archipel des Aléoutiennes, en Alaska. Nos boys les reprirent en 1943.

De novembre 1944 à avril 1945, les Japonais équipèrent         9300 ballons de bombes explosives incendiaires, puis les lâchèrent en direction de notre côte ouest. Seuls 500 arrivèrent à destination. Les rares qui explosèrent ne firent que des dégâts mineurs. Sauf un, qui malheureusement tua une mère de famille et ses cinq enfants.

Bufallo Bill


958 - Dimanche 24 mars 2024  


La XVeme dynastie


- « Monsieur Azénard Ducracelle gagne son pain quotidien grâce à son activité de pilote professionnel d'arracheuse de pommes de terre automotrices de course. Il affiche à son palmarès les titres de vainqueur du grand prix de Lotharingie et des 24 heures de Maroilles. Telle la porte du château-fort défoncée par un bélier,  ce magnifique champion est sorti de ses gonds à la suite de certaines assertions émises à propos de la couleur de madame Cléopâtre VII Thea Philopator. Il lui serait fort agréable de nous ouvrir le fond de sa pensée sur cet égyptologique sujet. Eh bien ouvrez, ouvrez sans retard, mon bon Azénard. »                       


- « Soyez loué pour votre magnanimité, cher Nervien. »


- « Je vous en prie, mon toujours aussi bon Azénard. Je suppose que vous allez évoquer le narratif nous présentant une Cléopâtre noire. »


- « Effectivement, le sujet m'a interpelé, mais pas pour les raisons que je vous soupçonne de me prêter. » 


- « Ah bon... Vous n'avez donc pas l'intention de massacrer les auteurs de cette thèse ? »


- « Bien sûr que si, vous pouvez compter sur moi pour faire concrètement comprendre à ces idiots le sens du mot carnage. » 

 

- « Ah ! Vous me rassurez. »


- « Ces ignorants d'appellation d'origine contrôlée de qualité supérieure, nous transforment en Joséphine Baker une femme dont le nom et les ancêtres étaient plus Grecs qu'une χωριάτικη, pardon, qu'une choriatiki, voulais-je dire. »

 

- « Je comprends que vous vous irritiez d'une aussi grande extravagance. »


- « Non, je ne m'en irrite point tant est énorme son absurdité. Par contre, je fulmine à la vue de ces illéttrés pataugeant avec suffisance dans l'épais bouillon de leur inculture. Si ces analphabètes avaient fait preuve d'un minimum d'intérêt pour la réalité historique, elle leur aurait appris qu'il n'était nul besoin d'inventer une reine d'Egypte noire, parce qu'il a existé une dynastie de pharaons noirs, la XVeme, parfaitement attestée, elle. »


- « J'ai peur, mon bon Azénard, d'être moi-même ignare, car j'ignorai ce fait. »


- « Oui, mais vous, au moins, vous avez conscience d'être un pauvre ignare. »


- « Je vous remercie... »


- « Au VIIIeme siècle avant Jésus Christ, le roi du royaume de  Koush, Piânkhy, envahit l'Egypte et s'empare du trône de pharaon. Il aura quatre successeurs : Chabataka, Chabaka, Taharqa et Tanouétamani. Ainsi, de 747 à 656, l'Egypte fut-elle dirigée par des pharaons noirs. »


- « Sinon, Aimé Césaire, on est sûr qu'il était Noir ? »


- « Vous voulez que je vous colle une baffe, ou quoi ? »

 

Commentaire  


En parlant de Lotharingie, savez-vous, qu'à l'époque du Haut Moyen-Age, le mot Lotharingus désignait aussi bien un habitant de Toul, que de Metz, Liège Cambrai ? Etonnant, non?

Lothaire 



959 - Samedi 30 mars 2024


Pragmatisme météorologique      


Il ne manquait pas de gaziers qui s'étonnaient, ou s'amusaient, voire lui reprochaient, de se poser des questions que personne, mais vraiment personne, ne se posaient. Selon certains, il eut même été capable d'aller couper les cheveux en quatre sur la tête d'un chauve.


Qu'avait-il besoin, lui disait-on souvent, de toujours vouloir  savoir le pourquoi du comment. Il ferait mieux de cesser de se compliquer l'existence en passant son temps à se tordre la cervelle pire qu'une wassingue à essorer. Au lieu de toujours chercher à s'interroger, à comprendre, qu'il se contentât donc prendre la vie comme elle venait. 

Il n'avait cure de ces conseils ou reproches. Il s'obstinait à se montrer curieux, à exercer son sens critique, à chercher la vérité. Ainsi, dernièrement, s'était-il demandé pour quelle raison il avait été donné une forme octogonale au panneau stop et celle d'un triangle inversé à celui du cédez le passage. Il avait fini par découvrir que cela permettait qu'ils restassent reconnaissables, malgré la neige qui eut pu les rendre illisibles en se collant sur eux.

Tout cela est bel et bon et judicieux et prudent, pensa-t-il. Cependant, toutes les trompettes gouvernemento-médiatico-écologiques  le claironnaient à tout-va : l'arrivée du réchauffement climatique se faisait imminente. Donc, d'ici peu, la neige ne deviendrait plus qu'un souvenir, du moins pour ceux qui étaient assez âgés pour avoir eu la chance de la connaître. Alors, qu'attendait-on pour rapidement adapter les panneaux de signalisation routière aux nouvelles conditions climatiques ? Il fallait sérieusement penser à rapidement les équiper de parasols.



960 - Dimanche 31 mars 2024


Disciples phocéens d'Euphron


Vive le sport ! Vive le sport pour sa contribution au traitement des pathologies chroniques, des affections de longue durée, des maladies neurodégénératives, psychiatriques et des masses adipeuses excédentaires! Le sport possédait de multiples effets bénéfiques, il n'en disconvenait pas. D'ailleurs, comment oser dire le contraire, lorsque le plus hautre sponsable de l'Etat payaient musculeusement de sa personne  pour inciter le citoyen à se dépenser physiquement ?


Cependant, il regrettait que personne ne précisât que, malgré toutes ses indéniables qualités, le sport n'en pouvait pas moins, parfois, présenter quelques dangers. Il gardait, en particulier, en mémoire le cas d'une rencontre sportive qui causa 38 morts et plus de 200 blessés. Les faits se déroulèrent le dimanche 28 avril 1792, à Marseille, au couvent des Récollets, dont ne subsiste aujourd'hui que l'église Saint Théodore. Pourtant, normalement, la pratique de la discipline concernée n'avait alors, tout comme aujourd'hui, rien de particulièrement périlleux. Il s'agissait d'une innocente partie de pétanque.


Les équipes participantes étaient composées de gardes nationaux et des Révolutionnaires de la Société Populaire de Marseille. Rien ne laissait présager le drame à venir. L'atmosphère était bon enfant et les joueurs, détentus. Simplement, il eut sans doute été préférable qu'ils jouassent avec des boules réglementaires, plutôt qu'avec des boulets de canon. Ils eussent dû aussi veiller à mieux assurer leurs lancers . Cela eut évité  qu'un boulet allât heurter un des tonneaux de poudre stockés dans le couvent. Le heurt entre les deux eut pour regrettable conséquence de déclencher une meurtrière explosion.


Du coup, pensa-t-il, on ne saura jamais qui a fait Fanny.  



961 - Samedi 06 avril 2024


U.S history


Bon, alors, comme personne ne peut l'ignorer depuis les bêtises 948 et 950, Gabérial et Bétonin se rendent régulièrement mutuellement visite, pour manger un morceau de maroilles et boire un coup de rouge ou de blanc. De nouveau, à l'instar de précédemment, Bétonin affichait son air des mauvais jours.

- « Bétonin, tu n'as quand même pas repiqué au truc. Dis-moi, que tu n'as pas encore regardé un documentaire britannique sur la seconde guerre mondiale. »


- « Je ne le dirai pas, Gabérial, puisqu'il s'agissait d'un documentaire américain. »   

- « Et comment un american TV program a-t-il fait naître en ton noble coeur le désappointement que je lis au fond de tes grands yeux romantiques, mais néanmoins indubitablement virils ? » 


- « C'est que ces espèces de fils de cowboys n'ont  soufflé mot du rôle des Résistants et les soldats de la France Libre dans la défaite de l'Allemagne. »


- « Les fils, petits-fils et arrières petits-fils de Jacques Bernard Dupont ne font, en général, pas mieux. »


- « Certes, mais nul ne peut justifier de sa propre turpitude en se prévalant

de celle d'autrui. »

- « Ça, c'est vrai, ça ! Comme disait la mère Denis. »


- « Je vois que tu connais les grands classiques. Or donc, en traitant du débarquement du juin 06 juin 1944, les Yankees télévisuels ont consciencieusement oublié de signaler la participation active de 3051 Français, paras, commandos, marins et aviateurs. Il en est de même concernant les plans rouge, tortue, violet, vert et le rôle de la division Lelerc dans la bataille de Normandie. » 


- « Excuse-moi, mais à quoi correspond cette palette de plans multicolorico-testudines ? »


- « Alors, l'organisation et la mise en œuvre de ses plans ont été confiées à la Résistance. Leurs objectifs, parfaitement atteints, consistaient, pour le rouge, à détruire les dépôts de munitions allemands, pour le tortue, à neutraliser les axes routiers, pour le violet, à couper les lignes de téléphone, pour le vert, à saboter les voies de chemin de fer. Sans ces  action et sans jeu de mots, le débarquement serait tombé à l'eau. »


- « D'autres choses ont-elles mis l'épreuve tes nerfs d'émotif à fleur de peau, mais néanmoins indubitablement viril ? »


- « Oui... Il s'agit de deux fois rien... Ils ont seulement omis le fait qu'au moins la moitié de la France a été libérée par les maquisards et les soldats francais. Evidemment, ils n'ont pas non plus raconté que les troupes françaises ont envahi un tiers du territoire allemand. »  


- « Non, mais là, faut que tu arrêtes de regarder ces trucs. Refais-toi plutôt les épisodes de Kaameloot. 




962 - Dimanche 07 avril 2024


Amicus Plato sed major amicus veritas                


Afin d'apporter son soutien pécuniaire à l'Amicale des Aiguiseurs de Coupes-Ongles du Marconois, il avait acheté un billet de loterie à un des membres de cette philanthropique société. Et, ô divine surprise, le tirage lui fut favorable. Il fit de lui l'heureux gagnant d'un magnifique ouvrage traitant de la Rome antique et d'un non moins magnifique stick à lèvres hydratant. Inutile de dire le sentiment de triomphe et de bonheur que lui procura le gain de ces lots.  


Cependant, si du stick à lèvres hydratant, il n'eut qu'à se féliciter, il n'en fut pas de même du livre. Malgré le sage adage selon lequel à cheval donné, on ne regarde pas les dents, il n'avait pu s'empêcher de grincer des siennes en parcourant les pages de ce bouquin. A sa décharge, il fallait   préciser que l'ouvrage comportait nombre d'irritantes approximations. Le fait que son auteur ne devait son titre d'historien qu'au jour où il se l'était autodécerné, n'y était sans doute pas pour rien. 


Ainsi, cet usurpateur de compétence avait-il écrit que le cruel Jules César, assoiffé de vengeance, avait fait étrangler Vercingétorix dans la prison du Tullianum. Présenter Jules sous les traits d'un quasi psychopathe, relevait du ridicule le plus achevé. Le gaillard n'était nullement du genre sadique, par contre, ce fut un véritable salopard qui n'hésita pas à déclencher une guerre contre les Gaulois, à les massacrer, à plonger son pays dans la guerre civile, pour satisfaire son appétit de pouvoir.


Que Jules eut voulu se venger de Vercingétorix, en le faisant étrangler, pouvait prêter à discussion. Vercingétorix fut, un temps, allié et proche de César. En devenant son ennemi, pour les Romains, il commettait une trahison, un crime passible de la peine de mort. A Rome, il existait différents modes d'exécutions capitales, dont l'étranglement. Il était réservé aux prisonniers de condition supérieure. En l'infligeant à Vercingétorix, César reconnaissait sa haute lignée et a, peut-être, également voulu lui éviter l'humiliation d'une lente et cruelle agonie dans un cul de basse fosse.


On ne le dira jamais assez, pensa-t-il, l'Histoire, c'est comme le maroilles, faut pas laisser n'importe qui en faire.



963 - Samedi 13 avril 2024


La goutte d'eau qui fait déborder le vase


Comme Maurice, il affirmait que dans la vie, lui, il ne s'en faisait pas. Pour lui, les petites misères étaient passagères. Tout ça s'arrangeait. Il n'avait pas un caractère à se faire du tracas. Croyez-moi, disait-il, sur Terre, faut jamais s'en faire, moi, je ne m'en fais pas. 


Oui, mais, cela, c'était avant, avant la calorifique apparition du changement climatique. Depuis, il ne se passait pas un jour, sans qu'il fut question de changement climatique à la radio, sans qu'il fut débattu de changement climatique à la télévision, sans qu'il fut parlé de changement climatique à tort et à travers. Il en était résulté en son for intérieur un saisissant bouleversement. Si sa confiance dans le maroilles demeurait intact, par contre, sa folle insouciance, son bel optimiste, l'avaient abandonné. Il vivait désormais dans l'appréhension. Le réchauffement climatique lui faisait soucis. Il se sentait en particulier préoccupé par la question de l'eau potable.  


Si elle venait à devenir rare, se disait-il, on pourrait toujours consommer le pastis, sec, mais difficile de faire de même avec les pâtes. Bien sûr, il resterait toujours la solution de les remplacer par des frites, bien qu'elles risquassent de moins bien se marier avec une sauce  bolognaise ou une carbonara. Heureusement, les autorités semblaient sensibles à ce problème. Elles s'étaient émues de constater qu'un litre d'eau potable sur cinq, soit au total d'un milliard de m3, soit 20% de la production, fussent perdus, à cause de fuites dans les réseaux de  distribution.


La vétusté et le mauvais entretien de ces derniers expliquaient ces choquantes déperditions. Consciente de ce scandale et désireuses d'y mettre un terme, une trentaine de communes avaient récemment pris la   mesure d'urgence qui s'imposaient. Elles avaient décidé d'augmenter le tarif de l'eau durant la période estivale. Il trouva cela bel et bon, d'autant plus qu'il gageait que cette disposition ne tarderait pas à se voir bientôt appliquée toute l'année. 



964 - Dimanche 14 avril 2024  


La nostalgie n'est plus ce qu'elle était


Alors que le poids des ans étiolait le commun des mortels, lui, tel un dieu de l'Olympe, demeurait immuable dans sa perfection physique, intellectuelle, mentale, professionnelle, sportive et capillaire. Tenant   par-dessus tout à demeurer modeste, il se montrait toujours prompt à faire étalage de son ahurissante excellence, parce que « la modestie consiste toujours à ne jamais se prendre pour moins ni plus que ce qu'on estime qu'on croit qu'on vaut, ni pour plus ni moins que ce qu'on évalue qu'on vaut qu'on croit. » 


Voilà, pourquoi, a leurs yeux, aucun mot, aucun texte, ne se trouvaient à la hauteur de l'admiration qu'ils lui vouaient. Pour eux, il n'existait rien de plus émouvant et de plus exaltant que l'instant de sa venue au rassemblement.


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, ayant entendu que certain  caressait publiquement le projet de nous offrir un aller sans retour pour les rivages d'une mer aussi lointaine qu'étrangère, j'aimerais vous entretenir de la nostalgie. Il s'agit d'un problème  d'importance pour nous tous. »


- « Mon adjudant, sans vouloir vous faire offense, je me permets de vous demander d'avoir la bonté de m'excuser de vous demander pardon qu'il me vienne à l'esprit de penser. »


- « Exprime-toi, sans peur et sans haine, caporal. »


- « Que le romantique, le mélancolique ou l'amateur de pattes d'éléphants et de cols pelles à tartes, soient concernés par le sujet, j'y consens, mais le militaire, qu'a-t-il à voir dans tout cela ? »  


- « Tout, il a tout à y voir. A l'origine, la nostalgie désignait une maladie conceptualisée par le médecin alsacien Johannes Hofer dans la thèse universitaire, qu'il présenta en 1688. » 


- « Loin de moi l'idée de me montrer insolent, mon adjudant, néanmoins, je réitère : le militaire, qu'a-t-il à voir dans tout cela ?  »


- « Cette pathologie, causée par le mal du pays et des êtres chers, se traduit par un état dépressif générant d'importantes perturbations  physiologiques pouvant conduire au décès. Le rapport avec les militaires réside dans le fait que ce mal perfide s'attaque sournoisement aux soldats. Ainsi, par exemple, il fut responsable de milliers de morts, lors de l'occupation de l'Allemagne par la Grande Armée, au XIXeme siècle. »


- « Et contre ce truc, on nous a pas fait un vaccin à ARN messager ? »



965 - Samedi 20  avril 2024  


Bizarre, vous avez dit, bizarre ?


D'aussi loin qu'il s'en souvienne, il l'avait toujours aimée. Aimer tellement qu'il l'aimait presque autant maroilles. Elle était sa grande passion, elle, la photographie. Aussi, était-il étonnant, et il s'en montrait le premier étonné, qu'avant dimanche dernier, il ne se fût jamais intéressé aux premiers pas de l'homme sur la Lune. Ou, plus précisément, que les clichés pris à cette occasion n'eussent pas attiré son attention plus tôt. Quand il les découvrit, leur perfection lui coupa le souffle. Une telle qualité requérait des astronautes une compétence et un talent qui n'appartenaient qu'aux plus grands photographes professionnels. Son admiration  grandit encore davantage lorsqu'il étudia les conditions de prises de vue.


Neil Amstrong et Buzz Aldrin utilisèrent trois exemplaires du nec plus ultra des appareils des années soixante : le Hasselblad 907X. Néanmoins, il ne s'agissait pas d'un modèle spécialement conçu pour la NASA. Le premier pékin venu, pour autant qu'il en eut les moyens, pouvait acheter le même, dans le magasin au coin de sa rue. Pour la pellicule1, Neil et Buzz disposaient de films Kodak tout à fait basiques, que le premier pékin venu pouvait également acheter, dans le magasin au coin de sa rue.  Prendre des photos sur la Lune avec d'aussi modestes moyens dépassait les limites de l'exploit. 


Leurs casques empêchaient les astronautes de baisser la tête. De ce fait, il leur était impossible de regarder dans le viseur des appareils photographiques fixés sur leur torse. Alors, comment arrivèrent-ils à obtenir des cadrages aussi parfaits ? Egalement, de quelle manière étaient-ils parvenus à appuyer sur le déclencheur, à manier les organes de réglage de la netteté et de l'exposition, avec des gants trop épais pour leur permettre d'effectuer ce type de manipulations ?   


De toute façon, même s'il leur eut été loisible de mettre en oeuvre leurs Hasselblad 907X, ceux-ci ne leur auraient servi de rien. D'une part, ces derniers, à l'instar de tous appareils argentiques, ne résistaient pas aux chaleurs dépassant les 45°. Or sur la Lune, au soleil, la température se situe entre 100 et 150 degrés. D'autre part, des pellicules Kodak basiques ne pouvaient éviter de se trouver endommagées par les rayonnements spatiaux et lunaires, donc de devenir inutilisables ou donner des photos dégradées.

 

Vraiment trop forts, ces gars-là, pensa-t-il. Prendre de super photographies sans pouvoir voir et manoeuvrer leurs appareils, de plus inutilisables et chargés des pellicules corrompues, faut le faire quand même ! Incroyable ! Tellement incroyable que si on se laissait aller, on finirait par se demander si...


1 : à l'époque le numérique n'existait pas, tous les appareils étaient argentiques et ne possédaient pas de réglages automatiques. Note de Nervien



966 - Dimanche 21 avril 2024 


« Il y a deux Histoires : l'Histoire officielle, menteuse, puis l'Histoire secrète, où sont les véritables causes des événements » 



Monsieur Léoncien Intrairemarchais est mousquetaire du roi, mais aussi fournisseur attitré et exclusif de la peinture métallisée, ainsi que des gentes en alliage, des gondoles nucléaires de la marine de guerre liechtensteinoise. Sa chaîne de production se trouve dans sa cabane au fond du jardin, à Gouzeaucourt. Léoncien, qui est gai comme un Cambrésien quand il sait qu'il aura des frites et de la Jenlain, s'apprête à faire vaciller sur leurs bases les plus solides piliers de nos certitudes historiques. Allez-y, apollinien Léoncien, vacillez, vacillez, sans ciller. »


- « Je vous avouerai que je connus de longues hésitations avant d'aborder le sujet que je me propose de vous exposer, tant il touche à une part primordiale, pour ne pas dire sacrée, de notre mémoire collective. » 


- « A savoir ? »


- « A savoir, le camembert. »


- « Ouh, la ! Oui, en effet et si je peux me permettre, arisditien Léoncien,  vous vous lancez dans une périlleuse aventure dont les conséquences risquent d'aboutir à des bouleversements auxquels notre société pourrait bien ne pas résister. » 


- « Je sais, mussétien Nervien, mais s'il n'existe de plus mortel danger pour un peuple que de s'abreuver aux sources d'une Histoire frelatée. »


- « Alors, que part votre courageuse et vertueuse entremise, la vérité sorte nue de son puits, en tout bien, tout honneur. »


- « Or donc, veuillez écouter la genèse du camembert, telle qu'on l'entend encore trop souvent colportée. Au mois d'octobre 1791, en pleine Révolution française, une certaine Marie Harel, habitante du village normand de Camembert, donna asile à un curé réfractaire, nommé Charles-Jean Bonvoust. »


- « Je suppose, qu'étant donné la règle du célibat des prêtres, ils ne se marièrent pas, ne vécurent pas heureux et n'eurent pas beaucoup d'enfants. »


- « Nervien, savez-vous qu'Isocrate a dit : prends la parole quand il s'agit de choses que tu sais parfaitement, ou quand la nécessité l'exige. Dans ces deux cas seuls la parole est préférable au silence ; dans tous les autres, il vaut mieux se taire que de parler pour ne rien dire. Bien, je poursuis ma narration. Pour la remercier de son accueil,  Bonvoust apprit à Marie Harel à fabriquer le fromage que l'on produisait dans sa région d'origine : le brie. Ce fut ainsi que naquit le camembert. Marie Harel  transmit la recette à sa fille et à son gendre, qui décidèrent de commercialiser ce nouveau fromage sur les marchés d'Argentan et de Caen. »


- « Votre récit se montre à ce point émouvant, qu'à mon œil droit, une larmichette perla et chut sur mon maroilles. »  


- « Je reconnais bien là, votre noblesse de coeur et votre sensibilité à fleur de peau. Cependant, dans son livre, Le Camembert, mythe français, paru en 1992, le sociologue Pierre Boisard apporta la preuve que l'existence du camembert datait de bien avant 1791. Il rapporte qu'en 1702, Thomas Corneille, frère cadet de Pierre, écrivit dans son Dictionnaire universel géographique et historique, publié en 1708, qu'il se tient à Vimoutiers tous les lundis, un gros marché où l'on apporte les excellents fromages du païs de Camembert. Donc, la p'tite dame bonasse qui invente le camembert grâce à curé fromager, c'est du flan. » 


- «… pâtissier, aux œufs frais. »


- « Pardon ? »


- « Non, rien... »



967 - Samedi 27 avril 2024


P = m×g 


En 1967, se rappelait-il, Jacques chantait : « on nous cache tout, on nous dit rien, plus on apprend, plus on ne sait rien, on nous informe vraiment sur rien ». Depuis cette époque, pensa-t-il, les choses n'avaient pas réellement connu de changement. Il se pouvait même dire qu'elles allaient de mal en pis. 


Il ne fallait pas croire pour autant qu'il se rangeât du côté des suspicieux prompts à voir partout de sombres complots, de ténébreuses conspirations, d'obscures conjurations, de noires manigances. Il n'existait en lui aucune trace du moindre délire paranoïaque. Il ne croyait nullement qu'il existât de secrètes et chafouines puissances, agissant dans l'ombre pour dissimuler le fait que la Terre fût plate et que notre Histoire n'eût pas plus de mille ans.


Il ne criait jamais à l'intrigue sans bonne raison, sans preuve avérée. Aussi, s'il déclarait que le poids donné à tout ce qui se pèse, que ce fussent le plomb, la plume, ou vous-même, devait faire l'objet d'une sérieuse remise en question, on pouvait le croire. Autrement dit, il affirmait, clairement et solennellement, que l'expression « faire bon poids » ne possédait plus aucun sens.

 

Depuis 1889, le kilogramme est étalonné sur le poids d'un cylindre de métal en alliage de platine et d'iridium, protégé sous trois cloches de verre scellées, conservées au Bureau International des Poids et Mesures, à Sèvres. Or, la masse absolue de ce cylindre a diminué en un siècle. En d'autres termes, aujourd'hui, le kilogramme pesait moins lourd. Cela eusse dû , obligatoirement et urgemment, conduire à une révision générale du réglage de nos balances. Or, il n'en était rien. 


Tant et si bien, qu'il ne lui restait plus qu'une seule certitude : le poids indiqué sur l'emballage de son maroilles ne correspondait pas à la réalité ! Combien de média avaient-ils osé dénoncer ce scandale ? Réponse : aucun. Et pourquoi ? Il hésitait entre deux explications. Soit les journalistes ne connaissaient pas le maroilles, soit ils ne savaient pas ce qu'était un kilogramme. Après tout, il existait bien un ministre de l'économie, ex-ministre de l'agriculture, qui ignorait à quoi correspondait un hectare.


968 - Dimanche 28 avril 2024


 Hit parade 


Outre un palais de fin gourmet et une science profonde du maroilles, je possède l'oreille absolue et une connaissance encyclopédique en musique, allant de l'accordéon musette aux polyphonies lapones du IXeme siècle. Malgré tout, se demandait-il, suis légitime, suis-je apte, à juger des productions et interprètres musicaux?


Jusqu'à il y a peu, il pensait que son don et ses remarquables compétences musicologiques lui en donnaient la capacité et le droit. A présent, il en doutait. Il en doutait parce qu'il n'avait jamais pensé à prendre en compte un critère. Il se sentait d'autant plus coupable que ce dernier revêtait, apparemment, une importance primordiale. Il s'était aperçu de sa bévue à la suite des propos tenus par les organisateurs des jeux sportifs devant se tenir en la capitale de la France.          


Il apprit de ces esprits, certainement supérieurs au sien, que la valeur d'un chanteur ne s'appréciait pas en se penchant sur les qualités artistiques de son œuvre et de ses interprétations, mais en comptabilisant son nombres de ventes discographiques. La chanson française la plus vendue étant « Petit Papa Noël », avec 400 millions d'exemplaires écoulés dans le monde, il en conclut qu'il revenait à monsieur Tino Rossi de monter sur la scène de la cérémonie d'ouverture des jeux sportifs devant se tenir en la capitale de la France. 


Commentaire

Si mes sources sont exactes, mademoiselle Aya Kamura a vendu           1,3 million d'unités de son succès discographique. Quant aux Rolling Stone, ils ont vendu 250 millions de disques et AC/DC, 50 millions. Pour ma part, j'en suis à plus d'une centaine de millions.

Wolfgang Amadeus Mozart 


 

969 - Samedi 04 mai 2024


Retour vers le futur 

                  

Le soleil ne se cachait plus, les journées s’allongeaient douillettement, les oiseaux chantaient à plein bec, les fleurs montraient leurs charmantes frimousses. Aucun doute, le printemps était de retour et prenait tranquillement ses aises. Eux, s'en revenaient de leur entraînement de bras de fer. Tout en mettant répétitivement un pied devant l'autre, ils parlaient flexion palmaire, pronation et abduction du poignet, chaîne musculaire, mais aussi lois fondamentales de la physique. 


- « Philvodore, que penses-tu de la time travellers party ? »


- « Rien, Philothime. »  


- « Comment puisse-t-il se faire que tu n'aies aucune opinion sur la     chose ? »


- « Parce que je ne sais pas en quoi consiste cette time travellers party, Philothime. »


- « Je t'explique. Le célèbre physicien Stephen Hawking... » 


- « Ah ! Lui, je le connais. Comme tout un chacun, j'ai lu son The Universe in a nutshell


- « Donc, Stephen Hawking loua une salle à l'université de Cambridge afin d'y organiser, le 28 juin 2009, une fête, avec ballons, guirlandes en papier et autres décorations, champagne, petits fours. Le jour dit, il s'installa dans sa salle de réception. Il attendit, il attendit...  » 


- « Mais, ils ne sont jamais venus. »


- « Hawking avait lancé l'invitation à sa surprise-party le 29 juin 2009. »


- « Vraiment distrait, le gars. » 


- « Pas du tout, il avait agi de la sorte en toute connaissance de cause. »


- « Hein ?! »


- « Il voulait vérifier la réalité des voyages dans le temps. Son          pince-fesses était destiné aux voyageurs temporels. Pour pouvoir se rendre à une soirée se déroulant un 28 juin, en ayant été informé de celle-ci le 29 juin, il fallait avoir eu connaissance de cet événement rétrospectivement, donc venir du futur. Constatant l'absence de convives à son raout, Hawkings en déduisit que les voyages dans le temps n'existaient pas. »


- « Ben, non, c'est juste que les gars lui ont posé un lapin parce qu'il n'y avait pas de maroilles au buffet. »



970- Dimanche 05 mai 2024


Frousse de la Croix Rousse


Il aimait tant son épouse tous les jours de leur vie, jusqu’à ce que la mort les sépare, qu'il ne la considérait pas comme sa moitié, mais comme ses trois quarts. Comparé à lui, Abélard, Shâh Jahân, Tristan, Roméo, le  chevalier Des Grieux, Werther et consort, faisaient figure de petits joueurs de la relation amoureuse. 


Pour son aimée, il se sentait prêt à tout, enfin presque tout. Depuis moult années, sa dulcinée souhaitait l'emmener visiter sa cité d'origine : Lyon. Il trouvait toujours un bon prétexte afin de reporter ce séjour touristique dans la capitale des Gaules. En fait, il ne possédait aucunement l'intention de se rendre un jour chez les Gones. Cela ne signifiait pas qu'il se refusât à côtoyer les compatriotes de Bertrand Tavernier. Il ne doutait pas qu'ils fussent des êtres délicieux, que leur Théâtre Antique valût le coup d'oeil et qu'il eût pu trouver du maroilles rue de la République.


Il n'en demeurait pas moins que le chef-lieu du Rhône lui inspirait une véritable angoisse. Il éprouvait ce sentiment depuis qu'il connaissait l'existence du barrage de Vouglans, situé dans le Jura, à 150km de  Myrelingues la brumeuse. Si cet ouvrage d'art venait à se rompre, la place Bellecour se retrouverait immergée sous six mètres d'eau, d'où son anxiété.


Les autorités considéraient le risque d'une telle catastrophe comme infinitésimal.  Et s'il y avait bien un truc qu'il lui collait les miquettes, c'est bien quand les autorités vous assuraient qu'il n'y avait pas de danger.


71 - Samedi 11 mai 2024


Cocorico


Philosophe humaniste nanipabulophile, il se faisait un devoir de poser des questions existentielles essentielles, d'interpeler sur sujets métaphysiques spécifiques. Il ne concevait pas de vivre sans méditer sur la nature intrinsèque de l'existence, de l'esprit, de la matière, de l'univers, du maroilles. 


Pour lui, la grandeur, la dignité, la noblesse, de l'Homme ne résidait pas dans sa capacité à se déplacer en trottinette électrique en costume étriqué, mais dans sa sensibilité à la transcendance, dans sa volonté de   comprendre pour dépasser sa simple condition d'être biologique. Ainsi, hier soir, vers 19h15, lui vint-il une puissante réflexion spatio-temporelle.


Comme personne ne l'ignorait, le réveil-matin fut inventé, en 1787, par un apprenti américain qui s'appelait Levi Hutchins. Alors, pourquoi, diantre, les coqs s'obstinaient-ils à brailler dès l'aube, afin d'exercer un office dévolu à un article d'horlogerie depuis plus de 237 ans ? Tel Fox Mulder, il mena courageusement une enquête sans concession.


De grands chercheurs, couverts de diplômes et d'honneurs, expliquaient que les coqs ne chantaient pas à gorge déployée pour tirer de leurs lits les flemmards, mais pour impressionner leurs collègues et mesdames les poules. Ils le faisaient à la limite de la nuit et du jour, afin de profiter de l'air l'aube, dont la fraîcheur permet une meilleure diffusion du son. 


Bon, d'accord, se dit-il, mais ce n'est pas une raison pour casser les oreilles du bon peuple. Qu'ils fassent comme tout le monde. S'ils veulent intimider les gars, qu'ils soulèvent de la fonte pour se gonfler les biscoteaux. Et pour draguer les filles, qu'ils roulent en coupé décapotable BMW i8 avec klaxon italien et coude à la portière.


Commentaire 

Il n'en demeure pas moins une autre question : qui réveille le coq ?

Colonel Harland Sanders


972 - Dimanche 12 mai 2024


Gewehr 


Large de carrure, le muscle proéminent, la taille fine, la cuisse et le mollet fuselés, le pied harmonieux, il se tenait devant eux, les fixant de son regard fier et conquérant. Eux, le fixaient de leurs regards émerveillés et idolâtres. Ils admiraient, en tout bien tout honneur, son physique follement avantageux, mais également son humanité phénoménale, son esprit somptueux et son fournisseur de maroilles.


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, il y a peu, certains monorchodides orchidoclastes promettaient martialement d'assurer le réarmement industriel du pays. Afin, sans doute, d'assurer celui-ci, dernièrement, décision a été prise de nous vêtir de pulls produits en Tunisie. »

 

- « En plus, à quoi vont bien pouvoir nous servir des chandails, en plein réchauffement climatique ? »  


- « C'est pas faux, caporal. Par ailleurs, je sais que vous ne comprenez pas non plus pourquoi nous devons désormais nous coltiner des pétoires teutonnes. »


- « Pour sûr que c'est pas un cadeau, ces flingots, question deutsche qualität, on repassera. »  


- « C'est pas faux, caporal. En moyenne, les fusils de guerre sont HS au bout de vingt ans. Les FAMAS, eux, ont tenu quarante ans. Il était donc plus que temps de les remplacer. »


- « D'accord, mais pourquoi acheter à l'étranger, mon adjudant ? »


- « Il n'existait pas d'autre alternative. »


- « Pourquoi ? »


- « Une bande de monorchodides orchidoclastes, comparables à ceux d'aujourd'hui, a procédé à la privatisation de la totalité de l'industrie française d'armement. Résultat : si la fabrication d'armement lourd subsista, celle des armes légères, comme les fusils, disparut. » 


- « Pourquoi ? »


- « Parce que cela rapporte davantage de fourguer un bon gros canon caesar qu'un fusil. Et cela d'autant plus, que côté fusils, notre armée format bonzaï, ne réprésente pas le marché du siècle. » 


- « D'accord, mais pourquoi, acheter allemand, mon adjudant. » 


- « Non contents d'être privatophiles, notre bande de monorchodides orchidoclastes étaient aussi des germanophiles béats. Ils ne pouvaient laisser passer une aussi belle occasion de faire plaisir à leur kamaraden von Berlin. »  


- « C'est de la collaboration ! » 


- « Non, pas du tout, durant la collaboration, il se passait l'inverse. C'est la France qui livrait de l'armement, des munitions, du matériel militaire, à l'Allemagne. Et toutes ces bonnes marchandises ont servi à tuer des  Alliés, des Résistants et des soldats de France Libre. »   



973 - Samedi 18 mai 2024


Puits de sciences altruiste


Bien que de temps à autre, il était tenté de le croire, en général, il se refusait à penser qu'il fût un demi dieu, voire un dieu à part entière. Nonobstant cet exquis trait de modestie, il devait concéder à la vérité qu'il possédait un certain talent, pour ne pas dire du génie. De plus, il fallait bien qu'il reconnaisse la puissance de son charisme et de son charme, qui provenaient certainement de sa coupe undercut latérale et de ses chemises nanushka marron à carreaux.   



A n'en pas douter, pensait-il,  me rencontrer devait représenter pour mes contemporains la meilleure chose qui puisse leur arriver. Leurs vies s'en trouvaient positivement changées. Ils ne pourraient jamais assez le remercier pour ses bienfaits. C'était sans doute à cause de cela que personne ne m'a jamais gratifié de la moindre marque de reconnaissance, constatait-il.  


Pas plus tard qu'il n'y avait pas longtemps, il avait avisé deux hommes et une femme assis sur un banc du jardin public. Sans préambule et autre forme de procès, il leur demanda leurs prénoms respectifs. Sous le coup de la surprise, les deux premiers répondirent Philippe, Thierry et la troisième, Véronique. 



Philippe, cher ami, dit-il, votre petit nom vient du grec « philos », qui signifie aimer et de « hippos », cheval. Thierry, mon cher, votre nom de baptême correspond à la forme modernisée de Thédoric, qui veut dire chef du peuple. Quant à vous, petite madame, sachez qu'au cours du Chemin de Croix, une jeune femme essuya de son foulard la figure ensanglantée de Jésus. L'image du visage du Messie s'imprima sur le tissu. A la suite de ce miracle, ce précieux voile fut appelé, en grec,        « vera icona », la vraie icône, en français bien de chez nous. « Vera icona » et Véronique, inutile, je pense de vous préciser le lien entre les deux.         


Il salua Philippe, Thierry et Véronique, puis s'en fut d'un pas léger. Et voilà, se félicita-t-il, j'ai apporté la lumière à ces trois pauvres hères plongés dans l'obscurité de leur ignorance. Je suis sûr qu'ils ne s'attendaient pas à recevoir les bouleversantes révélations que je leur ai faites. Ce jour restera à jamais gravé dans leurs mémoires comme celui de l'instant béni où le destin leur a offert l'inéffable cadeau de croiser ma route.   


Les trois pauvres hères plongés dans l'obscurité de leur ignorance l'avaient regardé partir, plus interloqués que le gars trouvant chez lui le roi d'Angleterre en train de repeindre ses toilettes. Pas besoin qu'ils prononcent la moindre parole afin d'exprimer le fond de leur pensée tant il transparaissait dans leurs yeux : mais c'était quoi cet olibrius ?



974 - Dimanche 19 mai 2024



« La poésie immortalise tout ce qu'il y a de meilleur et de plus beau dans le monde » 



Intellectuel distingué et délicat, il s'accordait tout naturellement sur le fait que, tel le parapluie sous l'averse, l'esprit ne prouvait son utilité qu'en  étant ouvert. Aussi, ne se fermait-il jamais aux idées, aux cultures, aux arts, qui lui étaient étrangers. Ainsi, par exemple, un jour, à la fin de son dîner avait-il tenté l'aventure de savourer un morceau de tomme de Cambrai, au lieu de son maroilles habituel. Ce qui montrait à quel point il était capable de dépasser ses limites. 


Dans le même ordre d'idées, il voulut goûter au rap. Son âge, son parcours culturel, l'ayant jusqu'ici maintenu dans l'ignorance de ce genre artistique, il s'informa sur ses spécificités. Selon les sources auxquelles il eut accès et s'il les avait bien comprises, le rap consistait à conter des textes rimés sur un fond musical. Cela lui rappela furieusement les poèmes accompagnés de musique récités par les troubadours du  Moyen-Age.


Pour confirmer cette impression, il entreprit de comparer quelques vers du premier et du plus célèbres des troubadours, Guillaume IX, comte de Poitiers, duc d'Aquitaine et de Gascogne1, avec ceux de différents rappeurs, aux noms si atypiques qu'il ne parvint pas à les retenir.


De Guillaume, lui revint à la mémoire :



Que gagnerez-vous jolie
Dame à me tenir loin de votre âme ?
Sachez donc, tant je vous chéris,
Que je crains dur tourment de larmes
Si vous n'entendez pas mon cri. 

 

De notre amour il va ainsi
Comme une branche d’aubépine
Qui est sur l’arbre et dans la crainte
La nuit au gel ou à la pluie
Mais le matin sous le soleil

Feuille et verdit tout le rameau 


D'amour je ne dois plus dire bien;

Car je n'ai ni peu ni rien,

 plus n'en ai qui me convient

 

Des rapeurs, il découvrit :


Adolescente avec une meute de mâles en rut à repousser, tu sais, c'est inévitable, elle va beaucoup se faire baiser ta fille. 


J'aimerais avoir une belle baignoire, te voir t'y allonger nue, ouvrir lentement ma braguette et puis te... pisser dessus. 


J'la baise complètement dead comme si j'étais nécrophile.  


J'crache dans tes règles, ça fait ketchup-mayo.


Tout soudain, il se sentit en grande nostalgie du Moyen-Age.

 

1: Guillaume IX, comte de Poitiers, duc d'Aquitaine et de Gascogne rédigeait ces poèmes en occitan des XIeme et XIIeme sièles. Comme vous vous en doutez, je pratique cette langue aussi bien que le ch'ti. Aussi, traduire les vers de ce bon Guilhem IX d'Aquitania fut-il pour moi un jeu d'enfant, en toute modestie.



975 - Samedi 25 mai 2024 


Traditions olympiques


- « Monsieur Aristobul Raidebul, vendeur de chewing-gums, de mouchoirs en papier et de maroilles, reconditionnés, originaire du Cateau-Cambrésis, a quitté sa couche à l'aube crevée pour venir céans nous faire partage de bonnes paroles, sages comme bulle papale. Bon, ben, Aristobul, allons-y, sans préambule, bullez, bullez. »


- « Il me ferait grande joie de vous entretenir des jeux olympiques. »


- « Comme il vous siéra, Aristobul, cependant n'en dit-on pas déjà tant et plus sur ce sujet. »


- « Effectivement, pour en dire, il s'en dit, mais il s'en dit surtout force âneries. »


- « Que me baillez-vous là,  Aristobule ? »


- « Je veux d'abord vous servir que c'est grave niaiserie d'accroire que les Grecs anciens n'organisaient de rassemblement atlhétique panhellénique qu'à Olympie. Ils le faisaient également à Corinthe, Némée et Delphes. »


- « Ainsi, Coubertin aurait-il pu tout aussi bien s'inspirer des jeux corinthiens, néméens ou pythiques. » 


- « Effectivement, cela eut été possible. Il vous faut en outre savoir qu'avec les jeux olympiques grecs, il n'était pas question de rencontres sportives, au sens strict du terme. Il s'agissait d'un festival religieux dans le cadre duquel  des ahlêtês mais aussi des poètes, écrivains, chanteurs et musiciens, concouraient en l'honneur de Jupiter. »


- « C'était donc que Jupiter goûtait pareillement aux hauts faits de l'esprit et des arts qu'aux affaires de muscles et de sueur. »


- « Pour autant, il ne se donnait pas honteusement en spectacle dans le  stade, comme d'aucun à qui l'on prête parfois son nom. Autre chose, au cours des mille ans où se tinrent les jeux olympiques antiques, il n'a jamais existé de flamme olympique, pas plus que de torche olympique avec porteurs. »


- « A mon avis, en ce qui me concerne, quant à moi, selon moi, perso, je trouve parfaitement ridicule que dans une start up nation, en plein XXIeme siècle, on en soit encore à se balader avec des torches enflammées, alors qu'il existe, et pour pas cher, d'excellentes lampes de poche à led. »  


- « Ah ! J'allais oublier. durant les jeux olympiques originels, les guerres cessaient et personnes, amis ou ennemis, ne s'en trouvaient exclus.»


- « En résumé, si Théagène de Thasos revenait du fond des âges et voyaient ce que sont devenus les jeux olympiques, il s'exclamerait certainement : mais c'est quoi ce bo..el ! »



976 - Dimanche 26 mai 2024


Top


Moult individus ne montraient d'intérêt si important pour une chose particulière qu'elle en devînt une passion. Représentaient-ils un nombre plus considérable que celui de ceux pour qui, au contraire, elle le devenait ? Il n'en possédait pas la moindre idée. Toutefois, la réponse à cette question le préoccupait peu. En fait, il ne s'en souciait guère. On pouvait même franchement avouer qu'il s'en foutait complètement. Seul lui importait le fait que, lui,  faisait partie des passionnés.


Elle ne consistait pas à faire collection de choses banales, tels des timbres, des tableaux de Picasso, des maroilles, non plus que des pièces extravagantes comme des petits canards jaunes en plastique, de boules de bowling ou des enclumes. Rompu à toutes les disciplines de l'esprit, il se sentait davantage attiré par l'accumulation de choses aptes à satisfaire et enrichir son brillant intellect. Ainsi, lui plaisait-il à amasser les tops 10.


Il en possédait de toutes sortes : top 10 des films les plus vus dans le monde, top 10 des jeux les plus joués au monde, top 10 des aliments riches en magnésium, top 10 des recettes thermomix, top 10 des garnitures de pizza, etc. Le dernier en date concernait les pays ayant gagné le plus de batailles militaires, de 2500 ans avant Jésus Christ à nos jours. Or donc : 


à la dixième place se trouvait la Turquie avec 210 victoires,

à la neuvième place, la Chine avec 244 victoires,

à la huitième place, l'empire romain avec 259 victoires,

à la septième place, la Pologne avec 344 victoires,

à la sixième place, l'Espagne avec 384 victoires, 

à la cinquième place, l'Allemagne avec 425 victoires

à la quatrième place, la Russie avec 491 victoires,

à la troisième place, les Etats-Unis avec 833 victoires,

à la deuxième place, le Royaume-Uni avec 1105 victoires, 

et à la première place, la France avec 1115 victoires1.


Si demain, nous devions livrer une vraie grosse bataille, pensa-t-il, pas sûr que nous ayons les moyens de faire passer le compteur à 1116. 


1: l'espace d'un instant, j'ai eu la tentation de vous faire la mauvaise blague de ne pas vous donner le détail de ce top 10, mais la chose aurait été par trop cruelle. Je sais, je sais, je suis trop bon. Note de Nervien


 

977- Samedi 1 juin 2024


Franco-cambrésien


Père et mère lui avaient appris qu'il était autant de Cambrésis que de France. De cette double allégeance lui venait un goût égal pour la bière de Cambrai et le vin de bourgogne, pour le camembert et le maroilles. Parmi tous les attraits attachés à sa condition de Français, deux lui agréaient particulièrement.  


En premier lieu, il goûtait fort la langue de Molière. Cette inclinaison  ne tenait point au fait qu'elle était langue de littérature, de poésie, de diplomatie, de galanterie, de chevalerie, de courtoisie et d'élégance.  Ce qui la lui faisait aimer venait du premier témoignage de son existence. 


Le document le plus ancien de la langue d'Egypte était un papyrus évoquant la construction de la pyramide de Guizeh, pour la Grèce, il existait le texte de l'Illiade et l'Odyssée, évidemment. Pour le français, la plus vieille attestation de son existence remontait au IXeme siècle. Il   s'agissait de deux très belles lettres d'insultes échangées entre un certain       Crotebert et un certain Frotebert, habitants de Paris, évidemment.    


En second lieu, il appréciait que l'on eut considéré le Français comme  râleur par nature, voire réfractaire, selon certain. Il est heureux qu'il le fut et l'eût été dès l'origine, pensait-il. Il imaginait, qu'un beau jour, aux Eyzies, un grincheux sortit de sa grotte pour balancer colériquement sa massue dans la Vézère, devant ses contemporains médusés. Il dit ensuite à ces derniers : les gars, si ça vous amuse, continuez, ne changez rien, mais moi, la préhistoire, j'en ai marre, alors je me tire, direction l'Antiquité. 


Si ce gars-là n'avait pas rouscaillé et si d'autres ne l'avaient pas imité à travers tous les âges, nous en serions encore à cogner des cailloux l'un contre l'autre pour faire du feu. 



978 - Dimanche 2 juin 2024


Vercingétorix way of life


Bon, il avait fait le tour de la question, l'avait examinée sous toutes les coutures. Maintenant, il possédait une parfaite maitrise du sujet, il pouvait même affirmer qu'il le dominait outrageusement. Dès lors, il ne lui restait plus qu'à poser son diagnostic. Aux vues de sa minutieuse analyse, une seule conclusion s'imposait avec une lumineuse évidence : l'ère moderne dans laquelle il vivait ne lui convenait pas. Pour décrire la chose en termes plus scientifiques, son époque le débectait. 


Bien des choses paraissaient ne plus tourner rond. Il lui semblait que l'on allait de dégradation en dégradation. Il estimait que les piliers soutenant la société depuis des décennies et des décénnies se trouvaient méthodiquement détériorés. Le monde qui l'entourait l'inspirait de moins en moins. Il ne s'y reconnaissait plus, ne s'y estimait plus à sa place, s'y sentait étouffé. Il regrettait le temps d'antan, mais le temps d'antan de longtemps, celui de la Gaule.   


Mais, pas celle des images d'Epinal qui persiste encore trop dans beaucoup trop d'esprits. Il pensait à la véritable Gaule exhumée par les archéologues et historiens. La Gaule productive et prospère, dont la sophostication et le raffinement de la civilisation étaient comparables à ceux de la Grèce Antique. Une Gaule où des routes empierrées reliaient des villes les unes aux autres, permettant un commerce actif, une Gaule moins boisée qu'aujourd'hui car largement défrichée pour les besoins d'une agriculture florissante, notamment ceux des champs de maroilles. 

              

Une Gaule dans laquelle se pratiquait déjà la pose de dents sur pivot. Là, du coup, il se sentit beaucoup moins chaud pour devenir compère d'Astérix et Obélix, parce qu'il avait peur du dentiste.   



Commentaire

Des champs de maroilles, c'est n'importe quoi ! D'abord, le maroilles n'apparait qu'au Xeme siècle. Ensuite, il ne se plante pas dans des champs, puisqu'il pousse sur des arbres.

Ronald McDonald



979 - Samedi  8 juin 2024

 

Deus vult


- « Monsieur Ebregésile Plampers, citoyen de Vertain, fabricant et exportateur de sabots traditionnels en bois de hêtre et bérets basques ignifugés pour danseurs professionnels de bourrée auvergnate, a volonté d'élargir le champs par trop enclos de nos connaissances. Bel et noble  dessein que celui-là, gentil Ebregésile, aussi nous sentirions-nous fort ignominieux de ne point apporter notre soutien à votre cause. Or donc, élargissez, élargissez, largement, Ebregésile. » 


- « De la croisade, je m'en vais vous dire choses qui s'ignorent souvent. » 


- « Euh... Ne feriez-vous pas meilleur profit à discourir sur le maroilles ?  Parce que, avec tout le franc respect et l'honnête affection que je m'honore de  vous vouer, il me semble, Ebregésile, que ces randonnées musclées en Terre Sainte ont déjà bien assez connu et connaissent encore leur content d'études. »


- « Certes, certes, aussi n'est-ce point de ces chevauchées-là dont je me veux vous entretenir. »


- « Faut-il entendre par là qu'il eut existé d'autres croisades que celles parties pour Jérusalem ? » 


- « Si fait, si fait, Nervien. »


- « Par ma foi, j'attends grandement que de vos lumières, vous m'éclaireriez,  Ebregésile. »


- « Souffrez donc que je vous donne connaissance de ce dont je vous dois instruire.» 


- « Je souffre, Ebregésile, instruisez-moi, je vous prie. »


- « Hors les croisades vers les contrées moyennes-orientales, furent lancées des croisades sur le sol de l'Europe elle-même afin d'y combattre des peuples ayant osé demeurer païens. L'an de grâce 1147, en Allemagne, fut lancée celle contre les Wendes. En 1191 et 1202, les Danois partirent faire croisade dans le pays de Finlande. A partir de 1195, se déroula la croisade du Nord qui porta pieuses batailleuses mêlées chez les impies des Pays-Baltes. De 1209 à 1229, les chevaliers du nord de la France menèrent furieuse croisade en Languedoc, contre les vils hérétiques cathares et valdéistes. »


- « Si je comprends bien, lorsque l'on partait à la croisade, on pouvait aussi bien se retrouver à bronzer sur les plages d'Eilat, qu'à avoir à se geler les miches dans la neige du côté de Riga. »  


 

980 - Dimanche 9 juin 2024


Bonne fête maman


Sans que l'on puisse le qualifier de rigoriste, il n'en demeurait pas moins qu'il ne transigeait pas sur certaines choses. Aux premiers rangs de ces dernières se trouvaient le maroilles et les traditions. Si son attachement au maroilles ne nécessitait point d'explication tant il relevait de l'évidence, il n'en allait pas de même concernant les traditions.


Il ne fallait pas accroire qu'il tenait aux traditions par amour du passé. Il estimait que les traditions correspondaient à la part du passé qui vivait toujours. A ce titre, comme tout ce qui vit, elles devaient faire l'objet de respect et de protection. Entre toutes, il montrait une considération particulière pour les fêtes. En dehors de la sienne, il affectionnait notamment celle des mères.


Voilà pourquoi, sans doute, les bas du front qui dénigraient cette célébration au prétexte de son origine pétainiste, l'irritaient. Son exaspération atteignait un tel niveau, qu'il ressentait l'envie de leur botter les fesses si fort, qu'ils eussent été obligés de dégrafer leur col de chemise pour changer de slip. Il pensait son agacement d'autant plus légitime que cette assertion relevait de l'ignorance crasse.  En fait, la fête des mères devait son existence au gouvernement d'Aristide Briand qui la reconnut officiellement le 20 avril 1926. Le régime de Vichy s'en empara pour sa propagande. Après la seconde guerre mondiale, la loi du 24 mai 1950 définit que « la République française rend officiellement hommage chaque année aux mères françaises au cours d'une journée consacrée à la célébration de la  fête des Mères ».    


Par ailleurs, il s'étonnait que la fête des pères n'eut jamais essuyé la moindre critique. Pourtant, elle possédait une genèse purement commerciale. Marcel Quercia, directeur de la société fabricant les briquets Flaminaire, la créa afin de favoriser ses ventes. Contrairement à la fête des mères, à ce jour, la fête des pères n'a pas bénéficié de l'honneur d'une reconnaissance officielle de la République. Comme quoi, se dit-il, il reste encore bien des efforts à effecteur dans le domaine de l'égalité des sexes. 



981- Samedi 15 juin 2024


стратегия


Primus inter pares, le quintal de muscle dont il se trouvait bardé n'avait point été acquis par tristes mastications de biscottes sans sel, mais grâce à grosses joyeuses ripailles de maroilles. Fort en épaules, fort en poitrail, fort en bras, fort en cuisses, jarrets et mollets, un seul mot pouvait le résumer : colossal ! Bien tourné de corps, il l'était aussi d'esprit, d'où sa logique passion pour la carpologie. Tous ne rêvaient que d'être à son image, mais, telle l'inaccessible étoile, ils savaient la chose impossible. Le monde se divisait en deux : d'un côté, les hommes en général et de l'autre, leur adjudant en particulier, si grand, si costaud, si beau. 


- « Garde à vous ! Repos ! Garde à vous ! Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant. »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, comme il peut vous venir l'envie de faire un truc vachement bien, mais en mieux, il m'est venu une furieuse envie de vous parler d'Alexandre Svetchine. »


- « Alexandre Svetchine ? Mon adjudant, il s'agit d'une marque de vodka, non ? »



- « Pas vraiment, on est plutôt sur du général soviétique, né le 17 août 1878, mort à cause du passage devant un peloton d'exécution, le 28 juillet 1938, à la suite d'une condamnation à la peine capitale prononcée par le Collegium militaire de la Cour suprême de l'URSS. » 



- « Mâtin ! Mon adjudant, votre histoire a allumé en moi, ainsi que chez mes petits camarades, la flamme du plus brûlant des intérêts. Cependant, sans aucunement vouloir vous froisser, voir vous offusquer, en dehors de votre louable volonté de satisfaire à notre grand appétit de connaissances, pourquoi souhaitez-vous nous entretenir de ce général slave ? »



- « En fait, plus que l'homme , je me propose de vous faire découvrir sa pensée stratégique. »



- « Oh ! Chouette ! Chouette ! Chouette ! »



- « J'allais le dire. En 1926, Svetchine édite un livre qu'il intitule, en toute simplicité, Stratégie. Ce bouquin comptant 400 pages, vous le lire in extenso et en russe, nous conduirait à rater l'heure du goûter. Aussi, fais-je vous en faire une synthèse en français. »



- « Comme vous avez raison, mon adjudant, parce que le goûter joue le rôle d'intermédiaire entre le dîner et le souper qui sont, en moyenne, pris, à sept heures d'intervalle. Il permet de combler une sensation de faim qui apparaît souvent aux alentours de 16 heures. Il régule ainsi la faim et aide à prévenir la fatigue de l'après-midi en redonnant de l'énergie au corps. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le goûter n'est pas réservé qu'aux enfants et peut même s'avérer un allié de taille pour éviter les fringales du soir. »



- « J'allais le dire. Pour Svetchine chercher à gagner un conflit armé par la destruction rapide des forces adverses implique le risque de subir soi-même d'importantes pertes humaines et matérielles, sans posséder l'assurance d'obtenir le succès escompté. Pour cette raison, il préconisait plutôt la guerre d'attrition. Elle permet de limiter au maximum les pertes et assure la défaite de l'ennemi en causant l'effondrement de ses moyens. Concrètement, il s'agit de procéder à une suite d’opérations limitées, organisées en séquences dont les effets se cumulent. La longue durée qu'implique ce genre de conflit peut entraîner la lassitude, voire l'opposition, de la population civile. Pour éviter ce danger, il faut lui assurer le maintien de ses conditions de vie habituelles. »



- « Pourquoi, vous racontez nous tout cela, maintenant, mon adjudant ? »



- « Pour rien... »




982 - Dimanche 16 juin 2024      


« Ce qui manque avec l'ordinateur, c'est de mâchouiller le bout du crayon »



Que le croquant de base puisse traverser benoîtement l'existence en ne se posant jamais de question, cela le dépassait. Comment concevoir qu'il se trouvât des gens capables de vivre exempt de toute interrogation ? Il savait que de tels êtres ne relevaient pas de la chimère, mais bien d'une effrayante réalité. Il n'en demeurait pas moins qu'admettre cette triste vérité lui demandait un considérable effort intellectuel. 



Cette attitude s'expliquait, sans doute, par le fait qu'il possédait une attitude diamétralement opposée à celle de ces carencés de la curiosité intellectuelle. Par exemple, même si le maroilles représentait pour l'homme moderne un centre d'intérêt légitime et centrale, il ne convenait pas de n'avoir que lui comme seul horizon. Pour sa part, il s'honorait de voir plus loin. Il ne cessait d'observer avec acuité  l'univers et de se demander : pourquoi.


Ainsi, tantôt, s'était-il demandé pourquoi le dessus des stylographes   Bic quatre couleurs comportait une espèce de petite bille ? Ce menu sphérique appendice ne possédait aucune utilité technique et encore moins esthétique. Alors pourquoi, quare, warum, se dit-il en son for intérieur ? Il obtint une réponse après avoir effectué, de longues, périlleuses et complexes, recherches. 



Or donc, cette intrigante petite bille possédait une véritable fonction. Son rôle consistait à se substituer à un doigt. Précisément, celui    qui est normalement utilisé par l'individu souhaitant composer un numéro sur un téléphone fixe, à cadran circulaire rotatif. Cependant, cette explication posait une nouvelle énigme. Comment expliquer la persistance de la présence de cette bille, alors que l'on n'usait plus de téléphone fixe, à cadran circulaire rotatif, depuis belle lurette ? 



983 - Samedi 22 juin 2024  


La vérité est ailleurs, d'accord, mais dans quel endroit ?


Ils avaient honoré de leur présence la brocante de Maroilles avec l'espoir d'y trouver de quoi satisfaire leurs violons d'Ingres, à savoir l'appertophilie, pour l'un, et l'avrilopiscicophilie, pour l'autre. Leurs conjointes légitimes et respectives ne partageant pas leurs passions, pourtant passionnantes, elles n'avaient pas souhaité les accompagner. Tant pis pour elles, elles ne savaient pas ce qu'elles perdaient. 


Tout comme il l'avait fait à l'aller, ils covoiturèrentt pour s'en retourner   dans leurs foyers cambrésiens. Afin de tromper l'ennui du voyage, ils bavardaient, ce qui est mieux que de s'amuser à « je te tiens, tu me tiens par la barbichette », surtout lorsque l'un des deux joueurs conduit.  


- « Thurimbert, en tant spécialiste du sujet, à ton avis, selon toi, pour ce qui te concerne, aux vues de ton intime conviction, sincèrement, pour quelle raison évoque-t-on, aux EtatsUnis, la possibilité d'une reconnaissance officielle de l'origine extraterrestre des OVNI ? »

 

- « Ulzéric, d'où tiens-tu que je sois spécialiste des OVNI ? »


- « Ben, tu es du signe de la balance, comme Fox Mulder. »

  

- « Au risque de te décevoir, malgré cette similitude, je ne possède aucune des compétences de l'agent spécial Mulder. Concernant le sujet des OVNI, je peux même dire que je suis une bille. »


- « Comment cela se peut-il ? Je suis tout ébaubi d'étonnement. Cependant, néanmoins, toutefois, nonobstant, pourtant, tu dois bien posséder un avis. »


- « L'humble néophyte que je suis, vois quatre  explications possibles.

Petit un : il s'agit de détourner l'attention du public des problèmes politico-économico-sociaux du pays.

Petit deux : le complexe militaro-industriel et la NASA pousse à la roue afin d'obtenir une augmentation de leurs crédits.

Petit trois : il faut donner un peu de grain à moudre à une opinion publique de plus en plus pressante.

Petit quatre : les autorités américaines sont en train de préparer les foule  à l'apocalypse, dans le sens grec du terme, c'est-à-dire la révélation, avec 

un grand R.»


- « D'accord, mais comment pourrait-on déterminer qu'elle est la bonne explication ? »  


- « Mon bon et interrogateur Ulzéric, pour répondre je te citerai ce cher  Sherlock Holmes: lorsque vous avez éliminé l'impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité. »



984 - Dimanche 23 juin 2024


Quand le bâtiment va, tout va


Etant parvenu, après un âpre marchandage, à acquérir deux maroilles pour le prix d'une paire, il rentrait chez lui fort satisfait et tout joyeux. En passant devant la future salle des fêtes communale, il s'étonna qu'elle fût encore en chantier. Voilà plus de deux ans que sa construction avait débuté.


Comment comprendre qu'il faille autant de temps pour ériger une  bâtisse, somme toute, modeste. Avec des moyens techniques ô combien moins puissants qu'aujoud'hui, au XVIIIeme siècle, nos ancêtres se montraient beaucoup, beaucoup, plus efficaces. Par exemple, en 1775, le comte d'Artois fit raser et rebâtir son château de Bagatelle en 64 jours seulement !


De plus, à cette époque, les personnes de la haute société savaient s'amuser. La raison des travaux architecturaux entrepris par le comte d'Artois est  que la reine Marie-Antoinette lui avait parié 100 000 livres, soit l'équivalant de 1 128  000 euros, qu'il ne parviendrait pas à effectuer la démolition et la réédification de sa demeure palatiale de Bagatelle, en 100 jours. Et ne croyez pas que le comte d'Artois releva le défi par esprit de lucre, puisque les travaux lui coûtèrent 1 200 000 livres, soit   13 440 000 euros.


Par contre, les gens de peu se montraient aussi étroit d'esprit que ceux d'aujourd'hui. Ils trouvèrent indécent que la reine et ce comte eussent dépensé des sommes aussi faramineuse pour s'amuser, tandis qu'ils laissaient leur peuple crever de faim. Comment les gueux pouvaient-ils se montrer aussi mesquins, s'indigna-t-il.


Commentaires

Question comte d'Artois, je préfère Robert, celui des mes  « Rois maudits ».

Maurice Druon  



986 - Samedi 29 juin 2024  


On veut bien être gentil, mais avec certains, on a du mal 


Il se pensait sincèrement bon garçon. Un gars qui aimait autant le maroilles que lui, ne pouvait être mauvais. Malgré cela, il éprouvait quelques doutes à ce sujet. Ne serais-je point, par certains côtés, d'un tempérament un peu sanguin, se demandait-il ? Personne ne conteste que j'ai la main sur le cœur. Il n'en demeure pas moins vrai que je n'hésite pas à la balancer sur la tronche des fâcheux. En cas d'offense, je ne tends jamais chrétiennement l'autre joue. Dans ce genre de situation, j'applique le principe du œil pour œil et du dentier entier pour une dent. 



Sans compter qu'il suffit que mes contemporains tiennent certains propos pour qu'il me vienne une pressante envie de les massacrer sauvagement. Ceux qui, du haut de leur arrogance, se croient fort instruits, alors qu'ils ne profèrent que clichés et idées reçues, m'irritent tout particulièrement. Si je m'écoutais, je martèlerais volontiers les crânes de ces corniauds, jusqu'à les enfoncer au niveau de leurs nombrils. Je dois, en plus, avouer que j'y prendrais grand plaisir.


Par exemple, rien ne m'insupporte plus que d'entendre les grosses buses qui professent qu'il ne faut pas user du vocable « on », parce que « on » est un c... . Mais, c..., vous-mêmes, bande d'ignares ! Contrairement aux vôtres, les origines de ce mot possèdent une véritable noblesse. Il descend en ligne droite du latin « homo », qui signifie « être humain ».  Cette ascendance explique pourquoi, les verbes utilisés avec « on » s'accordent au singulier, bien que le sens de ce pronom indéfini soit pluriel. Donc, avec tout le respect que je ne leur dois pas, ON conseille aux anti on de se carrer leurs leçons dans un endroit que ma bonne éducation m'interdit de citer nommément.  



987 - Dimanche 30  juin 2024  


« J'ai la mémoire qui flanche, j'me souviens plus très bien » 


Dans les soirées maroilles entre potes, si les demis de bière avaient été des flocons, il aurait certainement été un chasse-neige. Il possédait une contenance comparable à celle d'un pétrolier de haute mer et une endurance au levé de coude à nulle autre pareille. Pour qui ne le connaissait pas, le voir à l'oeuvre faisait douter de la réalité. La vision d'un être avec une telle descente ne pouvait naître que de sens abusés, relevait forcément de l'hallucination, tant individuelle que collective. Ce gars-là buvait comme un trou sans fond.


Cela étant dit, « Un verre, ça va, trois, bonjour les dégâts »,                    « Consommer avec modération », il souscrivait pleinement à ces sages maximes publicito-préventives. Au quotidien, chaque jour que Dieu faisait quotidiennement, il se montrait plus sobre qu'un chameau hydrophobe. Il ne se départissait de cette sainte tempérance qu'à l'occasion de ses viriles maroillesques réunions. Pour lui, convivialité ne rimait pas avec déshydraté.  


Pendant un temps, ces soirées arrosées - le terme « inondées » eut mieux convenu à son cas - lui avait cependant causé une petite contrariété. Le lendemain, il n'en gardait aucun souvenir. Il s'en était ouvert à l'un de ses petits camarades, qui semblait particulièrement bien au fait des effets des boissons alcoolisées sur l'organisme. Il lui avait naguère assuré que hormis la chirose, les maladies cardiovasculaires, les cancers, les hépatopathies, les atteintes au système nerveux central ou périphérique, l'alcool ne présentait aucun danger.

 

Il lui donna l'explication suivante concernant ce problème d'amnésie. L'alcoolisation empêchait parfois le fonctionnement des mécanismes permettant d'engendrer les souvenirs. Ce qui signifiait, qu'en réalité, il n'oubliait rien, puisqu'il n'y avait rien à oublier, étant donné que rien ne s'était imprimé dans sa mémoire. Afin de remercier son petit camarade  pour ses rassurants éclaircissements, il lui offrit un verre et porta un toast à sa santé.



988 - Samedi  6 juillet 2024         


« Le roi doit seigneurier au commun profit du peuple »


Pour lui, ne possédait pas la légitimité de se dire fine gueule, l'homme qui n'appréciait pas le maroilles. De même, n'avait aucun droit de se déclarer personne responsable, l'individu qui ne se mêlait pas de politique. Sur l'échelle de l'évolution, il plaçait ce genre de clampin en dessous de la bouche d'égoût. Qui ne gardait pas à l'oeil les gens ayant charge de diriger le pays, pouvait se retrouver avec d'aucun qui se comportant comme roi sur son trône. Du moins, était-ce ce que ledit d'aucun et ses thuriféraires pensaient. 


Il faut dire, médita-t-il, que notre époque se montrait davantage propice à ceux qui croyaient savoir, plutôt qu'à ceux qui savaient vraiment. Agir en roi ne correspondait nullement à la manière dont en usait le d'aucun en question. Elle ne correspondait en rien aux principes sacrés édictés au Moyen-Age. Le Moyen Age, époque intellectuellement et civilisationellement attardée, si l'on se rangeait à l'irréfutable avis des croyants savoir.



Le roi était tenu de gouverner le peuple avec équité et justice pour qu'il jouît de la paix et de la concorde. Il devait œuvrer afin d'assurer le bien public. Il avait obligation de consulter ses grands vassaux en son conseil et de ne prendre décision qu'àprès mure et bonne délibération. Toute décision avait à se montrer conforme aux termes la règle : « Quod omnes tangit ab omnibus approbari debet » (ce qui concerne tout le monde doit être approuvé par tout le monde ). Le roi était attaché au consensus. Il montrait du respect pour son peuple. Cette attitude transparaissait dans la formule qu'il utilisait lorsqu'il lui adressait un commandement : « chers et bien aimés sujets, vous prions et mandons de ... ». Le roi savait que son plus sûr rempart était l'amour de ses sujets.


Malheureusement, la perfection n'étant pas de ce monde, il arrivait qu'il existât de mauvais souverains. Dans ce cas, les moyenâgeux considéraient qu'il fallait prendre son mal en patience, le temps que Dieu les débarrassât du roi indigne de porter la couronne. La solution ne me paraît pas mauvaise, apprécia-t-il. Mais, aujourd'hui, Dieu a déjà tant et tant à faire, qu'il vaudrait mieux que nous nous chargions nous-même de cette tâche. Ce serait là, pieuse et chrétienne action, non ?




989 - Dimanche 7 juillet 2024  


Bonne nuit les petits


Bien avant que je fusse en âge de me trouver en nécessité d'user de mousse à raser sur mes joues, de pouvoir avoir un comportement tombant sous le coup de l'article R. 3353-1 et d'être capable de me faire une tartine de maroilles tout seul, s'introspectait-il,  je passais déjà avec délice moult temps dans mon lit, je me complaisais avec ravissement aux gros dodos, j'abusais avec délectation la grasse matinée. 


Entendre des professionnelles et professionnels des médias s'extasier que certains de nos gouvernants, ces héros des temps nouveaux, ne dormissent point, ne laisse pas de grandement m'interpeler. Plutôt que se pâmer, lesdites professionnelles et lesdits professionnels des médias eussent dû s'interroger sur cette histoire de gars qui n'éprouvent pas le besoin de fermer l'oeil, parce que...


Parce que demeurer éveillé durant seulement une nuit cause obligatoirement quelques désagréments. Un être, aussi merveilleux soit-il, souffrira obligatoirement de sommolence, connaîtra des sautes d'humeur. Les complications ne s'arrêtent pas là. Passer une nuit blanche correspond à avoir un gramme d'alcool dans le sang, donc entraîne une baisse de la vigilance, mais aussi des capacités physiques et intellectuelles. Plus les nuits sans sommeil s'enchaînent, plus ces désordres s'aggravent. Au bout de trois nuits, le corps s'affaiblit considérablement, ses défenses immunitaires diminuent et le risque d'accident cardiovasculaire apparait.  


Le record du monde du plus long temps d'éveil consécutif fut établi en 1964, dans le cadre d'une expérience scientifique menée par un étudiant américain, du nom de Randy Gardner. Il resta 264 heures, soit 11 nuits, sans dormir. Dès le quatrième jour, il se prit pour un célèbre joueur de football et se mit à discuter avec des panneaux de signalisation. Puis, il devint victime de crises de paranoïa, d'hallucinations, de problèmes de mémoire, de langage, de raisonnement et de jugement. 



Dès lors, se dit-il, quand on se trouve instruit de tous ces fait, il n'y a plus guère à s'étonner que des gourvernants, dramatiquement en manque de sommeil, dirigent le pays de la manière dont ils le font.


990 - Samedi 13 juillet 2024


Une offre qu'ils ne pouvaient pas refuser


- « Monsieur Ursulin Holiwodchewingomme, illustre habitant de Blécourt et ramoneur de tours aéroréfrigérantes pour centrales nucléaires, aspire à prestement exposer en pleine lumière un truc dont il ne m'a rien révélé, mais que je trouve vachement intéressant. Ursulin, sacré coquin, exposez, exposez, sans attendre à demain. »


- « Cher Nervien, sachant quel amateur de maroilles, mais également quel homme de bien et de culture, sommeillent en vous, je gage que l'évocation des conférences de l'Atlantique, Moscou, Yalta, Washington, Cherchell, Casablanca, Québec, du Caire, de Téheran, Bretton Woods, Dumbarton Oaks, Malte, Yalta et San Fransisco, ne peuvent manquer d'éveiller en vous les échos de la seconde guerre mondiale. »  


- « Ursulin, vous gagez bien. »


- « Je m'en trouve fort aise. Laissez-moi, vous posez une autre question, si vous le voulez bien. »


- « Je vous en prie, aquilin Ursulin. »


- « Savez-vous ce qu'il advint le 13 juillet 1943 ? »


- « Un bombardier américain s'est écrasé dans le jardin du presbytère du Plessis, situé sur la commune de Lanester, dans le Morbihan. »


- « Ah, bon ? »


- « Ben, oui »


- « Alors, non, moi, je pensais plutôt à une réunion qui eut lieu en Sicile. »


- « Je n'en jamais ouïe-dire l'existence. »


- « Ne vous battez pas la coulpe pour autant. Il s'agit sans doute de la rencontre la plus secrète du second conflit mondial. Au point, que l'on ne possède pas de certitude sur le lieu de sa tenue. Selon certaines sources, elle se déroula en la città de Villalba, selon d'autres, sur le flagship USS Ancon de l'amiral Hewitt. »


- « Mais de quoi dont est-ce qu'il retournait ? Racontez-moi donc »

 

- « Les protagonistes se nommaient Charles Poletti, Don CalogeroVizzini et Don Genco Russo. » 


- « Je suppose qu'il s'agissait de trois braves pizzaiolos qui souhaitaient   vendre  des quatre saisons et des calzones aux GI. »


- « Pas tout à fait, Charles Poletti, Américain, représentait son gouvernement, Don Genco Russo, Sicilien, était l'un des plus influents parrains de la mafia et Calogero Vizzini, Sicilien itou, était le capo de tutti capi de Sicile. Charles Poletti avait effectué le voyage depuis les Etats-Unis afin de demander à la mafia de prendre le contrôle administratif et politique de la Sicile, en lieu et place des fascistes, et surtout des communistes. Les mafiosi acceptèrent la proposition. Ces gens-là sont toujours prêts à rendre service. Plus tard, Calogero Vizzini fut fait colonel honoraire de l'armée U.S.»


- « Et qu'a pensé Eliot Ness de tout cela ? »



991 - Dimanche 14 juillet 2024


Rayonnement international


Ma lignée, mon lieu de naissance, ma carte d'identité, mes papiers militaires, l'attestent, se disait-il, je suis indéniablement intrinsèquement de France. Pays à qui l'Humanité doit le divin maroilles et le gouleyant Romanée-Conti, mais pas que. Tout au long de son Histoire, la France a apporté au monde tant et tant de choses.  Si nous prenions,  de-ci-de-là, au hasard, quelques échantillons, par exemple, au Moyen Age, voilà ce qu'il pourrait s'en dire, pensa-t-il.


Ce fut au royaume de France que naquit le principe de la loi commune, qui se fondait sur des règles consacrées par de nombreuses générations, au fil du temps. Aussi, tous l'appliquaient naturellement, qu'ils fussent pauvres ou puissants. Quant aux tribunaux sur lesquels reposait aujourd'hui la Justice de tous les pays de la planète, les premiers furent institués par le roi Saint-Louis. Son petit-fils, Philippe le Bel, qui a très bien connu Robert d'Artois, voulut ce qu'aucun souverain étranger n'avait jamais conceptualisé : la primauté du pouvoir de l'Etat sur celui de l'Eglise.   


Les idéaux de chevalerie : loyauté, générosité, dévouement, courage, courtoisie, furent adoptés et propagés par les chevaliers français. Leurs compatriotes intellectuels créèrent le concept de distinction entre la raison et la foi, ouvrant ainsi la voie au développement de la philosophie occidentale et de la pensée moderne. 


Le respect de la liberté, de la dignité, de la reconnaissance des talents, de la femme avec un grand F, un grand E, deux grands M et un dernier grand E, se manifestèrent en premier lieu sur la terre de France, dès le XIeme siècle. On prohiba la polygamie, les unions forcées, la répudiation des épouses, en imposant le mariage monogame irrévocable par consentement mutuel. Même l'adultère ne pouvait être cause de dissolution des épousailles. Les femmes possédèrent le droit de pratiquer n'importe quel métier. Elles devinrent maîtresses d'école, miresses (médecins), chefs de guerre, comme Mahaut d'Artois ou Aliénor d'Aquitaine. Et ces dames ne firent pas marcher au pas des troupes de majorettes, mais des bandes de sombres brutes et de gros soudards.


Aujourd'hui, constatait-il, la France influençait moins qu'elle n'était influencée. Cependant, il gardait l'espoir. Le Français demeurait attaché à sa civilisation millénaire. Certains signes ne trompaient pas. Ainsi, chaque jour, les filles et fils de France consommaient deux million deux cent mille sandwiches jambon-beurre, soit trois fois plus que de kebabs et huit fois plus que de hamburgers.



992 - Samedi 20 juillet 2024


Influenceur


Afin de traduire en acte leur amour pour l'architecture et leur fromage préféré, ils avaient décidé de consacrer leurs samedis et leurs dimanches à l'édification d'une cathédrale gothique en maroilles. Pour l'heure, sous l'oeil consterné de leurs épouses, tant légitimes que respectives, ils répertoriaient leurs communes fins de semaines libres, pour les cinq ans à venir. La tâche se montrant plutôt fastidieuse, charitablement, ils s'accordèrent une petite pause bière.  


- « Fridelien, as-tu remarqué que lors d'une discussion, quelque en soit le sujet, tous mes interlocuteurs se rangent toujours à mon avis ? »    


- « Je te confirme le fait, Glutebergue. »


- « Ne trouves-tu pas cela étonnant ? »


- « Ma foi, non »


- « Ah... Tu penses sans doute qu'il faut simplement y voir les effets de ma   franche sincérité, de mon charisme magnétique, de ma bienveillante personnalité suscitant naturellement l'empathie. »


- « Oui, mais ce n'est pas tout, ce n'est pas tout. » 


- « Evidemment, il faut ajouter à ces remarquables dons, mes invraisemblables facilités à me mettre aisément au niveau de mes       vis-à- vis, à brillamment anticiper leurs objections, à subtilement les convaincre en alliant l'émotion au raisonnement. »


- « Certes, certes, mais je crois également que ton mètre quatre-vingt-dix, ton quintal de muscles, ta carrure d'armoire normande, ton air à vous faire instantanément virer les cheveux au blanc, ne sont pas sans jouer un certain rôle dans ton pouvoir de persuasion, surtout face à un gars bâti comme un cure-dent anémique. » 



993 - Dimanche 21 juillet 2024


Et viva España


Sans aller jusqu'à pouvoir le qualifier de pacifiste bêlant, on devait reconnaître qu'il ne  possédait en lui rien de particulièrement beliqueux.     Hormis une atteinte aux intérêts vitaux de la Nation, tel l'approvisionnement en maroilles, il ne voyait aucune raison légitime de  lancer le pays dans un conflit. Cependant, aujourd'hui la guerre semblait faire partie des idées à la mode. Or, parmi toutes les facettes de sa personnalité son côté victim fashion n'était pas la moindre. Aussi se fit-il  franchement belliciste.  


Pour une bonne guerre, se disait-il, il convenait de se choisir l'ennemi qui va bien et de trouver un joli petit prétexte pour pouvoir lui rentrer dedans en toute innocence. Pour ces raisons, il lui parut évident de penser à l'Espagnol. On l'a souvent oublié, mais, pour si estimable et sympathique qu'il fut, il n'en demeurait pas moins que l'Hispanique nous fut pendant longtemps aussi hostile que l'Anglais. Tant qu'à faire la guerre, autant la faire à des gens avec qui nous avons déjà eu antan le plaisir de nous écharper. Sans compter que les héritiers des glorieux tercios possédaient aussi l'avantage d'habiter un magnifique pays très ensoleillé et en plus près de chez nous.


Quant au prétexte, facile ! Le cassus belli était tout trouvé : la junte de Roncal. En vertu de ce traité, depuis 1375, le 13 juillet de chaque année, les six maires de la vallée française de Barétous devaient remettre à quatre maires de la vallée espagnole de Roncal « trois vaches âgées de deux ans et sans défaut ». Il suffisait de dénoncer à grands cris d'offraies ce pacte inacceptable, odieux, humiliant, inhumain, barbare et antiécologique. Ensuite, ce serait à bon droit que nous pourriions envoyer nos Armées franchir le Pyrénées, afin qu'elles se saisissassent d'autant de bovins femelles qu'il nous en fût extorquées depuis le XIVeme siècle. Olé !


994 - Samedi  27 juillet 2024

 

Cela ne date pas d'hier, mon bon monsieur

 

Bien qu'ils ne connussent pas son âge, ils trouvaient qu'il ne le faisait pas. Si la perfection dépendait d'un gêne, pour eux, il ne faisait aucun doute que son ADN en était blindé. A une conformation physique idéale  et un niveau intellectuel optimal, il alliait la puissance d'une sagesse inspirée. Ainsi, à la délicate question : « peut-on vivre sans ennemis ? », avait-il lumineusement répondu : « Oui, à condition de les avoir au préalable tous butés ». Si le maroilles n'avait pas existé, il en aurait eu l'idée. Quelle divine parole allait-il leur prodiguer aujourd'hui ? 


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, l'homme moderne possède une fâcheuse tendance à croire qu'il a tout inventé. Il pense qu'aux époques antérieures à la sienne, ne vivaient que des populations dont l'existence stagnait dans l'immobilisme d'un archaïsme sclérosant. Au mieux, c'est là une grande erreur, au pire, une blâmable prétention. Tenez, prenons par exemple les SMP. »


- « Les SMP, mon adjudant... Quid hoc est ? »


- « Je te rassure, caporal, contrairement à ce que tu pourrais imaginer, les SMP n'ont rien à voir avec les MST, quoique. Les SMP sont les sociétés militaires privées. »


- « Ah, oui, comme WatchGuard, MPRI ou Academi. »


- « C'est cela même caporal. Pour le commun, la géniale création de ces charmantes entreprises date, à peine, de quelques années, or que nenni point. »


- « Ah, bon …»


- « Ben, oui… Il se trouve qu'au Moyen-Age, en Italie, les condottieres proposaient déjà les services de compagnies militaires privées. »


- «Ah, bon … »


- « Ben, oui… »


- « Faire appel aux condottieres et à leurs hommes présentait cependant quelques inconvénients. »


- « Ah...»


- « Halte, caporal ! Fais-moi plaisir. Tu gardes tous tes ah bon, tu en fais un beau paquet avec un joli nœud rose et tu me le donneras quand j'aurai fini. Je reprends. Ces gens s'ingéniaient à éterniser les conflits, parce qu'ils possédaient un intérêt financier à la prolongation des guerres . Par contre, s'ils ne recevaient plus leur rémunération, ils pliaient bagages et afin compenser leur manque à gagner, ils commettaient pillages et exactions contre les populations civiles. Ils pouvaient également passer à l'ennemi avec armes et bagages, dès lors que celui-ci payait mieux. »


- « En un mot, ils avaient tout du gentil garçon. » 


- « Oui, à tel point, qu'en 1506, Machiavel s'attacha et arriva à persuader la cité de Florence d'avoir recours à une armée de conscription plutôt qu'aux condottieres. »


- « Voulez-vous parler du grand Niccolò di Bernardo dei Machiavel, mon adjudant ? » 


- « Exactement, Machiavel, celui-là même qui insista sur la primauté de l'infanterie dans l'art de la guerre et qui, contrairement à l'idée reçue, fut le moins machiavélique des hommes. Lors de la guerre de la ligue de Cambrai, les conscrits florentins battirent les armées de métier de la France, de l'Espagne, du pape et de la République de Venise. Entre parenthèses, cela montre une fois de plus que, contrairement aux racontars des ignares complètement illéttrés, les Italiens sont hommes de grand courage sachant  se battre, pour peu qu'ils aient une bonne raison de le faire et qu'ils soient bien commandés. »


- « La guerre de la ligue de Cambrai, mon adjudant ? Mais je croyais qu'à  Cambrai on faisait la bêtise, pas la guerre. »

 

   

995 - Dimanche 28 juillet 2024


Gynophile convaincu


Suis-je misogyne ? Assurément, non, s'auto évalua-t-il. La preuve en est que, librement, sans aucune contrainte, en pleine possession de mes facultés mentales et intellectuelles, responsable et conscient de mes actes, majeur et vacciné, j'ai, tant civilement que chrétiennement, uni ma vie à celle d'une personne du sexe opposé au mien.


Même si dans la gent féminine, il n'existait qu'une minorité capable de se passionner au spectacle de vingt-deux bonshommes courant derrière un ballon rond ou de s'émouvoir à l'écoute du chant d'un 12 cylindres en V, il reconnaissait la femme pour l'égale de l'homme. Dans certains domaines, il la pensait même supérieure. Par exemple, lui et tous les mâles de sa connaissance se montraient totalement ignorants aussi bien sur la manière d'user d'un vernis à ongle, que sur l'art de choisir un sac à main. Quant à marcher avec des chaussures à talon aiguille et à tricoter des chaussettes pour l'hiver, mieux ne fallait-il pas y songer.


Cette supériorité expliquait sans doute pourquoi il ne parvenait pas toujours à comprendre dames et demoiselles. En particulier, leur rapport à la mode le dépassait complètement. Son incompréhension se révélait d'autant plus importante que le phénomène transcendait les époques. Ainsi, par exemple, à la Renaissance, chez les élégantes le dernier cri en matière de beauté consistait à posséder de larges pupilles. Pour cette raison, elles prenaient de l'atropine parce cette substance provoque la dilatation de la prunelle de l'oeil.


L'atropine ne doit s'absorber qu'en petites quantités précisément dosées, sinon elle vous fait passer de vie à trépas sans autre forme de procès. La chose étant déjà bien connue à la Renaissance, les femmes de l'époque ne pouvaient l'ignorer. Il faut reconnaître que pour enjoliver leurs yeux, ces filles d'antan ne devaient pas y avoir froid, pensa-t-il.


Commentaire 

Nous devons à cet effet de mode le poétique patronyme donné à la fleur dont était extraite l'atropine. On la baptisa belladone, nom dérivé de l'italien bella donna, qui se traduit par la belle dame.

Mathias de l’Obe 



996 - Samedi 03 août 2024


« Ces bombardes menaient si grand bruit qu’il semblait que Dieu tonnât, avec grand massacre de gens et renversement de chevaux » 


- « Monsieur  Milouin  Milechin est hirudiniculteur profesionnel et escapologiste amateur. Il réside à Crèvecoeur sur l'Escaut,  parce que, hormis l'hirudiculture et l'escapologie, il aime également les écluses. Il brigue céans la possibilité d'étouffer dans l'œuf une image d'Epinal qui, d'après lui, se doit d'être rageusement chiffonnée, violemment déchirée et lourdement piétinée. Mais faites donc, Milouin, mon gamin, étouffez, déchirez et piétinez, autant que vous voudrez. »


- « Des personnes, que je soupçonne de présenter de fortes carences en maroilles, persistent à colporter que chevaliers français chargèrent de manière imbécile, à Crécy, en 1346. »  


- « Quel manque de tact! »


- « J'enrage d'autant plus que je tiens pour certain que ces incompétents sont si ignorants du Moyen Age, qu'ils ne savent même pas en quoi consiste une lance. »


- « Quoi ! Ils ne sont pas au courant qu'il s'agit d'un long bâton avec un bout pointu en fer ? »


- « Non, je parle de la lance qui désignait un groupe composé d'un homme d'arme, d'un cavalier léger, de deux archers, d'un coutilier (soldat équipé d'une arme d'hast ainsi que d'une dague) et de deux valets d'arme. »  


- « Alors du coup, une épée, c'était quoi ? »  


- « Ben, c'était une épée. Bon, revenons à notre sujet. Donc, l'on entend encore dire que la charge des chevaliers français, lors de la bataille de Crécy, a démontré que ces derniers étaient plus bourrins que ceux sur lesquels ils étaient montés. »


- « Comment osent-ils ?! »


- « Ils osent tout et, comme le disait Lino, c'est même à ça qu'on les reconnaît. Non, les chevaliers n'agissent pas de manière idiote ou irréfléchie. Ils constituent l'élite des combattants de leur époque. Leur spécialité, c'est la guerre. Ils y sont formés, entraînés, dès leur plus jeune âge. Ils sont parfaitement capables de juger d'une situation militaire. Aussi, lorsqu'ils chargent à Crécy, ils le font en pleine connaissance de cause. Ils ont parfaitement conscience que les conditions et le terrain leur sont particulièrement défavorables. »


- « Alors pourquoi se lancèrent-ils quand même à l'attaque ? »


- « Premièrement, parce que les liens féodaux les obligent à se mettre au service de l'host du roi pendant quarante jours seulement. Cette durée de mobilisation, fort limitée, les oblige à rechercher des victoires rapides, quels qu'en soient les périls. »


- « Et deuxièmement ? »      


- « Deuxièmement, ils jugent que le risque politique est plus grand que le risque militaire. Il valait mieux s'exposer à une défaite militaire que de laisser croire que les armées anglaises pouvaient ravager le royaume, sans que le roi et ses chevaliers ne réagissent. »


« Comme quoi ces gars-là en avaient plus sous le heaume que ceux qui les déprécient n'en ont sous leurs casquettes. » 



997 - Dimanche 04 août 2024 (4 août 1789, abolition des privilèges)  


Humanité


Ame bien trempée, esprit carré, il refusait la discrimination, récusait la ségrégation. Il ne faisait aucune différence entre les hommes, les  femmes, quelques que soient leurs ethnies, leurs nationalités, leurs religions. Il les considérait tous avec un égal mépris. En dehors des êtres merveilleux dont l'activité se trouvait, de près où de loin, liée aux maroilles, il ne possédait d'estime pour personne. Le jour de la distribution des rations d'empathie, il était certainement parti aux fraises. Il n'éprouvait que dégoût et hostilité à l'égard de son prochain. Il se montrait d'une telle misanthropie que, s'il n'y avait pris garde, il serait allé jusqu'à éprouver de l'aversion pour lui-même.  

  

Rien ne semblait susceptible de pouvoir le faire un jour changer d'attitude. Lorsqu'il posait son regard, aussi avenant qu'un piège à loup, sur l'Humanité, il n'y voyait rien qui puisse l'amener à la considérer d'un d'un œil plus amène. Malgré des millions d'années d'évolution, elle abritait toujours en son sein un sacré nombre de tarés, au mieux idiots, au pire sanguinaires. Et, à sa connaissance, il n'existait pour l'heure aucun indice permettant d'espérer une quelconque amélioration de la situation. 


Si dans la rue, avait-il l'habitude de dire, vous demandez au premier quidam venu de vous citer un geste d'humanité accompli dans la semaine, vous le verrez se gratter la tête d'un air perplexe. Par compte, posez-lui la même question concernant un évènement violent, alors là, il  vous en rapportera plus que nécessaire. Fallait-il encore attendre des millions d'années avant que tous les hommes se comportent enfin en hommes ? 


Son rêve le plus cher était de partir vivre dans un endroit au milieu de nulle part, le plus loin possible de ce monde de fous. Mais cela ne pouvait demeurer qu'un rêve. Il le savait. La réalité froide et cruelle s'imposait à lui dans toute son implacable rudesse. Quelle que fut sa folle envie de le faire, il était impossible de s'installer dans un endroit au milieu de nulle part, parce que jamais il ne pourrait y trouver sa marque de bain moussant préférée. 


998 - Samedi 10 août 2024


Au temps béni du permien trias


Si Certains s'enthousiasmaient follement pour l'ovorajomorphiiphilie ou l'émétoaérosagophilie, pour sa part, il se passionnait pour les événements s'étant déroulés dans son quartier et, accessoirement, dans le reste de la planète. Mais, seuls le captivaient ceux s'étant déroulés à l'époque où le maroilles n'existait pas encore, à savoir les premiers âges de la Terre. Présentement, il s'intéressait aux faits survenus durant le permien trias, soit il y a 252 millions d'années. 


A cette époque, l'Homme n'avait même pas seulement démarrer le début des prémices du commencement de la dégradation de son environnement, pour la bonne et simple raison que ni lui, ni les parcmètres, n'existaient encore. Subséquemment, pensa-t-il, la Terre devait-être alors un charmant coin de paradis. Aussi, quelle ne fut  pas sa surprise en découvrant que cette ère paradisiaque avait pour petit nom La Grande Mort.


Pourquoi, why, por qué, perché, warum, se demanda-t-il ? Il le comprit rapidement. Il y a 252 millions d'années, les pièges sibériens, vaste complexe de zones volcaniques, situées, ô surprise, en Sibérie, entrent tout à trac en éruption. Plus de 3 millions de km3 de lave sont déversées, l'air se retrouve saturé par les émanations de soufre, de nickel et de 14 500 milliards de tonnes de carbone. 


L'effet de serre, engendré par ces masses gigantesques de carbone, entraîne une monstrueuse augmentation de la température. Sur les continents, elle atteint 50° à 60° et 40° dans les mers, les océans. Cela fait perdre à ces dernières et à ces derniers 76% de leur oxygène. Ces hautes températures perdurent pendant plus de 5 millions d'années. Pour autant, la sécheresse ne sévit pas. Les pluies sont même abondantes, mais la présence de soufre dans l'atmosphère les rend acides.


Vu le contexte, l'atmosphère n'est pas vraiment la fête. Le nickel, les pluies acides, empoisonnent mortellement la végétation. La forêt ne retrouvera son état originel que 10 millions d'années plus tard. La raréfaction des végétaux provoque celle des herbivores puis, conséquemment, celle des carnivores. La hausse de la température des mers et océans et leur déperdition en oxygène causent des ravages parmi leur faune et leur flore. Au total, 96 % des espèces animales, autant terrestres que marines, s'éteignent complètement.


La vache, se dit-il, par rapport à celui du permien trias, notre réchauffement climatique, c'est de la petite bière. N'empêche, conclut-il, cette histoire de La Grande Mort a commencé en Sibérie, donc tout ça, c'est la faute des Russes, comme d'habitude !



999 - Dimanche 11 août 2024


 

Rendons au commandement ce qui est au commandement 


Fruit de la perpétuelle volonté de perfection de la Nature, remarquable conclusion de millénaires d'évolution sans faille, il possédait un corps profilé, cuirassé de multiples couches de muscles, il disposait du nec plus ultra des fonctions cérébrales et bénéficiait d'une virilité explosive. Sa perfection le plaçait au sommet de la pyramide des organismes vivants complexes, qu'ils fussent animal ou humain. Ainsi était leur adjudant, tel qu'en lui-même et à nul autre pareil. Une fois de plus, ils l'attendaient avec impatience. 


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, vous n'ignorez pas que, outre sa fonction militaire, notre institution peut également s'honorer de... »


- « Bien savoir choisir les maroilles, mon adjudant ? »


- « Oui, bien sûr, caporal, mais ici, en l'occurrence, je pensais plutôt à son rôle culturel et en particulier dans le domaine linguistique. »


- « Ah, je vois. »


- « Je ne vous ferai pas l'offense de vouloir vous apprendre ce que vous connaissez déjà. Je vous sais au fait de toutes nos expressions qui sont devenues communes dans le civil. Je citerai quelques exemples pour mémoire : battre la chamade, faire long feu, tirer à boulets rouges, faire le mariolle, aller au casse-pipe, se faire limoger, monter au créneau, faire les 400 coups, mort aux vaches vieux de la vieille, à brûle-pourpoint, tonnerre de Brest. »


- « On est trop fort, mon adjudant ! »


- « Effectivement, cependant le but de mon intervention ne consistait pas en une démonstration d'autosatisfaction, au demeurant justifiée, mais à  m'élever contre certains qui nous contestent la paternité d'une de ces expressions. » 


- « Ah, les gueux ! »


- « Je ne vous le fais pas dire. Donc ces espèces de dégoutants prétendent que : au temps pour moi, serait issu du langage musical. Aberration, absurdité, contresens, énormité, incohérence, incongruité, ineptie ! L'origine de cette expression se trouve dans le commandement : au temps ! Celui-ci s'adressait aux soldats n'exécutait pas correctement un mouvement. Au temps ! leur indiquait de reprendre le mouvement au temps, au temps signifiant : du début. » 


- « Mais, bien sûr, mon adjudant ! La chose semble tellement évidente ! Même militaire, la musique n'a rien à voir dans tout cela. »



1000 - Samedi 17 août 2024


Pas c... le gars


Il se refusait à demeurer replié sur lui-même, à se préoccuper uniquement de sa petite vie, à se contenter d'une vision étriquée du monde. Il mettait un point d'honneur à s'intéresser aux belles controverses, aux grands débats, contemporains et planétaires. Il les suivait scrupuleusement et parfois s'irritait de leur développement.


Justement, il se trouvait dans cet état d'esprit à propos d'une polémique d'une brûlante actualité : ainsi que le prétendait William King, fallait-il croire que les pensées et les désirs qui habitaient l'homme de Néanderthal n’ont jamais dépassé ceux d’une brute, ou devait-on le considérer doué d'une véritable intelligence.


Pour certains, bien que Néantherdal n'ait pas inventé le Maroilles, la seconde hypothèse se révélait la plus plausible. Néanderthal produisait des armes et des outils comparables à ceux d'Homo sapiens. Il a inventé une colle permettant d'assembler des poignées en bois avec des éléments en pierre. Il fabriquait des colliers, des cordes. Il savait faire du feu et cuire ses aliments. Il s'adonnait à des pratiques rituelles et spirituelles, notamment l'inhumation de ses défunts. Il a dessiné des images abstraites dans des grottes. Il possédait les capacités physiques et cérébrales permettant l'usage du langage.


Tout ceci, admettait-il, montre effectivement que ce brave Néanderthal n'entrait pas dans la catégorie des individus primitifs, hirsutes, frustes et grossiers. Mais, pensait-il, il était inutile d'établir ce catalogue de  compétences afin de s'en convaincre. Il existait une preuve qui, à elle seule, prouvait la grande intelligence des Néantherdaliens. Ils ont préféré choisir des lieux de résidences sympas, comme le nord de la France, le Périgord, le sud de l'Espagne, plutôt que d'aller s'installer dans la région parisienne. 



001 - Dimanche 18 août 2024


Niech żyje Polska

- « Monsieur Chéribert Cherbourcy, stéganographe psychocriminologue à temps partiel, réside avec son épouse, son chien et son ficus elastica sur les bords du canal du Nord, à Sauchy Gauchy. Il compte bien réduire en cendre certaines idées reçues plus pourries que l'haleine d'un gars ayant mangé du pneu brûlé. Consommer du pneu brûlé plutôt que du maroilles, franchement, ça me dépasse ! Bon, passons et revenons-en à notre sujet. Allons, cher Chéribert, réduisez, réduisez, sans tarder. » 

- « Pour certains, premièrement, il est acquis que les Polonais vivent en permanence avec une alcoolémie à rendre neurasthénique un éthylotest et, deuxièmement, qu'en 1939 les Allemands les ont envahis sans même sortir les mains de leurs poches. Je passerai sur la fadaise crasse de la soûlographie pour vous parler directement de la guerre. »


- « Pardonnez-moi de vous interrompre, cher Chéribert. J'aimerais vous confier une expérience personnelle. Je sais des Français, Français de père en fils depuis l'époque où on a commencé d'être Français de père en fils, qui se jettent derrière la cravate de quoi rendre n'importe quel honnête citoyen cliniquement mort. »  

  

- « Eh bien, merci pour ce partage, pieux Nervien. Concernant mon propos, laissez-moi, si vous le voulez bien, vous poser une question. »  


- « Je veux bien vous laisser me poser une question. »


- « Les Allemands en ont terminé avec la Pologne le 06 octobre 1939. Alors, pourquoi n'attaquent-ils pas la France dans la foulée et attendent jusqu'au 10 mai 1940 pour le faire ? »


- « Parce que, comme le chantait monsieur Aznavour, ils aimaient Paris au mois de mai ? »


- « Que non point, mélophile Nervien. Les Polonais les ayant méchamment secouées, les hordes germaniques ont eu besoin de tout ce temps pour se refaire une santé. En un mois et cinq jours de combat, leurs pertes en Pologne se sont élevées à 16 343 morts, 3 500 disparus, 32 000 blessés et 832 chars. »


- « Donc, les Allemands se sont bien fait voler dans les plumes et en ont laissées pas mal.»


- « Pour vous donner une idée de ce à quoi les Allemands ont été confrontés, je prendrai l'exemple de la bataille de Wizna, également appelée la bataille des Thermopyles polonaises. Pendant trois jours, du 7 au 10 septembre 1939, 720 soldats polonais tiennent la fortification de  Wizna, face à 42 000 fantassins allemands, soutenus par 350 chars, 650 pièces d'artillerie et la luftwaffe. Au total, 650 Polonais sacrifièrent leurs vie. Le  commandant de la garnison, Władysław Raginis préféra se donner la mort plutôt que de se rendre. Pour leur part, les Allemands comptèrent 1500 tués. »


- « En résumé et en alexandrin, on peut dire que : les teutons ont pris de beaux et sérieux gnons. » 


Commentaire

Je me permettrai de préciser que Sobieski n'est pas seulement le nom d'une vodka, mais aussi et surtout celui du roi de Pologne qui en chargeant à la tête de ses hussards, en 1683, sauva Vienne des Ottomans et les empêcha d'envahir l'ouest de l'Europe.

Chopin



1002 - Samedi 24 août 2024


Je m'ai trompé


Homme de son temps, jouissant de l'estime de ses voisins et de son dentiste, il n'éprouvait pas spécialement de nostalgie pour les temps anciens. Cependant, malgré ce très bel état d'esprit résolument contemporain, nombre de choses du monde moderne ne le comblaient guère de satisfaction. 


Parmi celles-ci, en première place, se trouvait les autorités responsables qui n'informaient pas suffisamment les populations sur le fait que le maroilles représentait une jolie source de calcium, de minéraux essentiels pour la santé osseuse, la coagulation sanguine et la contraction musculaire. Ensuite, l'idée voulant que l'innovation soit indissociable de la notion de réussite le défrisait au plus haut point, bien qu'il ait le cheveu raide.


Croire que l'origine de toute création est obligatoirement le résultat d'une réussite, ne laissait pas de le plonger dans un ébahissement consterné.  Il suffisait de regarder la réalité en face pour constater qu'il en allait tout autrement. L'Histoire regorgeait de cas démontrant que moult découvertes, inventions, évolutions, devaient leur existence à un couac. 


Il pensait par exemple à l'Histoire du chef cuisinier Jean François Collinet.  En 1837, il rata une émulsion d'échalote. Il chercha à rattraper sa préparation en y incorporant un jaune d'oeuf. Sa tentative échoua, mais de ce loupé naquit une nouvelle sauce. Comme, il officiait au restaurant du Pavillon Henri IV, à Saint-Germain-en-Laye, il appela cette dernière, béarnaise. Le cardiostimulateur, la supercolle, le pare-brise, font également partie de la très longue liste des choses créées par erreur.

 

Entre celui qui se montre toujours efficace et celui à qui il arrive de se tromper, le plus performant n'est pas forcément celui que l'on croit, pnsa-t-il.  


Commentaire

Est-il utile de rappeler ici que la bêtise de Cambrai doit aussi son existence à un sacré beau ratage ? 

Emile Afchain 



1003 - Dimanche 25 août 2024


C' est quoi le rapport ?


Ils s'étaient acquittés de leur mission. Ils devaient quérir chez le teinturier les chemises portant l'écusson de l'Amicale des Amateurs Professionnels de Maroilles, association à laquelle ils s'enorgueillissaient d'appartenir. Ils marchaient d'un bon pas pour amener cette cargaison de liquettes au siège de leur confrérie. Ce faisant, ils passèrent devant une bijouterie. Cela amena l'un des deux porteurs d'articles de chemiserie à poser une question. 


- « Métromore, connais-tu le rapport existant entre toutes les bijouteries et  les zones côtières des Alpes-Maritimes, du Var, de l’Aude, des Pyrénées-Orientales et de Haute-Corse ? »


- « Mnèsippos, figure-toi que je l'ignore tout aussi parfaitement que je ne sais à quoi correspond la pyramide de Maslow. »


- « Dans ce cas, laisse-moi donc éclairer ta lanterne qui me semble plus obscurcie qu'un pare-brise d'une Willys MB ayant traversé à toute allure une mare de boue. »

 

- « Alors, tu vas m'expliquer la pyramide de maslow ? » 


- « Non, là, tu feras comme tout le monde, tu chercheras sur internet. En revanche, je te donne de bonne grâce la réponse à ma devinette. Il s'agit du c    aroubier qui, dans l'Hexagone, ne se trouve que dans les régions que je t'ai citées. »


- « Tu m'en vois positivement ravi pour lui. Mais quel lien existe-t-il entre  les joailliers et ce... caroubier ? »


- « Les graines de son fruit : la caroube, elles possèdent l'extraordinaire propriété de toute faire le même poids.»


- « Et cela épate davantage la corporation des bijoutiers que les autres corps de métiers ? »


- « Je t'avoue humblement que je n'en ai pas la moindre idée. En tout cas,  durant l'Antiquité, les marchands grecs de pierres précieuses connaissaient la particularité pondérale des graines de caroube. C'est pourquoi, ils les utilisaient comme poids afin de peser leur marchandise. »


« Mais, aujourd'hui, que je sache, les bijoutiers n'usent plus de ce procédé . »


- « Tu saches bien,  Métromore. Tu sais également, qu'ils parlent en carat et non en gramme. Et c'est là que je voulais en venir. Le terme de carat est un mot dérivé du grec ancien qui signifie caroubier. »


- « Sinon, dans le temps, qu'est-ce qu'on pesait comme trucs avec les betteraves ? »  



1004 - Samedi 31 août 2024


Conte de fée


Soyons résolument objectifs. Regardons bravement la vérité en face. Si l'on voulait se montrer d'une honnêteté sans concession, il fallait reconnaître que le tableau d'ensemble renvoyait une image bien peu flatteuse. Sans aller jusqu'à dire qu'il effrayait les enfants et qu'ils lui jetaient des parpaings, ses qualités esthétiques n'étaient pas évidentes. Personne ne pouvait le prendre pour un adonis, ni même pour un bellâtre de troisième catégorie. Banal, voilà le qualificatif qui, de la tête aux pieds, correspondait le mieux à son académie,


Tout comme son physique, sa personnalité ne soulevait pas l'enthousiasme des foules. Sa compagnie se révélait d'un ennui mortel. Même le plus compatissant des êtres préférerait passer ses vacances avec un maroilles rassis plutôt qu'avec lui. Sa conversation n'inspirait à chacun qu'une seule réplique, que les règles de la courtoisie et une bonne éducation empêchait cependant de prononcer : il vaut mieux se taire que de parler pour ne rien dire.


Hier, alors qu'il passait pédestrement près de la mare d'une pâture, une mignonne grenouille sauta d'un bond olympique sur son épaule. Bien entendu, il en éprouva une forte surprise, qui le devint bien plus encore quand il entendit cette charmante petite bête s'adresser à lui :  


« Gentil jeune homme, lui raconta-t-elle d'une voix mélodieuse, j'ai été la malheureuse victime d'un mauvais sort jeté par une méchante sorcière. Si vous me donnez un baiser, non seulement je redeviendrai, sur le champ, l'adorable princesse d'une extrême beauté et douceur que j'étais naguère, mais également vous vous transformerez en un délicieux prince charmant très riche et nous nous nous marierons, aurons beaucoup d'enfants et vivrons follement heureux.»  

  

Il saisit délicatement la petite grenouille et la mit dans sa poche, en bougonant:


« Bon, d'accord, une princesse c'est sympa, mais moi, je préfère et je trouve plus rigolo d'avoir une grenouille qui parle. »


Ah, oui... J'allais oublier. En plus, il était complètement c...



 

1005 - Dimanche 01 septembre2024



La politique est affaire de gens sérieux



Le personnel politique contemporain ne lui inspirait pas un fol sentiment d'empathie. Parmi ses membres, peu trouvaient grâce à ses yeux. Au tact et au politiquement correct, il préférait de beaucoup le franc-parler et les formules langagières sans fard. Aussi, usait-il de propos plutôt musclés lorsqu'il exprimait son opinion sur les politiciens. Il accordait à la plupart d'entre eux le niveau intellectuel d'une chambre à air crevée et un sens moral en dessous de celui d'un détrousseur de cadavres. Il montrait plus de respect pour les hyènes que pour ces individus-là. 


Il se montrait d'autant plus sévère dans son jugement qu'il savait des temps où  il exista des hommes politiques digne de respect. Par exemple, durant Révolution, il en était qui possédaient de vrais idéaux et ils les portèrent si haut qu'ils les défendirent jusqu'à sacrifier leur vie sous le couperet de la guillotine. Aujourd'hui, à la simple idée de perdre leur places, les élus et autres gouvernements sont prêts à toutes les compromissions.    


Pour lui, le dernier politicien digne de ce nom s'appelait Samuel Ferdinand Lop. Il se présenta aux élections présidentielles, sous la IVeme

République, de 1948 à 1958. Ne disposant pas des ressources pécuniaires nécessaires aux campagnes électorales d'ampleur, il prononçait des discours boulevard Saint-Michel ou rue Soufflot, à Paris. Il tenait également des réunions à La Taverne du Panthéon, dans une salle qu'il avait baptisée de son nom : la salle Lop. Il proposait un programme social, féministe et pragmatique, dont les mesures phares étaient :


- l'extinction du paupérisme après 22h00,

- le prolongement de la rade de Brest jusqu’à Montmartre et l'extension du boulevard Saint-Michel jusqu’à la mer, (dans les deux sens),

- pour les femmes enceintes, le passage de la grossesse de neuf à sept mois,

- l'octroi d'une pension à la veuve du Soldat Inconnu,

la suppression du wagon de queue dans les rames de métro.




1006 - Samedi 07 septembre2024


Pollice


- « Arctos Sautepiquet fabrique, avec son épouse, sur les bords du lac des Trois Saumons, à Saint Aubert, des barges de débarquement, type LCVP. Régulièrement, il recrache d'indignation son maroilles à cause de ce qui est peut-être un détail pour vous, mais qui pour lui veut dire beaucoup. Ne pouvant supporter de gâcher plus longtemps son maroilles et ses plus belles années, il entend frapper un grand coup pour remettre les horloges à l'heure et l'église au milieu du village. Allez, Arctos, frappez, frappez, comme vous l'entendez. »


- « Depuis quelque temps, le péplum et ses traditonnels combats de gladiateurs reviennent sur le devant de la scène. Pour la réalisation, les effets spéciaux et même, occasionnellement, les scénarios, le genre a connu de notables améliorations. Par contre, on ne peut en dire autant concernant la perpétuation de fâcheuses âneries. »


- « Mon bon Arctos, nous devons la remise au goût du jour des œuvres cinématographiques antiquisantes aux cinéastes américains. Nous ne pouvons honnêtement leur demander de posséder une meilleure connaissance de l'Histoire romaine que nous n'en avons de celle de la guerre américano-mexicaine de 1846 -1848. » 


- « Je les mets d'autant moins en cause que le réalisateur auquel je pense est d'origine anglaise. »


- « Alors, comme aurait dit Lucius Quinctius Cincinnatus : mea culpa,  Arctos. Sinon,  quid de la remise à l'heure des horloges et de l'église au milieu du village ? »


- « Eh, bien, tout d'abord, jamais, au grand jamais, vous m'entendez, les gladiateurs ne combattirent de bêtes féroces. Ils se maravaient uniquement entre eux. »


- « Les Romains pensaient que homo homini lupus, mais sans doute pas qu' homo devait être un lupus pour animalis. »


- « Je ne saurais vous dire. Faudrait leur demander. En revanche et ensuite, je sais qu'ils ne mettaient nullement le pouce vers le haut pour sauver un gladiateur, pas plus qu'ils ne le mettaient vers le bas pour le condamner à mort.»


- « Ah bon, ils utilisaient un buzzer ? »


- « Buzzer vous-même, espèce de malhonnête ! Pour demander qu'un gladiateur vaincu soit épargné, ils levaient simplement le poing. Parfois, ils agitaient en l'air des serviettes blanches. S'ils voulaient le faire passer ad patres, ils pointaient le poing vers le concerné, avec le pouce tendu à l'horizontal et non vers le bas. »


- « Je crois qu'un chanteur populaire a remis à l'honneur la pratique de faire tourner des serviettes, mais pour d'autres raisons, me semble-t-il. »



1007 - Dimanche 08 septembre 2024


Tatouage anti chats à neuf  queues


Il n'y avait pas de quoi écrire une lettre aux parents, cependant les gens tatoués le mettaient mal à l'aise. L'origine de cette indisposition ne résidait pas dans une quelconque méfiance à l'égard de ces personnes.  Autrefois, le tatouage possédait une mauvaise réputation. L'opinion populaire le considérait réservé à ceux alors qualifiés de mauvais garçons. C'était l'époque où Fernandel chantait : « Je suis un dur, un vrai, un tatoué », et Edith Piaf : « Mon légionnaire, son cou portait pas vu, pas pris. Sur son cœur, on lisait personne, sur son bras droit un mot, raisonne ». 


Aujourd'hui ce préjugé n'existait plus guère. D'ailleurs, de nos jours, un Français sur dix était tatoué. Ce qui l'indisposait ne venait pas non plus du fait qu'il s'agissait d'un phénomène de mode. Par contre, il s'en étonnait. La mode se définissait  principalement par son caractère éphémère. Par exemple, le col pelle à tarte, le pantalon à pattes d'éléphant, le pin's, la perruque poudrée, n'ont point duré ad vitam æternam, alors qu'un tatouage... Non, les tatouages l'incommodaient      parce que leur vision réveillait en lui le souvenir de celles et ceux qui furent forcés d'en porter.


En premier lieu, il pensait aux victimes des camps nazis, que les SS tatouèrent d'un numéro comme on l'eut fait d'animaux. Et puis, il songeait également aux marins du XVIIIeme siècle. Ils avaient souvent    dans le dos un tatouage représentant une grande croix chrétienne. Ils ne sacrifiaient pas à une mode, pas plus qu'ils ne souhaitaient manifester leur foi d'une manière ostentatoire. Sous peine de lourdes sanctions, une loi interdisait toute détérioration des représentations religieuses. Les coups de fouets possèdent l'intéressante propriété de lacérer les chairs. Appliquer ce supplice, au porteur d'une croix tatouée, eût forcément entrainé la sanglante dégradation de cette dernière. Dès lors, le fouetteur et son chef eussent automatiquement encouru les foudres de la loi. Donc, pour les marins, ce tatouage représentait simplement le moyen d'interdire qu'on les fouettât.  


En ce qui le concernait, si un jour, il devait porter un tatouage, ce qu'à Dieu ne plaise, il demanderait à ce qu'on lui tatouât un maroilles.



1008 - Samedi 14 septembre 2024


Oh, la boulette


Antan, l'enfant, qu'il était, laissait déjà deviner le magnifique gaillard qu'il allait devenir plus tard. Ses prédispositions naturelles alliées à sa volonté intransigeante de perfection, lui avaient forgé ce corps, cette âme incomparables, que tous admirent. Ses hommes, mais également le loup, le renard et la belette, le joli coquelicot, la claire fontaine, le petit caillou sur le chemin, le maroilles goûtu, à sa vue, s'émeuvent et se taisent. Rien ni personne ne peuvent se comparer à leur adjudant.


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, à notre époque moderne, à chaque question, chaque problème, chaque situation, il se trouve un expert pour nous éclairer et nous donner un avis auquel il faut se conformer. Je vous avouerai que je considère le principe avec une certaine circonspection. »


- « Sous-entendriez-vous, mon adjudant, que certains experts ne le sont pas autant qu'ils le disent ? » 


- « Caporal, tu interprètes parfaitement le fond de ma pensée. Néanmoins, je la préciserai en ajoutant que même les véritables experts ne se trouvent pas à l'abri de l'aléatoire. »


- « Sans vouloir vous commander et si vous en ressentez une furieuse envie, auriez-vous un exemple concret à nous soumettre, mon adjudant ? »


- « Caporal, j'ai. Le physicien soviétique Piotr Oufimtsev étudiait, entre  autres, la manière dont les ondes radio rebondissaient sur les objets bidimensionnels et tridimensionnels. Lorsqu'il présenta les résultats de ses recherches aux experts de son pays, ceux-ci ne leur trouvèrent que peu d'intérêt et d'importance. Aussi, autorisèrent-ils leur libre publication à l'international. Ce qui fut fait en 1962, dans un article intitulé : Method of edge waves in the physical theory of diffraction. » 


- « Pardonnez-moi de vous demander de m'excuser, mon adjudant, mais nous ne voyons pas trop où se trouve le problème. »


- « Je te pardonne de me demander de t'excuser, caporal. Eh bien, la valeur du travail d'Oufimtsev ne fut reconnu qu'en 1970. »  


- « Comme le disait ma Grand-Mère, mon adjudant, il n'est jamais trop tard pour bien faire. »  


- « Ta Mémé était une grande philosophe, caporal. L'histoire d'Oufimtsev prendra toute sa saveur lorsque vous saurez que les gens qui ont mis autant de temps pour comprendre les énormes possibilités offertes par ses travaux, étaient des ingénieurs américains de chez Lockheed. Ils leur permirent de développer les outils théoriques qui servirent de fondement à la conception des avions furtifs, comme le Lockheed F-117 et le B2. »


- « Mince ! Il y a dû avoir du remontage de bretelles du côté de Moscou, mon adjudant. »  


- « Probablement, caporal, cependant ne nous méprenons pas sur les Russes. A cet égard, je citerai le prince Charles Maurice de Talleyrand-Périgord, ministre des Affaires étrangères, dont la brillante intelligence politique n'eut d'égale que son extraordinaire faculté à retourner sa veste. Ce fin diplomate dit un jour : Je connais mille façons pour faire sortir l'ours russe de sa tanière, mais aucune pour l'y faire entrer. Messieurs, je vous invite à méditer ces paroles. »



 

008 - Dimanche 15 septembre 2024


Plus fort que le Da Vinci Code


Ne pensez-vous pas cher ami, lui avait-on demandé, que nous vivons entourés de codes ésotériques. C'est pas faux, répondit-il, en espérant que son interlocutrice ne sût rien des astuces réthoriques des seigneurs Karadoc et Perceval. Cette conversation promettant de l'entraîner sur une pente dangeureusement glissante, sans autre forme de procès, il se dirigea résolument vers le buffet et ses petit fours au maroilles .


De retour chez lui, afin de ne pas mourir idiot, il ne se rendit pas sur internet, mais se plongea dans son Petit Larousse, afin d'y chercher la définition de code ésotérique. Son Grand-Père lui avait donné ce dictionnaire le jour où il était entré au cours préparatoire. Son aïeul   l'avait lui-même reçu à l'occasion de l'obtention de son Certificat d'Etudes, en 1951. Voilà pourquoi il tenait tant à ce dictionnaire et se faisait un devoir de l'utiliser. Or donc, par code ésotérique, il fallait entendre un code compréhensible uniquement par les initiés. 


Fort de cette information, il se mit en quête d'un de ces fichus codes ésotériques. Ainsi, il pourrait en mettre plein la vue à la première ou au premier qui aborderaient ce sujet. Il mena une enquête aussi serrée qu'acharnée. Il en bava plus qu'à son tour, mais il finit par en découvrir un, dissimulé dans... un Petit Beurre de chez LU. Les quatre coins de ce biscuit représentent les quatre saisons. Ses cinquante-deux dents, coins compris, correspondent aux cinquante-deux semaines de l'année. Les paquets contiennent vingt-quatre gâteaux et chacun de ces derniers comportent vingt-quatre trous, comme les vingt-quatre heures de la journée. Maintenant, qu'il savait cela, il avait décidé de s'attaquer aux biscottes et au pain de mie.



1009 - Samedi 21 septembre 2024


Si c'est lui qui le dit 


Il n'en revenait tellement pas qu'il se frotta les yeux et se pinça pour s'assurer que ses sens ne l'abusaient pas. Kharippos, dont la montre ne lui servait qu'à lire l'heure à laquelle il arrivait en retard, se présentait en avance sur l'horaire d'ouverture de l'assemblée générale de l'ARCOM (Autorité de Régulation des Confréries du Maroilles). Kharippos devenu  un parangon de ponctualité, il s'agissait là d'une révolution dépassant en importance celle de l'invention de la cabine de bain individuelle  portative. Après les quelques instants qu'il lui fallut pour revenir de sa surprise, il demanda. 


- « Mais... Mais, que t'arrive-t-il, Kharippos. Aurais-tu été happé par une distorsion du continuum spatiotemporel ? »


- « Alectryon, ne plaisante pas, je t'en prie. Je devais te parler au plus tôt. Connais-tu l'université de Stanford ? »


- « Mouais... Elle se place parmi les trois premiers établissements  universitaires des Etats-Unis. Elle se trouve dans la Silicon Valley. Je connais également ses découvertes majeures dans sur les supernovas, dans le domaine de l'informatique, de l'intelligence artificielle, de la biotechnologie et des énergies renouvelables. Cela étant, je ne vois rien là-dedans qui puisse motiver que tu aies à me voir de toute urgence. »


- « Attends, tu vas comprendre. Garry P. Nolan, immunologiste, auteur de plus de trois cents articles scientifiques, détenteur de quarante brevets, cofondateur de huit entreprises de biotechnologie, est titulaire d'une chaire de professeur au département de pathologie de la faculté de médecine de cette prestigieuse université. On peut donc, sans se tromper, considérer ce type comme ne faisant pas partie du genre débiteur d'inepties farfelues. » 


- « Le contraire m'étonnerait effectivement beaucoup. Pour autant, je ne comprends toujours pas ton besoin de te pointer ici en quatrième vitesse pour  me causer  ? »


- « C'est que, écoute-moi bien, ce gars a officiellement déclaré qu'il était convaincu que les extraterrestres avaient déjà visité la Terre et il pense qu'ils pourraient vivre parmi nous. Tu te rends compte ! Cela signifie qu'il est probable que des entités de Proxima Centauri B possèdent leurs cartes de membres de notre confrérie et viennent assister à notre convention. D'ailleurs, toi, qu'est-ce qui me prouve que tu sois vraiment originaire de Cambrai ? »


1010 - Dimanche 22 septembre 2024


La vie n'est pas le travail : travailler sans cesse rend fou

Charles de Gaulle


Messieurs Kharippos Carpintier et Alectryon Dugardin1 avaient éveillé en lui un nouvel intérêt pour l'université de Stanford. Jusqu'ici, ce qu'il savait de cet établissement universitaire américain, se limitaient au fait qu'un certain professeur Matthews y enseignait, ou y avait enseigné, la physique. Il avait eu connaissance de l'existence cet éminent et savant personnage en suivant la brillante conférence sur la physique quantique, donnée par l'excellent maître Alexandre Astier.


Outre lui permettre d'avoir un aperçu exhaustif des activités de cette université, les recherches qu'il mena lui fournirent deux sujets d'étonnement. Le premier survint lorsqu'il découvrit, qu'à l'entrée du campus, on pouvait voir l'un des neuf exemplaires des Bourgeois de Calais d'Auguste Rodin, dont l'original se trouve, comme il se doit, à Calais. Il apprit également que Stanford possédait la plus grande collection de sculptures de Rodin, après celle de Paris. Sa seconde raison d'ébaubissement fut qu'il n'existait aucune unité d'études consacrée au maroilles.


Parmi toutes les recherches menées par les chercheurs stanfordiens, il fut particulièrement enthousiasmé par les conclusions de celles s'intéressant au travail. Ces dernières démontraient que plus les journées sont courtes, plus le travailleur est efficace. Une journée de 8 heures se révèle moins productive qu’une journée de 7 heures, notamment parce qu’elle comprend plus de temps morts et que la motivation et l’efficience  diminue au fur et à mesure de la journée. De plus, bosser plus de                    50 minutes en continu s'avère contre-productif, parce que le cerveau humain n'est pas prévu pour travailler longtemps. Pour obtenir un rendement optimal, le bon ratio à respecter est de 52 minutes d'activité pour 17 minutes de repos.   


Eurêka, j'ai trouvé, pléonasma-t-il ! On peut donc déduire de tout ceci que, si l'on désire se montrer super performant, il faut inverser la vapeur, c'est-à-dire effectuer 17 minutes de travail pour 50 minutes de pause.  


1: voir bêtise 1009 -  Si c'est lui qui le dit - Note de Nervien 




1011- Samedi  28 septembre 2024


Solidaire


Il n'éprouvait aucune honte à l'avouer ouvertement. Oui, ne vous en déplaise, il apportait son soutien, plein et entier, aux féministes. Mais attention, il ne se rangeait qu'aux côtés des pures, des dures, des saignantes. Elles seules menaient les vrais combats. Ces héroïnes ne perdaient pas leur temps à s'occuper des faux problèmes, du genre jeunes filles insultées, agressées, du style revenu salarial moyen des femmes inférieur de 24,4 % à celui des hommes, du type sort des malheureuses obligées de vivre dans la rue, etc... etc...


Non, avec elles, on tapait dans l'essentiel, le primordial, le vital. Qu'un rustre parlât d'une auteure au lieu d'une autrice et vous les verrez prêtes à lui lacérer le torse, toutes griffes dehors. Si un goujat se demandait pourquoi l'égalité des sexes requérait la féminisation des fonctions de général des Armées, de PDG, mais pas de celles d'éboueur, d'égoutier, elles iront lui arracher les yeux avec une cuillère à thé. Elles exigeront la réouverture du bagne de Cayenne afin d'y envoyer, manu militari, le grossier s'étant étonné de leur totale absence auprès d'ouvrières  grévistes.


Au-delà de ces luttes cruciales, elles se battaient également, comme des lionnes, contre le patriarcat. Les lionnes, d'ailleurs, dont la condition montrait que, même dans le règne animal, le mâle imposait sa masculine oppression. Il était bien connu que ces pauvres félines s'éreintaient à chasser pour nourrir la famille, tandis que monsieur le lion passait toute la sainte journée à se prélasser et à faire la sieste. Sauf que des zoologues ont récemment découvert, qu'en réalité, le lion se consacrait à la chasse autant que la lionne. La chose était restée ignorée des spécialistes, jusqu'à aujourd'hui, à cause de la furtivité des mâles léonins. En effet, ces grands discrets chassent de nuit et, en plus, ils le font à l'affût, en se tenant caché dans la végétation. 


Bon d'accord, admit-il, mais qu'en était-il des hyènes, hein ?



1012- Dimanche 29 septembre 2024


Reflexion humanitaire


Bien qu'il en ait eu connaissance voilà fort longtemps, il gardait parfaitement en mémoire les termes de l'article 14 de la Convention de Genève : « Compte tenu des dispositions de l'article 121, les blessés et les malades d'un belligérant, tombés au pouvoir de l'adversaire, seront prisonniers de guerre et les règles du droit des gens concernant les prisonniers de guerre leur seront applicables. » En clair, faut pas buter  les gars d'en face qui ont de la fièvre ou qui ont pris dans la tronche des trucs plutôt attentatoires à l'espérance de vie de ceux qui les reçoivent. Et si vous en transportez dans votre sac, ne pas hésiter à leur donner du maroilles.


Par son humanisme, voire son esprit chevaleresque, le principe lui paraissait des plus estimables. Il était bel et bon que toujours on le respectât. Néanmoins,  il trouvait cet article 14 incomplet. Il oubliait de s'intéresser à un aspect pourtant très important de la question. Il ne soufflait mot de la conduite à adopter par les blessés. En effet, certains   ne se gênaient pas pour descendre les adversaires venus charitablement les secourir. Les marines américains, par exemple, en firent l'amère expérience lors de la bataille de Guadalcanal.


Cela étant dit, par son humanisme, voire son esprit chevaleresque, l'article 14 n'en demeurait pas moins des plus estimables. Il était bel et bon que toujours on le respectât. Quoique... En y réflichissant bien… Songea-t-il. Prenons l'histoire d'Henri Tandey. Ce type fut le soldat britannique le plus décoré de la Première Guerre mondiale. Au mois de septembre 1918, près de Marcoing, conformément à l'article 14, il laissa la vie sauve à un soldat allemand blessé et, de plus, il le laissa regagner librement ses lignes. Ayant survécu au conflit, plusieurs années après la fin de celui-ci, le troupier épargné confirma officiellement les faits. Il s'agissait d'un certain Adolf Hitler. 


Par son humanisme, voire son esprit chevaleresque, l'article 14 de la Convention de Genève est des plus estimables. Il est bel et bon que toujours on le respectât. Quoique... En y réflichissant bien… 


1 : n'écoutant que mon cœur et mon immense affection pour vous, je vous offre, gratuitement et sans condition, l'article 12 de la Convention de Genève : « Les prisonniers de guerre sont au pouvoir de la Puissance ennemie, mais non des individus ou des corps de troupe qui les ont faits prisonniers. Indépendamment des responsabilités individuelles qui peuvent exister, la Puissance détentrice est responsable du traitement qui leur est appliqué ». Ne me remerciez pas, tout le plaisir est pour moi. Note de Nervien  



1013 - Samedi 5 octobre 2024


La lexicologie en deux mots


Parce que connu pour être spécialiste en toutes choses et autres domaines annexes, son camarade de toujours depuis longtemps avait sollicité son éminente expertise. L'affaire possédait un caractère de la plus haute importance. Il s'agissait de choisir le couteau à fromage que cet ami escomptait utiliser pour trancher son maroilles quotidien. Avant de procéder à cette acquisition, ce dernier s'était, bien entendu, assuré qu'il demeurait encore légal de détenir un tel objet. Afin de participer activement à la réduction des émissions de CO, pour se rendre chez le meilleur coutelier à l'ouest de l'Escaut river, ils avaient décidé d'user d'un tandem. Tout en pédalant, ils conversaient amiteusement.


- « Adélèmé, as-tu entendu parler de cette folle idée de rétablir l'enseignement obligatoire des langues mortes. »


- « Excuse-moi, mon cher Chérimec, le grec et le latin ne sont pas   décédés. »


- « Pardonne-moi, il me semble tout de même que, dans les chaumières ou au supermarché, il s'entend peu de particuliers s'exprimant en grec ancien ou en latin. »


- « Bien sûr, cependant il n'en demeure pas moins que, chaque jour, tes particuliers font vivre ces langues, en usant d'une myriade de mots dont elles sont les mères. »  


- « Sans doute, suis-je plus bouché que le tunnel de Fourvière à une heure de pointe, mais je ne vois pas en quoi cela motive une remise à l'honneur de leur étude. » 


- « Cela permettrait, en autres, de connaître la signification profonde de nombreux termes que nous utilisons couramment. Prenons par exemple, imbécile et crétin. » 


- « Dois-je me sentir spécialement visé ? »


- « Ta modestie devrait-elle en souffrir, je t'assure qu'il n'en est rien.  Imbécile vient d'un mot grec ancien qui désigne l'individu qui ne porte pas de bâton pour pouvoir se défendre. Quant à crétin, son ancêtre grec ancien s'appliquait à celui qui ne se préoccupait pas de politique, laissant ainsi à n'importe qui le soin de le faire à sa place. »


- « Intéressant... Intéressant... Fort de ce que tu viens de m'apprendre, je me rends compte que les imbéciles ou les crétins, voire les deux en même temps, sont beaucoup plus nombreux que je ne le croyais. »


- « Felix qui potuit rerum cognos cere causas ! »




1013 - Dimanche 6 octobre 2024


Poena est malum passionis propter malum actionis1 


Garçon paisible et de bonne volonté, il s'honorait de posséder une largeur d'esprit de belle envergure. Il ne refusait jamais de prêter une oreille attentive à l'opinion, non seulement, d'autrui, mais également de son prochain. Il leur accordait toujours une écoute bienveillante. Puis, loin de tout esprit partisan, il se forgeait un avis frappé au coin du bon sens et de la rationalité. Que sa réflexion aboutisse à une approbation ou une réprobation, il exprimait l'une et l'autre avec la même courtoise affabilité.


Récemment, il avait incidemment ouï que d'aucuns et d'aucunes s'opposaient à l'envoi des délinquants et criminels derrière les barreaux. Le procédé ne leur paraissait décidément pas adéquat. Leur préférence allait plutôt à l'application de peines alternatives. Que fallait-il donc en penser ? Il mit sa robe de chambre, s'installa dans son fauteuil fétiche, ferma les yeux, mit les mains derrière la nuque, inspira profondément et se plongea dans une intense réflexion. Ses cogitations l'amenèrent à considérer que la position des contestataires de l'incarcération pouvait parfaitement s'entendre.


Il était parvenu à cette conclusion en se référant au fonctionnement du système judiciaire de l'Ancien Régime. A l'époque, seuls les sujets en attente de leur jugement ou de l'exécution de leur condamnation et ceux concernés par une lettre de cachet, pouvaient atterrir en prison. Pour autant, les entorses à la loi, les délits, les crimes, ne restaient pas impunis. Ils entrainaient des sanctions aussi variées qu'imaginatives. Ainsi, les coupables pouvaient-ils être condamnés à une amende, au masque de la honte2, au carcan, au pilori, à la flagellation, au fouet,‎ au bannissement, au fer rouge, à l'essorillage3, au tranchage de la langue, aux galères, à la pendaison, à la décapitation‎, à l'éventration, à l'ébouillantage, au supplice de la roue, à l'écartèlement, au bûcher. Il trouva surprenant que la privation de maroilles ne figurât pas parmi ce large éventail de châtiments. Sans doute, une telle punition était-elle considérée comme trop inhumaine.  


Quoi qu'il en soit, se dit-il, si l'on souhaite réellement supprimer l'engeôlement des délinquants et criminels, il suffit simplement de rétablir l'usage du Code pénal de l'Ancien Régime. Je ne comprends pas que les prosélytes de l'abolition des établissements pénitentiaires n'y aient pas pensé. Etonnant, non ?  

                                                                                                                       

1: si vous ne parlez pas le latin, demandez à Adélèmé                  (bêtise 1013 du Samedi 5 octobre 2024) - note de Nervien


2 : masque que devait porter une personne déclarée coupable d'un délit mineur


3 : ablation des oreilles 



1014 - Dimanche 12 octobre 2024


« Dans l’or des étoiles 

Nous voyons luire le ciel »



- « Monsieur Sidoine Eulmoine, enfant et résident de Sommaing, est châtelain céroplasticien. Outre gagner au loto du CAS1, le poids de sa conjointe en maroilles, Sidoine rêve de nous toucher un mot d'acteurs de l'Histoire largement oubliés, aujourd'hui. Soyez exhaussé, Sidoine ! Touchez, touchez-nous, donc ! »

   

- « Si vous me le permettez, cher ami, je préciserai que ces gens n'ont pas été oubliés, mais ont voulu se faire oublier. » 


- « Comment cela et pourquoi, très cher ami ? »


- « Vous allez comprendre, très, très, cher ami. Savez-vous combien de généraux français répondirent, en 1940, à l'appel de leur collègue de Gaulle. » 


- « Très, très, très, cher ami, à une dizaine près, j'estime leur nombre à ... tout plein. »


- « Très, très, très, très, cher ami, à une dizaine près, comme vous dites,  précisément, ils furent : 3, plus un amiral. Ils n'étaient donc même pas une poignée, puisqu'on en comptait moins que de doigts sur une main. »


- « Très, très, très, très cher ami, alors qu'ont fait tous les étoilés qui ne se joignirent pas de Gaulle ? » 


- « Très, très, très, très, très, très, cher ami, certains passèrent en 2e section2, les autres servirent dans l'armée de Vichy, officiellement  appelée armée d'armistice. »


- « Très, très, très, très, très, très, très, cher ami, détrompez-moi si je me méprends. Armée d'armistice, cela donne à penser que ces généraux commandèrent une armée dont l'activité devait se situer, à mi-chemin, entre celle d'une troupe de scouts et d'une section de majorettes. » 


- « Désolé de vous l'annoncer aussi brutalement, mais néanmoins amicalement, très, très, très, très, très, très, très, très, cher ami, vous vous mettez le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. Cette armée a bel et bien combattu. »


- « Nooon, elle a poursuivi la guerre contre les Allemands, très, très très, très, très, très, très, très, très, cher ami ? »

A

- « Nooon, ses généraux estimaient avoir mieux à faire, très, très, très très, très, très, très, très, très, très, cher ami. Ils ordonnèrent que la base britannique de Gibraltar fût bombardé le 23 et le 25 septembre 1940. Parallèlement, du 23 au 25 septembre 1940, la flotte franco-britannique, qui se trouvait au large de Dakar, fut canonnée sur leur ordre. A bord d'un des navires de cette formation navale, se trouvait le général de Gaulle en personne. » 


- « Je n'en crois pas mes oreilles, très, très, très, très très, très, très, très, très, très, très, cher ami ! »


- « Je vous assure, très, très, très, très, très très, très, très, très, très, très, très, cher ami, que vous pouvez faire confiance à vos étagères à mégots.   Continuez à les garder grandes ouvertes, car je vais encore leur donner du travail. En juin, juillet, 1941, l'armée de Vichy se battit contre les Alliés, en Syrie et au Liban. Elle causa la mort de 600 Britanniques et Indiens, de 416 Australiens et de 300 Français Libres. En novembre 1942, elle tua 479 Américains, en tentant, sans succès, de les empêcher de débarquer en Afrique du Nord. » 


- « Je suis extrêmement choqué, très, très, très, très, très, très très, très, très, très, très, très, très, cher ami. »


- « Alors, préparez-vous à l'être derechef, très, très, très, très, très, très, très très, très, très, très, très, très, très, cher ami. Quand en novembre 1942, les Allemands et les Italiens envahirent la zone de la France non encore occupée, nos généraux d'armistice se gardèrent bien de leur opposer la moindre résistance, même symbolique, ne serait-ce que pour l'honneur. Ici, sans jeu de mots, le pompon revint aux amiraux. Ils préférèrent saborder la flotte à Toulon, plutôt que de tirer sur les Allemands ou de rejoindre les Alliés. »


- « Heureusement, de nos jours, ce genre d'officiers généraux n'existent plus. »


- « Ah bon, vous croyez ? »


1: Club d'Accrobranche Sous-marin


2 : la 2e section comprend les officiers généraux qui ne font plus partie du service actif, mais sont maintenus à la disposition du ministre de la Guerre.  

 


1015 - Dimanche 13 octobre 2024


ERUDITION ET HORIONS


Un corps d'un mètre quatre-vingt-dix sculpté dans cent dix kilos de muscles bestiaux, le cheveu tondu plus ras que de l'agrostis, un faciès de bouledogue hargneux, voilà le portrait sans retouche de l'homme à qui    son voisinage ne voulait que du bien. Les gens, composant ce dernier, étaient donc certainement de bonne composition, paisibles, affables, conciliants, et tout et tout... 


Non, en fait, ils auraient aimé pourrir la vie de ce balèze, à coup de miteuses mesquineries, d'exaspérantes tracasseries, de foireuses embrouilles, de vilaines crasses et même aller jusqu'à lui emprunter du maroilles, sans jamais le lui rendre. Mais pourquoi donc avaient-ils renoncé à cette belle tradition du mitoyen enquiquineur, sans laquelle il n'était point de voisin digne de ce nom ? La réponse à ce mystère résidait dans l'explication suivante.    


En fait, ils ne doutaient pas, un seul instant, qu'aller chercher des noises à un type pareil, offrait l'assurance d'un retour de bâton de haute intensité, dont les effets promettaient de se montrer fort dommageables pour leur intégrité physique. Comme cette perspective, peu engageante, leur filait une sainte pétoche, ils préféraient ne pas troubler la quiétude du monsieur.


Effectivement, bien qu'il ne possédât aucune tendance belliqueuse, il n'en demeurait pas moins vrai que prendre ce gaillard à rebrousse-poil exposait le rebrousseur à de sérieux et contondants désagréments. Cependant, il eut été se tromper lourdement que de le prendre pour une brute inculte. Il possédait une culture aussi vaste que raffinée. 


Par exemple, il n'aurait jamais commis la grossière faute d'abréger Monsieur et Messieurs en usant des anglicismes Mr et Mrs, au lieu de   M et MM. De même, il n'ignorait pas qu'une lettre capitale devenait majuscule dès lors qu'elle se trouvait au début d'une phrase ou placée en première place d'un nom propre. Par ailleurs, il savait également que cette règle s'appliquait aux phrases et noms propres entièrement écrits ou imprimés en capitales.


S'il se montrait compréhensif envers ceux qui ne connaissaient pas la différence entre lettre majuscule et lettre capitale, par contre, à ceux qui usaient de Mr et Mrs, en lieu et place M et MM, il mettait les poings sur les i, comme il se plaisait à le dire. En d'autres termes, il leur défonçait la tronche.  



1016 - Samedi 19 octobre 2024


FAQ


Il représentait la meilleure incarnation de l'excellence ultime mise au service de la France. Son éblouissante perfection donnait une nouvelle dimension à la notion d'être humain. Avec lui, l'Homme se hissait au-delà de ses capacités physiques et intellectuelles intrinsèques. Ces merveilleuses capacités qui ont été si patiemment peaufinées par une longue évolution, de la Préhistoire au mercredi en 15. Il avait atteint un tel niveau de sublimité que certains le comparaient à un maroilles et parfois même à un dieu. Il faut effectiment reconnaître que s'il avait possédé un aigle et une chèvre, que s'il se fût promené avec un éclair de foudre en poche, on eut pu le prendre pour Jupiter. Eux, le connaissaient mieux que quiconque, car il était leur adjudant. Ils possédaient la certitude que le roi de l'Olympe ne pouvait lui arriver à la cheville, parce qu'ils le savaient le plus meilleur des plus meilleurs des adjudants.      


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, sans idée de manœuvre, mettez-vous en arc de cercle. Bien, maintenant, on ne bouge plus. Plein des valeurs de la modernité moderne, de l'avant-garde avant gardiste, du progrès progressif, je vous propose aujourd'hui de participer à une foire aux questions. Afin de rendre cet exercice plus captivant et séduisant, je lui apporterai une petite touche personelle. Je n'autoriserai qu'un questionement. Je vous écoute. » 


- « Mon adjudant, l'idée de nous envoyer batailler sur le sol de steppes étrangères revient à la mode. Pour obtenir l'état final recherché, qu'implique cette volonté, doit-on appliquer le principe, de notre ami allemand Carl von Clausewitz.  A savoir : La guerre est un acte de violence dont l'objectif est de contraindre l'adversaire à exécuter notre volonté. Pour atteindre cette fin avec certitude, nous devons désarmer l'ennemi ” ? »


- « Les enfants, je tiens tout d'abord à vous avouer la chose suivante. 14-18, les années 40, les exploits d'Harald Schumacher, le 8 juillet 1982, font que, sans aucune rancune et en toute bienveillance, pour moi, il y aura toujours un truc qui n'ira pas. C'est lorsque l'on met ami et “allemand” dans une même phrase . »


- « Veuillez m'excuser de vous avoir malencontreusement offensé, mon adjudant. »

- « Non, va, je ne te hais point, mon petit. Concernant ton interrogation, je répondrai en citant un gars que je préfère à tonton Clausewitz, j'ai nommé Napoléon Bonaparte : “ En tactique comme en stratégie, la supériorité numérique est le principe de victoire le plus général ”. Je précise, qu'actuellement, notre Armée de Terre, à laquelle nous avons l'honneur d'appartenir, pourrait entièrement tenir dans le Stade de France, sans avoir besoin de se serrer. »


- « Ce qui veut dire, mon adjudant ? »


- « Ce qui veut dire que, étant donné nos effectifs et nos moyens, si nous sommes envoyés batailler sur le sol de steppes étrangères, mieux vaut  que vous preniez une assurance-vie plutôt qu'un PEL. »



1017 - Dimanche 20 octobre 2024


« Attitude is a little thing that makes a big difference » 


Quand il lui était demandé ce qu'il trouvait de remarquable chez l'Anglais, il répondait sans hésiter : son humour exquis, sa gastronomie fantaisiste et surtout son flegme inébranlable. Il était ébahi par cette aptitude particulière à demeurer calme et détaché, en toute circonstance. Se  montrer ainsi capable de toujours faire preuve de stoïcisme, de toujours se montrer correct et civilisé, quelle que soit la situation, l'émerveillait. Pour autant, il savait que prendre le natif d'Outre-Manche pour un   inconditionnel imperturbable, aurait été commettre une lourde erreur.


A ce sujet, il aimait faire référence à la contestation des taxes destinées au financement de la Guerre de Cent Ans. Elle déclencha la révolte dite des paysans qui se déroula de mai à novembre 1381. Visiblement, à cette occasion, les Anglois perdirent leur flegme légendaire. Par exemple, à Londres, les insurgés incendièrent des hôtels particuliers, des bâtiments publics, attaquèrent des prisons, dont la Tour de Londres, exécutèrent des notables, des gardes, des représentants de l'autorité royale, le lord chancelier Simon Sudbury et le trésorier du roi Robert de Hales. Comme quoi, disait-il, lorsqu'il se met vraiment en colère, l'Englishman ne le fait, ni à moitié, ni dans la dentelle, alors à bon entendeur, salut ! 


Bien qu'ils fussent fils de la perfide Albion et nos meilleurs ennemis, il éprouvait une grande estime pour les Anglais, pour ce qu'ils sont et, il n'en doutait pas, pour ce qu'ils continueront d'être.



1018 - Samedi 26 octobre 2024


Décarbonation, piège à… ?


Il s'honorait de sa qualité d'homme de conviction qu'aucune cause ne rebutait, dès lors qu'elle se révélait noble et branchée. Alors, pour lui, elle devenait aussi sacrée que la fraicheur de son maroilles. Ses engagements ne possédaient rien de commun avec ceux des tranche-montagnes, dont les plus grands exploits se résumaient à des discours aussi verbeux que vains. En ce qui le concernait, l'efficacité ne pouvait naître que de l'action concrète. Aussi, comme les fiers et héroïques chevaliers d'antan ou les rugueux piliers du 15 de France, n'hésitait-il jamais à se jeter fougueusement dans la mêlée. 


De ce fait, quoi de moins étonnant et de plus naturel à ce qu'il s'intéressât impétueusement à la décarbonation de la planète. Discours officiels, articles de presse, conférences savantes, émissions radiodiffusées ou télévisées, fakeshakers fakshéquant, lui avaient appris le lien direct existant entre carbonation et réchauffement climatique. Réchauffement climatique qui représentait un danger mortel auquel la Terre ne pourrait survivre, parce que, justement, il était mortel. Un homme tel que lui devait bien entendu  s'impliquer dans la lutte contre ce péril.


Il réduisit sa consommation énergétique en supprimant de chez lui le chauffage, la climatisation, l'éclairage, les appareils électriques, son lave-linge, son sèche-linge, son ordinateur et il ne se lava plus qu'à l'eau froide. Il bannit de son régime alimentaire les produits carnés et laitiers et ne consomma plus que des légumes, des fruits, des céréales complètes, des légumineuses, des noix, des graines. Il ne voulut plus entendre parler de voiture, de covoiturage et même de transports en commun, train y compris. Il n'acceptait de se déplacer qu'à pied ou à vélo, quelque fut le nombre de kilomètres qu'il eût à parcourir.   


Et puis, il y a peu, il pris connaisance d'une étude de l’Institut Rousseau1. Cette dernière relevait que les onze principales banques de la zone euro possédaient pour plus de 530 milliards d’euros d'actifs dépendant des énergies fossiles, soit 95 % du total de leurs fonds propres. Par conséquent, pour le système bancaire, une décarbonation effective  signifiait la faillite totale.   


Conséquemment, s'était-il dit, si nos élites politiques et financières souhaitent sincèrement et honnêtement décarboner notre environnement, cela signifie qu'ils consentent à la ruine des banquiers. Et là, allez savoir pourquoi, il eut soudain un gros doute.



1 : Créé en 2020, l’Institut Rousseau est un laboratoire d’idées attaché à la reconstruction écologique et démocratique de nos sociétés, dans toutes ses composantes économiques, sociales et institutionnelles. Note de Nervien



1019 - Dimanche 27 octobre 2024


« Un médiocre est toujours à son meilleur niveau »


Bien que messieurs Uderzo et Gocigny aient affirmé dans l'une de leur œuvre que l' on peut être barbare et aimer les fleurs, pour sa part, il se voulait tout entier de douceur, bonté et amour. Cependant, parfois, il arrivait que certains individus l'irritassent. Il n'osait l'avouer, mais ce qu'il éprouvait à leur égard  allait bien au-delà d'une simple exaspération. Pour tout dire, en son for intérieur, il ressentait une fort désir de les assommer méthodiquement. Et il ne réservait pas cette pulsion contondante qu'aux seuls contempteurs du maroilles 


Le dernier sur lequel il eut une folle envie de jouer du poing était un      ex-ministre, particulièrement performant dans le domaine des méfaits sexuels. Ce retraité ministériel bénéficiait quotidiennement de la protection de douze gorilles et de trois voitures. Ce cuistre faisait ainsi l'objet de mesures de sécurité supérieures à celles accordées à un premier ministre en fonction. Chaque garde du corps, chargé de veiller sur sa petite santé, coûtaient annuellement au contribuable 71 879 €, frais auxquels il faut ajouter le prix des voitures, de leur carburant et de leur entretien.       


Après tout cela, s'indigna-t-il, ce piteux avait l'outrecuidance de parler de courage et de se prétendre gaulliste. Mais espèce de jocrisse ! le Général de Gaulle réglait de ses deniers ses factures de gaz et d'électricité à l'Elysée, ainsi que ses repas familiaux et lorsqu'il se rendait à la Boisserie en voiture, à Colombey-les-deux-Eglises, il payait l'essence. Son épouse avait acheté au Bon Marché de la vaisselle, pour ne pas abuser de celle du palais présidentiel. 


Quant au courage, voilà un exemple de quoi se montrait capable de Gaulle. En 1944, lors de la libération de Paris, il se rend à Notre Dame pour assister à un Te Deum. Arrivé sur le parvis de la cathédrale, des tireurs embusqués tentent de l'abattre. Alors que la foule présente est prise de panique, il demeure impassible et pénètre calmement dans l'édifice religieux, accompagné du général Leclerc. Les coups de feu, qui retentissent également à l'intérieur, n'empêchent pas de Gaulle de s'avancer imperturbablement vers le choeur, relevant au passage les chaises renversées par les gens affolés.      

  

Ce ministre obsolète, pensa-t-il, me semble parfaitement correspondre au genre de types à propos desquels le général de Gaulle disait : « Je ne peux pas dire que je les déteste. On peut détester Hitler, Staline. On ne peut pas détester le néant ».



1020 - Samedi 02 novembre 2024


Avis d'un expert, un vrai


- « Gélase Eulfèbvre exerce la profession d'écorcheur de lin, à Vertain. Lorsqu'il ne se consacre pas à ce beau métier, au demeurant fort lucratif,    il s'adonne à dégustation en aveugle de maroilles. Mais pas que, il se complait également à mettre au jour la vérité Historique, afin de la faire  éclater en pleine lumière. Puisque telle est votre vocation, cher Gélase, éclatez, éclatez-nous donc. »


- « Nervien, mon gamin, connaissez-vous le général Georg von Küchler ? »


- « Je n'ai pas cet honneur, cependant les douces sonorités de son patronyme me font subodorer le teuton de bonne facture. »


- « Effectivement, j'ajouterai pour votre gouverne qu'il commanda la XVIIIe armée de la Wehrmacht, engagée à Dunkerque. »       


- « Je ne saurais vous exprimer à quel point je me sens heureux pour lui et  combien grâce à cela je dormirai mieux ce soir.  En d'autres termes, ça me fait une belle jambe, mais ne le prenez pas comme une offense de ma part, cher ami. » 


- « Je ne le prends pas. Alors, figurez-vous que lorsqu'il ne se trouvait pas occupé à nous envahir, ce brave Georg tenait scrupuleusement un journal de guerre. Voici ce que l'on peut y lire :


“ Malgré notre écrasante supériorité numérique et matérielle, les troupes françaises contre-attaquent en plusieurs endroits. Je ne parviens pas à comprendre comment d’aussi si valeureux soldats, luttant en divers endroits à un contre dix (parfois même un contre trente), parviennent à trouver encore suffisamment de force pour passer à l’assaut : c’est tout simplement stupéfiant ! Je retrouve chez les soldats français de Dunkerque la même fougue que celle des poilus de Verdun en 1916. Depuis plusieurs jours des centaines de bombardiers et de canons pilonnent les défenses françaises. Or, c’est toujours la même chose, notre infanterie et nos chars ne peuvent percer nulle part et subissons des pertes effrayantes, malgré quelques succès locaux éphémères. Le commandement français a très habilement installé sa troupe et son artillerie. Je crains que Dunkerque soit un échec pour nous : la quasi-totalité du corps expéditionnaire britannique et la plus grande partie de la 1ere armée française vont nous échapper, car quelques milliers de braves nous barrent l’accès à la mer. C’est consternant, mais c’est ainsi. Dunkerque m'apporte l'évidence que le soldat français et l'un des meilleurs au monde. Résistant pendant dix jours à nos forces largement supérieures en nombre et en matériel. L'Armée française a sans doute     sauvé la Grande-Bretagne de la défaite en permettant à son armée de rejoindre la côte anglaise. ” »


- Alors que dites-vous de cela. » 


- « J'en dis que le premier et même la première que j'entends encore raconter que nos gars ne se sont pas battus en 1940, je lui mets une baffe à lui décoller la moumoute ! »




1021 - Dimanche 03 novembre 2024


Ils sont trop forts ces Américains


Si le tout venant n'ignorait rien de sa condition de maroillophile, son état d'aérophile demeurait plutôt confidentiel. Il est vrai que seuls les plus perspicaces pouvaient remarquer les discrets indices permettant de soupçonner l'existence de cette seconde passion. Par temps de grand soleil, il portait des Ray-Ban. Quand il voyait un avion dans le ciel, il se montrait capable de l'identifier, au premier coup d'œil . Pour lui, le bruit des réacteurs ou des turbopropulseurs ne représentait pas une nuissance sonore, mais une exaltante symphonie. Il mesurait les distances en milles, l'altitude en pieds, la vitesse en nœuds. Il avait baptisé son ficus de compagnie Monsieur Louis Blériot. Dans ses lettres au Père Noël, il demandait systématiquement des simulateurs de vol, des maquettes d’aéronefs, des livres et magazines d’aviation, des coffrets DVD sur la Patrouille de France, l'Airbus, le Rafale, etc.


Hier, vers 15h06, 15h07, il se posa une question qui ne l'avait jusqu'ici jamais interpelé. A quoi tenait la notoriété du Grumman F-11Tiger ? Lui venait-elle du fait qu'il fut le premier avion supersonique à entrer en service au sein de l'US Navy, ou à la brièveté de son temps de service opérationnelle (quatre ans seulement), ou bien encore à ses apparitions dans les aventures de Buck Danny ? Eh ben non, pas du tout, la vérité se trouvait ailleurs.


En septembre 1956, le pilote Tom Attridge reçut pour mission de tester les capacités de tir en vol en piqué du F-11 Tiger. Parvenu à l'altitude voulue, il se mit en piqué et lâcha une rafale de 20mm. La vitesse générée par le vol en piqué, lui fit rattraper et croiser la trajectoire des obus qu'il avait précédemment tirés. Ses derniers frappèrent son réacteur. Il fut alors obligé d'effectuer un atterrissage en catastrophe, auquel heureusement il survécut. Le F-11 Tiger devint ainsi le premier et le seul avion au monde à s'être abattu lui-même.


Afin qu'un truc pareil  ne se reproduise plus, se dit-il, j'espère qu'ils ont mis des panneaux de limitation de vitesse pour que les pilotes volent moins vite. 

          


1022 - Samedi 09 novembre 2024


Opinel : couteau fermant à manche en bois portant une saignée dans laquelle vient se loger la lame en position de fermeture


Leurs épouses respectives avaient enjoint, à l'un, d'aller acheter un maroilles et à l'autre, d'aller acheter un maroilles. Ils acceptèrent cette mission, immédiatement, sans hésitation, ni murmure. Ainsi, ils entendaient se montrer agréables avec leurs conjointes. Egalement et surtout, ils comptaient profiter de l'occasion pour boire une mousse ou deux dans un estaminet, sans que lesdites conjointes ne le sussent. Donc, pour l'heure, ils se dirigeaient d'un bon pas vers le débit de jus houblon en chope, sur lequel ils avaient jeté leur dévolu. Le rythme soutenu de leur marche et leur anadipsie biérologique ne les empêchaient nullement  d'échanger des considérations philosophiques. 


- « Erasistrate, conserves-tu toujours en poche un Opinel ? »


« Bien sûr, Hipponicos, sinon avec quoi me couperais-je de belles et savoureuses tranches de maroilles ? »


« Mais, malheureux, serais-tu devenu fou ? »


- « Depuis quand cette habitude pantalono-coutelière vaut-elle de se retrouver répertorier dans la catégorie des perturbés cérébraux ? »


« Je t'accorde qu'elle ne représente effectivement pas un signe de dérangement psychiatrique. Par contre, elle constitue un délit, attendu que le port de l'Opinel fait partie des pratiques prohibée par la loi. »


- « Qu'à cela ne tienne, je me munirai d'un Laguiole. »


- « Subterfuge qui ne te servira à rien, car la mesure s'applique à tous les couteaux. »


- « Comment a-t-on pu décider d'une aussi absurde interdiction ? »


- « Ta question est sans objet car l'acte porte le sceau de la sagesse. Il s'agit d'empêcher toute présence d'arme dans l'espace publique, afin que les citoyens puissent y évoluer en parfaite sécurité . » 


- « Bien sûr.. Evidemment... J'aurais dû y penser moi-même. Maintenant que, grâce à toi, j'ai compris le bien fondé de l'affaire, je pense que ça serait vachement bien d'expliquer cette démarche aux édiles de la ville de Kennesaw, en Géorgie, aux Etats-Unis.»


- « Pourquoi ? »


- « Figure-toi que depuis 1982, le conseil municipal de cette ville a pris, à l'unanimité, un arrêté imposant aux habitants de posséder au moins une arme à feu avec les munitions afférentes. Cependant, se trouvent exemptés de cette obligation, ceux qui ne peuvent s'y conformer pour des raisons financières, les objecteurs de conscience et les personnes atteintes de troubles mentaux. Au total, aujourd'hui, 50 % des foyers de cette commune sont armés. »


- « Bonté divine ! Je n'ose imaginer le carnage qui a dû et doit encore en découler ! »


- « Ben, en fait, rien de tel ne s'est produit. En revanche, depuis l'application de cette mesure, le taux de criminalité a baissé de 89 %. Bon maintenant, faut dire que ces gens se baladent avec des Glock, des AR15, des Ruger King Cobra, des Uzi, des Spring TRP, etc, qui sont certainement beaucoup moins dangereux et mortels que le dévastateur Opinel. »




1023 - Dimanche 10 novembre 2024


« Tu mesures la valeur d'un peuple à son école car elle incarne à la fois le savoir-faire, le savoir apprendre et le savoir-vivre  » 


Malgré les examens médicaux, les prises de sang, les radiographies, les échographies, les électroencéphalogrammes, les scanners, les séquençages d'ADN, auxquels ils avair été soumis, aucun spécialiste n'avait pu déterminer l'origine de son étrange singularité. Depuis sa plus tendre enfance, à chaque fois qu'il mangeait du maroilles, cela ne ratait jamais, il se mettait à se poser des questions. C'est ainsi que, dernièrement, il fut amené à se demander qui diantre pouvait bien élaborer les programmes scolaires.      


Une documentation adéquate lui apprit que cette tâche était dévolue au   Conseil supérieur des programmes. Siégeaient dans cette vénérable institution, trois députés et sénateurs, deux membres du Conseil économique social et environnemental, tous désignés par leurs pairs et dix personnalités, dites qualifiées, nommées par le ministre de l’Éducation nationale. Ce dernier choisissait également le président et le vice-président de cet aéropage. Tout ce beau monde déployait un remarquable talent pour pondre des sujet d'études aussi insipides qu'ennuyeux. Faire dans l'enrichissant et le captivant aurait été s'exposer au danger d'éveiller l'esprit des élèves, au lieu de l'anesthésier bien proprement.


Par exemple, concernant Platon, nos lycéens devaient passivement se farcir un long blablabla sur le dualisme entre deux réalités, le monde sensible et le monde intelligible, le monde sensible étant considéré comme un ensemble d'objets participant de leurs modèles immuables et gnagna et gnagna et gnagna... Par contre, pas question de les faire réfléchir sur les  idées platoniciennes du style :


« Celui qui  veut servir son pays doit avoir, non seulement, le pouvoir de penser, mais aussi la volonté d'agir. »


« Refuser de participer à la vie politique, c'est risquer d'être gouverné par des inférieurs. »


« Une bonne décision est fondée sur la connaissance et non sur les chiffres. »


« L'ignorance : la racine et la tige de tous les maux. »


« L'excellence n'est pas un don, mais une compétence qui demande de la pratique. Nous n'agissont pas correctement parce que nous sommes excellents, mais atteignons l'excellence en agissant correctement. »


Et que dire de l'enseignement de l'Histoire ! Je suis sûr, soliloqua-t-il, que monsieur Gélase Eulfèbvre1 et ses semblables ne me désavoueraient pas.


1: bêtise 1020 - Samedi 02 novembre 2024



1024 - Samedi 16 novembre 2024


L'idée était bonne, à un détail près


Génial inventeur de la râpe à maroilles électrique et du motoculteur solaire antichar, Bernardeau referma le livre qu'il tenait en main. Il le posa lentement sur le guéridon ovale en merisier, installé à la droite du fauteuil club cuir basane dans lequel il était assis. Un sourire discret se dessina furtivement sur ses lèvres. Ce qu'il avait lu, avait fait se lever en lui le grand vent qui gonflait les voiles de la nef des esprits créateurs. Il sentait, mieux, il savait que l'idée en train de mûrir dans son cerveau, allait changer la vie de millions de personnes et lui valoir une statue dans le jardin public, à côté du monument à la mémoire de Louis Blériot. Il quitta son siège pour aller retrouver son épouse tant légitime que bien-aimée.


- « Ma Mie ! Ma Mie! Où te situes-tu, Ma Mie ! »


- « Effectue un léger quart de tour à gauche et si tu regardes bien, tu devrais me trouver assez facilement, à environ 50 centimètres de toi. »


- « Ah, oui, maintenant que tu me le dis, effectivement. Ma Mie, je t'ai hélée afin de t'informer que, il y a à peine un instant, je fus innovant. »


- « Cela signifie-t-il que l'Institut national de la propriété industrielle va   devoir enregistrer le dépôt du brevet d'un réchaud nucléaire pour fondue bourguignonne ou d'un saucisson à peau phosphorescente ? »


- « Pas du tout, mais je m'en veux de n'y avoir pas pensé. Figure-toi,  qu'après none, je parcourus un ouvrage d'Histoire. » 


- « Euh... Je ne veux pas te démoraliser, mais question invention, c'est quand  même pas... »


- « Tu te méprends, Ma Mie. J'ai découvert dans cet écrit qu'au temps de leur l'empire, les Romains ne donnaient de prénoms qu'aux garçons. Les filles ne portaient que le nom de famille de leur père, féminisé par l'adjonction d'une terminaison en "a". Si la famille comptait plusieurs filles, on attribuait à chacune un terme indiquant leur ordre de naissance, comme maior, minor, etc. Et là, je te pose une question. »


- « Vas-y, pose. »


- « Ne te sens-tu pas scandalisée par ces pratiques dégradantes pour les femmes ? Ne penses-tu pas qu'elles portent gravement atteinte à leur dignité ? Ne crois-tu pas qu'elles font montre d'un scandaleux manque de respect à leur égard ? Ne considères-tu pas qu'elles portent gravement atteinte au principe d'égalité des sexes ? » 


- « Pour toi, à partir de combien de questions, tu comptes une question ? Sinon, bien évidemment, j'acquièsce totalement à tes remarques. »


- « Je ne pouvais demeurer inerte face à une telle injustice ! J'a usé de tout mon génie pour concevoir une liste de prénoms féminins, afin que chaque Romaine puisse en posséder un. J'espère que les marques de reconnaissance, dont elles ne manqueront pas de me couvrir, ne te rendrons pas jalouse. D'ailleurs, en témoignage de ma fidélité et de mon amour, je t'accorde le privilège d'être la première à choisir un prénom parmi tous ceux que j'ai créés. »


- « Tu es trop bon, je te remercie, mais non. »


- « Pourquoi ? »


- « Parce que n'étant pas Romaine, mon état civil comporte déjà un prénom : Aldebarde. Tu te souviens ? »


- « Ah, oui, maintenant que tu me le dis, effectivement... »


- « Quant, à ma jalousie, n'ais aucune crainte. »


- « Pourquoi ? »

 

- « Parce qu'il me semble, que de nos jours, il reste peu de Romaines de l'Empire Romain en circulation. »


- « Ah, oui, maintenant que tu me le dis, effectivement... »



1025 - Dimanche 17 novembre 2024


« À l'avenir, chacun aura droit à son quart d'heure de célébrité mondiale » 


J'avoue, se disait-il les soirs où au soleil couchant le lionceau va boire au marigot et le poivrot au bistrot, j'avoue que je représente l'un des plus beaux spécimens d'anonyme. Je possède toutes les caractéristiques propres à me ranger dans cette catégorie. Je ne compte à mon actif aucun talent, aucun charisme, aucun haut-fait, particuliers. Rien ne permet de me distinguer de la masse. Je me montre tellement insignifiant, qu'au bout de dix ans, mon crémier ne me reconnait toujours pas, lorsque je me présente en son échoppe pour acheter mon maroilles bihedomadaire. 


Loin de souffrir de cet état, je m'en félicite. Je n'ignore pas que ce faisant, je me trouve à contre-courant de notre époque. D'aucun penseront qu'il faut y voir l'attitude de quelqu'un dont l'estime de soi ne passe pas par le besoin de reconnaissance. Ils croiront également que je ne montre  aucune envie de me mettre en avant, de capter l'attention, de faire l'intéressant. Pour ma part et en toute modestie, je ne reconnais nullement ces traits de caractères comme étant miens . En ce qui me concerne, je me satisfais de mon anonymat parce qu'il me protège des dangers de la popularité.  

 

Cette crainte remonte au quasi-traumatisme que me causa l'histoire de Dracon. Tout le monde, bien sûr, sait que le terme de draconien dérive du nom de ce législateur athénien du VIIe siècle, connu pour la sévérité et la rigueur des sentences de son code pénal (un voleur de chou risquait la peine de mort). Par contre, rares sont ceux qui savent ce qui lui arriva  en se rendant à l'invitation que lui fit la ville d'Egine . Ainsi que le voulaient leurs coutumes, les Eginètes exprimèrent à leur illustre visiteur leur joie de le voir et leur respect, en lui jetant dessus manteaux et chemises. Dracon fut  alors bientôt recouvert d'un monceau de vêtements, sous lequel il mourut étouffé.


Vous vous doutez bien que je préfère demeurer un parfait inconnu plutôt que de courir le danger de finir de la sorte. Pour autant, il ne me déplairait point que cette pratique de jet vestimentaire revienne à la mode. Pou peu qu'on lui apporte quelques saines modifications, je suis sûr qu'elle rencontrerait un vif succès. Il faudrait simplement la rendre systématiquement létale et l'imposer aux responsables politiques  impopulaires. Je pense que l'idée aurait plu à Dracon.


1026 - Samedi 23 novembre 2024


Nunquam polluta 


Comme s'il ne suffisait pas qu'il fut brillant, compétent, cultivé, il possédait de surcroît un sens de la générosité qui n'avait d'égal que son amour de la justice. Colosse divinement proportionné, au regard d'acier, il graignait si peu l'engagement physique, qu'il n'hésitait pas à         outrpasser les limites du dépassement de soi-même. Aucun danger ne pouvait effaroucher sa bravoure. Bien que toutes ses admirables et valeureuses qualités lui en eussent légitimement donné le droit, il ne réclamait ni gloire, ni adulation, ni prime exceptionnelle défiscalisée. Il agissait uniquement pour le plaisir désintéressé de défendre la Patrie. Si vous leur demandiez : “ quis est iste vulputate ? ”, ils vous répondaient avec fierté : “ monsieur, il est bien très plus beaucoup que cela, il est notre adjudant ”. Aux rassemblements, pour lui faire honneur, ils mettaient un point d'honneur à présenter des tenues, des alignements,  un garde-à-vous, atteignant la perfection.


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, le chef m'a aimablement fait part de l'interrogation qui occupe actuellement vos esprits raffinés. Parce que naturellement affable, bienveillant et paternel, je vais sans plus attendre y répondre brillamment. »


- « Oh ! Trop bien ! Merci  mon adjudant ! »


« Si je vous dis omelette à la morue, axoa, jambon, rugby, vous me répondez ? »


- « Bayonne ! Mon adjudant  »


-« Bravo, les gars. »   


- « Euh, mon adjudant, en fait, nous ce que nous voulions... »


- « Je sais, je sais, rassurez-vous, j'y arrive. Dans les années 1660, une révolte éclata au Pays Basque. Au cours d'un affrontement, des paysans  bayonnais se trouvèrent à court de poudre et de munition. Il ne fut  pourtant pas question pour eux de déposer les armes. Ils enfoncèrent leurs longs couteaux de chasse dans le canon de leurs fusils et poursuivirent le combat. Voilà ! Vous vouliez apprendre d'où la baïonette tirait son nom et comment elle naquit, maintenant vous le savez.» 



- « En vérité, nous, mon adjudant, c'est pas vraiment ça qui nous posait question. Ce qu'on se demandait vraiment, c'est si on avait encore le droit d'avoir des baïonettes, vu que pour les Opinel c'est devenu interdit. »



Commentaire


Loin de moi l'insolente volonté de contredire vos propos, monsieur l'adjudant, cependant... Cependant, des documents du début des années 1600 prouvent que, dès cette époque, les mousquetaires à pieds introduisaient dans le canon de leurs mousquets leurs épées à fines lames, appelées soie de cochon. Donc, ils équipèrent leurs fusils d'une arme blanche bien avant que les paysans bayonnais ne le fissent. Par ailleurs, il est également attesté que cette pratique existait, de manière plus ancienne encore, chez les chasseurs, qui emmanchaient leurs dagues dans leurs arquebuses. Sinon, chez nous, dans le Nord, les arbalétriers portaient le nom de “ baïonniers ” et le carreau de leur arme celui de “ baïon ”. Par conséquent, il se peut que l'origine du mot “ baïonette ” ne soit pas celle que l'on croit. Mes respects, mon adjudant. 


Paul Gustave Marie Camille Hazard  


 


1027- Dimanche 24 novembre 2024


« Travailler ! C'est bon pour ceux qui n'ont rien à faire » 


Pour qui me connait, admettait-il, ergophile ne figure pas en première place des épithètes les mieux à même de me caractériser. Entendre évoquer la valeur travail, me plonge dans une irrépressible hilarité, tant le concept me parait ne posséder aucun sens. S'il fallait énumérer les vraies valeurs, je citerai l'amitié, l'amour, la fidélité, la franchise, la fraternité, le maroilles, l'honnêteté, l'égalité, la politesse, la bonté, la liberté. Dans tous les cas, il s'agit de notions abstraites. 


Le travail, lui, au contraire, relève du concret, pur et dur. Il est le moteur de la société, comme le monocylindre 2 temps refroidi par air est celui de ta mobylette. Et, sauf erreur de ma part, personne n'a jamais parlé de la valeur monocylindre 2 temps refroidi par air. Je tiens le travail pour rien d'autre que le tribut que nous devons à la société, afin de lui permettre de fonctionner. Aussi, ne rechignais-je jamais à la tâche, mais sans en faire jamais plus que nécessaire. Cette raison explique pourquoi, sans doute, Casey J.Fury possède une place à part dans mon cœur.


Ce brave citoyen américain de 25 ans travaille en tant que peintre sableur pour le chantier naval de Portsmouth, qui assure la révision, la réparation et la modernisation des sous-marins d'attaque nucléaire de la marine américaine. Le 23 mai 2012, il oeuvre sur l'USS Miami. Estimant avoir suffisamment bossé, il débauche avant l'heure. Je trouve cette attitude aussi admirable que pleine de sagesse. Bon, maintenant, je reconnais que la manière dont il s'y prend pour quitter précocement son poste, peut faire l'objet de quelques critiques       

  

Il met le feu à une couchette afin de déclencher une alerte incendie. Ce dernier s'étend rapidement. Cent pompiers mettent douze heures pour   maîtriser le sinistre, qui fait sept blessés parmi les firemen et les membres d'équipage. Les dégâts occasionnés s'élèvent à 700 millions de dollars, ce qui conduit la marine américaine à décréter le démantèlement du sous-marin. L'opération coûte tout même 54 millions de dollars. L'enquête du NCIS mène rapidement à l'arrestation de Casey James Fury. La Justice le condamne à 17 ans de prison et à payer 400 millions de dollars de dommages et intérêts.


D'accord, je ne le nie pas, faut reconnaître qu'il a poussé le bouchon un peu loin, le Casey. En plus, les Américains, ils ne rigolent pas quand un de leurs sous-marins crame. Nous, nous nous montrons beaucoup plus détendus. Quand une cathédrale brûle, cinq ans après, tranquille, on ne connait toujours pas l'origine du feu.



1028- Samedi 29 novembre 2024


Ordre, sécurité, bonnes moeurs


Certains adorent le chessboxing ou sont mordus de cha-cha auvergnat, tandis que d'autres raffolent du maroilles, à moins qu'ils n'affectionnent les fers à friser les moustaches à alcool. S'il reconnaissait le caractère fort estimable et captivant de ces marottes, il n'en demeurait pas moins que, à part le maroilles, aucunes d'elles n'éveillaient en lui un intérêt délirant. En revanche, il se passionnait réellement pour l'ordre, la sécurité et les bonnes moeurs. Du coup, il voyait en Adolphe Thiers   son modèle, son idéal, son héros.


Ce bon bourgeois avait attiré son estime parce que, sous la Deuxième République, il faisait partie des chefs de file du parti de l'ordre, dont le programme reposait justement sur l'ordre, la sécurité et les bonnes mœurs. Néanmoins, il y a peu, à cause de la profonde déception que lui occasionna ce personnage, il le fit brutalement tomber du piedestal sur lequel il l'avait hissé. L'origine de cette volte face ne venait pas du fait qu'il avait ordonné l'écrasement de la Commune dans le sang1.     

 

Non, ce qui l'avait irrémédiablement détourné de son idole, l'avait même amené à le prendre en grippe, était que ce type, censé défendre les bonnes mœurs, possédait une notion pour le moins particulière desdites bonnes mœurs. Ce joli monsieur entretenait une liaison avec une femme mariée. Afin de pouvoir la rencontrer plus facilement et à sa guise, il épousa la fille de cette dernière. Quelques temps après, il prit une seconde maîtresse, qui n'était autre que la sœur de son épouse mais aussi et donc  la fille cadette de sa première maitresse .


Heureusement qu'aujourd'hui, se rassura-t-il, il n'existe pas parmi nos hommes politiques de gens aussi immoraux que ce gros dégoûtant de Thiers. Mais en y réfléchissant mieux, finalement, il ne se sentit pas plus rassuré que ça.

 

1: 4000 tués dans les combats et exécution sommaire de         30 000 Parisiens, dont un grand nombre de femmes et d'enfants - Note de Nervien


Commentaire

Si la presse contemporaine se montre particulièrement discrète sur les secrets d'alcôve des hommes politiques, il en allait autrement à l'époque de la deuxième République. Les journaux ne craignirent pas de parler, je cite, « des trois moitiés de Thiers ».

Honoré Daumier



1029- Dimanche 30 novembre 2024


C'est pas parce que ça a l'air scientifique, que ça l'est, mon lapin


Il n'appréhendait pas, ne concevait pas, ne comprenait pas, que l'on ne s'intéressât pas aux grandes causes. L'homme moderne, digne de ce nom, ne pouvait décemment se désintéresser des problèmes modernes mettant en péril l'avenir du monde moderne. Bien qu'il osât à peine le croire, il savait qu'il existait malheureusement des individus bien pire encore. En effet, de dangereux nocifs malsains se permettaient de nier les raisons officielles des périls menaçant notre futur. En dépit de son inébranlable foi en la tolérance et en la non-violence, il possédait l'intime conviction qu'il fallait que ces nuisibles fussent interdits de maroilles, puis écorchés vifs, en place publique.  


Lui, au contraire, en véritable chevalier blanc des bonnes intentions, ne manquait jamais aucune occasion de propager la bonne parole. Il la portait partout où il le pouvait : sur son lieu de travail, dans son bar coutumier, à la table des réunions de famille ou sur celle d'auscultation de son médecin traitant. Et malheur à celui qui se hasardait témérairement à le contredire. Il l'agonisait de cinglants sarcasmes et l'écrasait de tout le poids de son dédaigneux mépris. Ces infects impies ne méritaient aucune indulgence. Ne reculant devant aucun sacrifice, il ne se contentait pas de simplement se payer de paroles, non, il agissait.   



Ainsi, hier, dans la rue, se trouva-t-il abordés par deux citoyens. Malgré   leur ordonnancement capillaire et leur mise vestimentaire qu'il jugea   aussi improbables qu'inexplicables, il leur réserva un bon accueil. Il avait abandonné les préventions qu'ils lui avaient d'abord inspirées, dès qu'ils lui avaient proposé de signer une pétition qui lui parut du meilleur aloi. Elle exigeait l'interdiction du monoxyde de dihydrogène, élément abondamment présent dans les pluies acides. Il pouvait de plus, à l'état de vapeur provoquer des brûlures, sous sa forme solide, des nécroses et sous sa conformation liquide engendrer la suffocation, s'il était inhalé en surabondance. 


Le lendemain, il se prévalut fièrement de cette héroïque action. Il conta à l'un de ces infects impies qui ne méritaient aucune indulgence, comment il n'avait pas hésité à courageusement apposer son paraphe sur un manifeste demandant l'abolition du monoxyde de dihydrogène. Il demeura bouche bée, lorsque l'infect impie qui ne méritait aucune indulgence lui apprit que le monoxyde de dihydrogène n'était que l'élégant et scientifique nom que parfois l'on donnait à l'eau. L'infect impie qui ne méritait aucune indulgence lui rappela aimablement que l'esprit critique n'était pas fait pour les chiens. Il lui recommanda amicalement de toujours en user pour apprécier la valeur des informations qu'il recevait. Pour finir, l'infect impie qui ne méritait aucune indulgence lui saisit délicatement le menton, le poussa doucement vers le haut, de manière à ce que sa bouche cesse de demeurer ouverte.   


Samedi 7 décembre 2024


Rien n'est plus proche du vrai que le faux 


- « Monsieur Argimère de Honpeux Dirque Tégrand Pourton Naje fabrique  des boulons explosifs pour patins à roulettes diésels, dans son atelier de la ruelle du Trou, à Bazuel. J'ignore pourquoi, mais présentement un flot de larmes noient les yeux angéliques et inondent l'aimable visage de cet artistique artisan. Cher Argimère, tenez, prenez ce mouchoir et mouchez-vous. Vous aurait-on privé de Bêtise de Cambrai pour que vous soyez ainsi plongé dans un aussi immense chagrin ? »


- « Non, point du tout, mon débordement lacrymal vient de ce que mon intégrité intellectuelle m'oblige à dévaster un pan d'une légendaire légende. »


- « Sans vouloir minorer la raison de votre peine, cher Argimère, il n'y a pas de quoi en faire un fromage, fut-il un maroilles. Adonc, dévastez, dévastez, sans regret. »


- « Puisqu'il le faut, allons-y. Mais vous me comprendrez mieux quand je vous aurai appris qu'il s'agit de Bonaparte. »


- « Ah, ouais ! Quand même ! Vous ne vous frottez pas au premier clampin venu. »


- « Je vous en prie, n'aggravez pas le désespoir qui m'accable. Dans l'esprit du public, la bataille d'Arcole fut gagnée par une action personnelle de Bonaparte. On raconte qu'il la remporta grâce à la prise d'un pont. Il le conquit en s'y élançant, avec un drapeau à la  main, entraînant ainsi derrière lui les troupes qui hésitaient. »


- « Effectivement, c'est ce que j'ai toujours entendu dire. »


- « En fait, la victoire vint de la ruse exécutée par un tambour, nommé André Estienne. Il a furtivement franchi la rivière, puis est passé sur les arrières des Autrichiens pour y battre la charge. En l'entendant, ces derniers crurent que les Français étaient en train de les encercler. Pour éviter de se trouver pris dans le piège, qu'ils croyaient sur le point de se refermer sur eux, ils se replièrent vite fait, bien fait.  »


- « Eh bien, vous voyez, cher Argimère, votre histoire renforce l'estime que j'éprouve pour les joueurs de tambours alors que je déteste toujours autant les gratteurs de guitares. » 



Dimanche 8 décembre 2024


Großer automobilhersteller  


Sans aucune ambiguïté, son épouse légitime partageait avec lui la passion du maroilles. Par contre, à son grand dam, elle demeurait imperturbablement insensible aux charmes de l'automobile, à laquelle il vouait un véritable culte. L'indifférence automobilistique de sa conjointe ne s'expliquait pas par une sensibilité particulière à la bien-pensance écologique  ou par un sens de la poésie et de l'esthétique inférieur à celui du ténia.      


Non, simplement, elle ne voyait en l'auto qu'un agglomérat de tôles, de ferrailles diverses, de verre, de plastiques et de caoutchouc. D'accord, reconnaissait-elle, une voiture vous transportait commodément d'un point X à un point Y. D'accord, cela vous dispensait de marcher et vous permettait ainsi d'éviter le douloureux désagrément des ampoules aux pieds. Pour le reste, une automobile, aussi exceptionnelle fût-elle, ne lui inspirait pas davantage d'émotion que son grille-pain matinal.    


En revanche, pour sa part, il raffolait de l'odeur de l'essence, des rugissements sous les capots, des carrosseries rutilantes, et cela, depuis toujours. Les premiers mots qu'il prononça ne furent pas maman, papa, mais vroum, vroum. A ses yeux, l'auto représentait une créature aussi captivante que désirable. Il ne pouvait concevoir l'existence sans un volant entre ses mains et une pédale d'accélérateur sous sa semelle. Il connaissait toutes les marques et leurs constructeurs. Du moins, le croyait-il. 


En effet, pas plus tard que l'avant-veille du surlendemain dernier, il en avait appris de belles sur Volkswagen. Si personne n'ignorait que cette firme germanique fabriquait 1 500 véhicules par jour, combien de gens savaient-ils que, depuis 2010, à Wolfsburg, elle produisait quotidiennement, 18 000 saucisses végétariennes et véganes. Les pères des célébrissimes Coccinelle et Golf faisaient donc désormais davantage dans l'ersatz que dans la mécanique. Si on les laisse faire, s'était-il dit, bientôt ils nous fourgueront des trottinettes électriques et de la bière sans alcool !


1032 - Samedi 14 décembre 2024


Coup de bol... ou pas 


A la suite d'une demande commune de leurs épouses respectives, ils rentraient avec le coffre de l'auto rempli de matériels et de matériaux divers. Toutes ces fournitures devaient leur servir à confectionner deux petites remorques. Une fois fabriquées, chacune d'elle s'accrocherait à l'arrière des trottinettes électriques de ces dames. Elles pourraient ainsi commodément et écologiquement transporter les maroilles dont elles faisaient force emplettes Pour l'instant, eux se trimbalaient en voiture, parlant de choses et d'autres, surtout d'autres, d'ailleurs.  



- « Stratolas, crois-tu à la chance ? »


- « Parce que tu penses vraiment que nous avons touché le gros lot en nous retrouvant obligés de nous taper la construction de ces fichues remorques, Thériménès ? »


- « Non, j'évoquais la chance en général. »


- « Ben, je n'en sais trop rien. »


- « Moi, je suis convaincu qu'elle existe et que tout le monde peut un jour en avoir, même les pires individus. »


- « Tu dis cela à mon intention ? »


- « Non, je pense en autres, à un sale type comme Hitler. Il a échappé à des dizaines d'attentats grâce à la chance. »  


- « Dans certains cas, peut-être, mais assurément pas dans tous. »  


- « Comment cela ? » 


- « Par exemple, je peux te mentionner un assassinat que Hitler évita non pas à la suite de l'intervention de la chance, mais à celle des autorités américaines. » 


- « Quoi ! Mais, qui, que, comment, quand, qu'est-ce ?! Raconte ! »   


- « Tu devrais passer la cinquième. Donc, le 23 mars 1933, l’ambassadeur d’Allemagne à Washington D.C reçut une lettre qui retint toute son attention. Son auteur y déclarait ceci : Monsieur, 

J'ai demandé au président Roosevelt de protester publiquement auprès de votre gouvernement concernant les outrages commis contre les Juifs en Allemagne et d'exiger la fin immédiate et complète de cette persécution. Dans le cas où il ne ferait pas une telle déclaration, je vous informe que j'irai en Allemagne et assassinerai Hitler. Cordialement, Daniel Stern. »


- « Wouah ! Arriver à citer un texte, comme ça, chapeau, tu as une sacrée mémoire ! »


- « Suffit d'entretenir son taux de phosphore. Pour ça, je mange pas mal de poisson et je suce des allumettes. »


- « De quelle manière le diplomate teuton a-t-il réagi ? » 


- « II a transmis le courrier au Secrétaire d'Etat, en y joignant une requête officielle réclamant l'arrestation de Stern. Le Secrétaire d'Etat envoya ces documents au Procureur Général des Etats-Unis, qui les expédia au chef du FBI, J. Edgar Hoover, avec ordre de rapidement appréhender Daniel Stern. » 


- « Eh bien, je vois que la descente en cascade de la voie hiérarchique est un sport qui ne se pratique pas que chez nous. Cependant, il me semble que ce Stern ne méritait pas un tel intérêt. Il paraît plus farfelu que dangereux. »  


- « Détrompe-toi, malheureux. En réalité, Stern avait joint le mafieux Dutch Schultz, afin de lui demander de contacter des tueurs capables d'organiser et d'effectuer l'élimination de Hitler. Il offrait de payer à chacun d'eux 2500 dollars, plus les frais. » 


- « Et Schultz a accepté ? »


- « Il parla de la proposition de Stern à des gangsters dont il connaissait  l'aversion pour les nazis. Ils acceptèrent de faire le boulot, mais avant que le contrat fût conclu, je cite Dutch : ce salaud de  J. Edgar Hoover et ses fédéraux ont commencé à fouiner et à poser des questions. Alors  les gars ont pensé qu’il était sage de laisser tomber l’affaire. »


- « Et Stern ? »


- « Bien qu'il n'ait pas ménagé ses efforts, le FBI n'a jamais réussi à lui mettre la main dessus. »


- « Fortiche, le gars. »


- « Ou, chanceux...



1033 - Dimanche 15 décembre 2024



Repenti


Plein d'une sainte contrition, il confessait son indignité, son infamie, à qui voulait l'entendre. Mea maxima culpa, clamait-il, je le reconnais sans détours, je l'admet ouvertement, je l'avoue avec le rouge de la honte au front. Entre pas longtemps et tout à l'heure, il y a donc encore peu de cela, je me souciais davantage de la qualité de mon maroilles que de la condition féminine. Je n'imaginais pas que les femmes puissent souffrir d'inégalités. Du coup, leur situation, franchement, en un mot comme en cent, je n'en avais strictement rien à fout... euh, je ne m'en préoccupais guère, voulais-je dire.   


Puis, se produisit l'évènement qui me bouleversa l'esprit et le coeur. Je regardais un match de foot à la télévision.  A la mi-temps, je me levais du canapé pour aller à la cuisine, afin de m'y réapprovisionner en bière. Et c'est là, devant la porte du réfrigérateur que, aussi ostensiblement qu'inopinément, me vint la révélation. En plus d'être une femme, la femme est aussi, quelque part, un être humain. A ce titre, elle possède naturellement le droit à l'égalité avec l'homme. Si cette illumination m'avait ouvert les yeux, elle me laissait largement dans l'ignorance. Aussi décidais-je de m'instruire sur le sujet.  


Je m'enquis de l'article 3 du Préambule de la Constitution de 1946 qui indique que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ». J'appris des féministes que la défense de ce principe constitutionnel faisait l'objet d'âpres combats aussi bien pour l'égalité politique, qu'économique, culturelle ou sociale. Par ailleurs, je m'aperçus que les femmes pouvaient subir des opressions religieuses et culturelles, mais aussi être, bien trop souvent, victimes de violences en tous genres.  


J'en fus scandalisé, écoeuré et le fus bien davantage encore lorsque j'appris ceci. Par misogynie, sans aucun doute, certains adjectifs comme aquilin, grégeois, preux, vairons, refusent le genre féminin ! Et ça, il n'était pas question que je le laisse passer.


Commentaire 

Je me permets de signaler qu'il existe également des adjectifs uniquement féminins, tels que bée , bissextile, cochère ou épinière.

Emile Littré



1034 - Samedi 21 décembre 2024


Horum omnium fortissimi sunt Belgae, c'est pas une blague


Bien sûr, qu'ils connaissaient ce principe. Il faisait intrinsèquement partie de leur éthique. Il en connaissait par cœur chaque terme : une troupe se doit d'être à l'image de son chef. Cependant, ils avaient conscience que, malgré tous leurs monstrueux efforts, ils ne pouvaient espérer rien de plus que d'arriver à la cheville de celui qui les commandait. Personne n'égalerait jamais les capacités exceptionnelles de cet être complet, synthétique et harmonieux. Tout en lui se trouvait suramplifié, aussi bien son physique, que sa volonté, son énergie, ses sens, son intelligence, sa lucidité, sa sensibilité, son imagination, sa délicatesse, sa générosité. Le voici qui sortait du bâtiment de la compagnie pour venir au rassemblement.


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, je souhaiterai vous narrer l'extraordinaire histoire d'Adrian Carton de Wiart. Reçu ?! »


- « Reçu, mon adjudant ! »


« Ah ! Ainsi que le son du cor le soir au fond des bois, j'aime le choeur puissant de vos voix de centaures. Le camarade Wiart naquit de parents belges, le 5 mai 1880, à Bruxelles. Il était donc aussi totalement Belge que le maroilles est thiérachien. »


- « Sans vouloir prétendre oser avoir la moindre intention de vous offenser, mon adjudant, me permettez-vous d'émettre humblement une légère opinion ? »


- « Je permets. »                                                                                                      

- « Etre un Belge né en Belgique de parents belges, ne me paraît pas spécialement une histoire extraordinaire. En Belgique, beaucoup de Belges se trouvent dans ce cas. »


- « Finalement, si j'avais su, je n'aurais pas permis. Bon, je reprends. En 1899, Wiart abandonne les études qu'il poursuivait à l'université d'Oxford, pour s'engager dans un régiment de cavalerie de l'Armée britannique. Il y est nommé sous-lieutenant. Il combat durant la seconde Guerre des Boers, puis durant la Guerre du Somaliland, durand le premier Conflit mondial, la Guerre soviéto-polonaise, la Guerre polono-ukrainienne, la Guerre polono-lituanienne et la seconde Guerre mondiale. Il termine sa carrière militaire avec le grade de lieutenant-général et bardé des plus prestigieuses médailles britanniques, belge et italienne. Il reçut également le titre de chevalier commandeur de l'ordre de l'Empire britannique.  »


- « Un sacré baroudeur, ce type, mon adjudant ! » 


- « Non, caporal, par rapport à lui, le baroudeur fait figure de majorette à la retraite. Ce gars-là a été blessé par balle, au visage, à l'aine, à l'épaule, à la tête, deux fois, au ventre, à la cheville, à la jambe, à la hanche, au genou. Il a perdu son œil gauche, un poumon, une partie de l'oreille droite, puis l'oreille complète. Il s'est coupé les doigts de la main droite avec les dents, lorsqu'un médecin a refusé de les lui amputer. Plus tard, il perdit entièrement cette main. Il s'est évadé de son camp de prisonniers en creusant son propre tunnel. Il a survécu à deux crashes d'avions. Et savez-vous ce qu'il a écrit dans ces mémoires ? »


- « Non, mon adjudant ! »


- « Franchement, j'ai adoré la guerre. »  



1035 - Dimanche 22 décembre 2024


Rira bien qui rira le dernier


Très chrétiennement, il se montrait toujours prêt aimer les uns les autres, à partager avec eux le maroilles et le vin. Enfin, pas tout à fait, reconnaissait-il. A l'égard de son voisin, il éprouvait une franche aversion. Ce sentiment ne relevait pas de l'animosité coutumière régissant les relations de voisinage. Sans vouloir se montrer foncièrement anticonformiste, il se refusait à verser dans ce genre d'usage, dont il ne voyait pas l'intérêt. Son animosité envers ce concitoyen mitoyen venait du genre auquel ce dernier appartenait, celui des gros lourds qui se croient drôles. Il constituait même l'un des plus beaux spécimens de cette race. 


Si l'humour était la politesse du désespoir, lui était le désespoir de l'humour. Alors qu'il n'amusait que lui seul, il se prenait pour le roi des comiques. En vérité, la seule couronne, que ce cuistre méritait de porter, était celle du plus lamentable débiteur de remarques et de blagues aussi pitoyablement graveleuses que foireuses et vaseuses. Il vous en abreuvait avec l'exigence implicite de vous esclaffer. Impossible de le rencontrer, de mener une conversation avec lui, sans qu'il effectue son consternant numéro de bouffon raté. Voilà pourquoi cet individu le fatiguait, l'agaçait, l'horripilait et il se savait n'être pas seul dans ce cas.   

 

Un jour, n'y tenant plus, il lui demanda sèchement de désormais bien vouloir lui épargner le déplorable flot de ses miteuses plaisanteries. Avec un sourire narquois et un air arrogant, l'intéressé rétorqua : ah, mais je m'excuse, il ne saurait être question que vous puissiez m'en empêcher. Je suis atteint du syndrome Witzelsucht. Et il éclata de rire. Il lui répondit en lui flanquant sur le museau une beigne grand format, bien tassée. Puis, il déclara fort aimablement, d'une voix très douce : je m'excuse, il n'aurait su être question que je puisse m'en empêcher. Je suis atteint du syndrome  trouble explosif intermittent.  



1036 -Samedi 28 décembre 2024


Alya, Sirius, Naos, Electre, Sélène et compagnie


Tout comme il savait qu'il existait des gens raffolant du maroilles, il n'ignorait aucunement qu'il s'en trouvait d'autres s'émerveillant devant  la beauté et l'harmonie de l'univers. Ils s'émouvaient à la pensée du ballet céleste des particules cosmiques dans l'immensité de l'espace sidéral. Ils s'abîmaient dans la contemplation silencieuse du calme obscur d'une nuit étoilée. Ils se sentaient éperdus d'admiration devant le nombre incalculable d'étoiles qui, tels d'étincelants diamants, scintillent de mille feux. 


Malgré sa largesse d'esprit, son naturel tolérant, sa volonté de compréhension, il ne s'expliquait pas cette fascination. Que l'on se fût émerveillé devant un maroilles, d'accord, mais les étoiles, franchement... D'abord, leur nombre n'était pas infini. On en comptait 300 milliards dans notre galaxie et on ne pouvait en observer que 3000 à l'œil nu, depuis notre hémisphère. Ensuite, elles n'étaient rien d'autre que de grosses boules de gaz avec un noyau d'hydrogène. Il ne voyait pas plus de raison de s'extasier à la vue d'étoiles qu'à celle des brûleurs d'une gazinière. Parmi les étoiles, il en existait même de carrément malsaines, appelées magnétars. 


Il s'agit d'étoiles à neutrons au champ magnétique particulièrement puissant. Ce champ se montre fort différent de ceux plantés de betteraves. Il n'en possède nullement l'avenant et l'aimable abord. Il présente plutôt un caractère particulièrement désagréable, pour ne pas dire antipathique. Il est capable de détruire toute forme de vie à 1000 km à la ronde et, bien pire encore, d'effacer les données présentes sur nos cartes bancaires dans un rayon de 200 000 km. Aussi se félicitait-il, que les étoiles se trouvassent et restassent à des années-lumière de notre bonne vieille Terre et des distributeurs automatiques de billets.



1037 Dimanche 29 décembre 2024


« Le destin n'est pas une question de hasard »


Il n'avait jamais souhaité de mal aux individus malintentionnés. Il ne fallait pas voir dans cette attitude la marque d'une quelconque manifestation d'indulgence, pas plus qu'une démonstration de grandeur d'âme. Il ne se prétendait pas et ne cherchait pas à se montrer meilleur qu'un autre. Cette absence d'un désir de châtiment providentiel contre les mauvais sujets, résultait d'une profonde conviction personnelle. Il estimait qu'espérer qu'il leur arrivât des bricoles, représentait une activité assurément inutile. Quand il lui était demandé pourquoi, il répondait : de toute façon, tôt au tard, d'une manière ou d'une autre, le destin se chargera de faire payer aux  malfaisants le juste prix de leurs répréhensibles actions. Il vaut donc mieux se préoccuper de son maroilles quotidien et laisser faire le destin.


Il pensait également que le destin pratiquait volontiers l'humour noir et l'humour noir, il aimait. Contrairement à beaucoup de ceux qui s'y essayaient, le destin ne confondait pas l'humour noir avec la grossièreté, l'obscénité, la goujaterie, la méchanceté gratuite. Il savait que le premier cabot venu ne pouvait manier ce type d'humour, parce qu'il exigeait une maîtrise parfaite de l'ironie, du sarcasme et du second degré. Il devait être manié avec des pincettes. A cette condition et à cette condition   seule, il parvenait à vous faire rire de choses horribles, afin que vous   puissiez les supporter et les affronter. Sa certitude que le destin s'adonnait à l'humour noir, datait du jour où on lui avait raconté cette histoire totalement véridique.


Le soir du Nouvel An 2011, une terroriste devait commettre un attentat suicide à la bombe, au cœur de Moscou. Sa ceinture d'explosifs se trouvait reliée à son téléphone mobile. La réception d'un SMS déclencha l'explosion de la charge, avant que la kamikaze n'ait atteint l'objectif qui lui avait été assigné. Elle fut l'unique victime de l'explosion. Le SMS qu'elle avait reçu, était un SMS de nature commercial, lui souhaitant une bonne année.



BONNE ANNEE !

1038 Samedi 4 janvier2025


Des danseurs de tango au pays du flamenco


- « Monsieur Dalphin Daphideuque, ingénieur aéronautique amateur et glandophile professionnel, vit en bon père de famille dans sa coquette chaumine, sise rue de la Cavée, à Saint Python. Il a quitté la confortable quiétude bourgeoise de son douillet foyer familial pour s'en venir répandre sur nos esprits l'éclatante lumière de son omnisciente érudition. Cher Daphien, éminent Piatien, répandez, répandez, à volonté. »  


- « Cher Nervien, éminent Cambrésien, je parie que vous ignorez dans quelles régions se déroula la Guerre des Malouines, qui opposa Argentins et Britanniques, du 2 avril au 14 juin 1982 ? » 


- « Ben.. elle s'est passée dans les îles Malouines, de la Géorgie du Sud et Sandwich du Sud, dans l'Atlantique sud. »


- « Si je reconnais volontiers et rends hommage à la justesse de vos connaissances, cependant, il n'en demeure pas moins que je me vois obligé de les considérer comme imparfaites. » 


- « Je ne me comprends pas. Vous me voyez ahuri de stupéfaction. Comment est-il possible que vous puissiez ne pas vous trouver sastisfait de ma réponse ? »


« Parce que, jeune Nervien, la Guerre des Malouines toucha aussi directement notre bonne veille Europe. »


« Je vous jure sur la tête de mon prochain maroilles que je n'en ai jamais entendu parler. »  


- « Le contraire m'eut étonné et vous allez comprendre pourquoi. Or donc, dès le début du conflit, l'amiral en chef de la marine argentine, Jorge Anay, conçut une opération secrète, bapti... »


« Opération secrète ! Voilà pourquoi je n'en savais rien ! »


« Je disais donc, une opération secrète baptisée Opération Algésiras. Il s'agissait d'une action de sabotage, en terre britanique. Plus précisément, le plan prévoyait de mener une attaque dans le port de Gibraltar. »  


- « D'accord, ils appellent leur attaque de Gibraltar, opération Algésiras. Par conséquent, s'ils avaient attaqué Douvres, ils l'auraient appelée Calais. » 


- « Vous leur demanderez à l'occasion. Il avait été décidé de couler un navire de la Royal Navy. »


A suivre...


1039 Dimanche 5 janvier2025


Des danseurs de tango au pays du flamenco (suite bêtise 1038)


- « Il avait été décidé de couler un navire de la Royal Navy. La tâche fut confiée à une équipe de quatre hommes. A sa tête se trouvait Hector Rosales, un agent de renseignement. Il devait organiser et diriger la mission sur le terrain, mais sans participer au sabotage lui-même. Le reste du commando se composait de Máximo Nicoletti, Antonio Nelson Latorre et "Marciano", dont le véritable nom reste encore aujourd'hui confidentiel.»  


- « Et de quelle manière s'y sont-ils pris pour faire des gros trous dans un  bateaux de sa gracieuse majesté ? »  


- « Ils commencèrent par récupérer deux mines à ventouse italiennes de 75kg, à l'ambassade d'Argentine à Madrid. Ils les emmenèrent à Algésiras, où ils avaient loué une maison. Ils achetèrent du matériel de plongée, des fournitures de pêche et un bateau pneumatique. Le 2 mai 1982, ils étaient prêts à traiter la cible choisie : la frégate HMS Ariadne. Et ... »   


- « Et ? »


- « Et, comme dans toutes opérations militaires qui se respectent, il y eut une merd... euh, je veux dire un imprévu. Au même moment, la police espagnole recherchait un Uruguayen et un Argentin soupçonnés d'un braquage de banque. Le directeur de cette dernière signala que deux Argentins avaient  fréquenté son établissement peu avant l'attaque à main armée. Les policiers ne tardèrent pas à identifier Latorre et Rosales. Ils les arrêtèrent, puis mirent la main sur Nicoletti et "Marciano". » 


- « Ah, mer... euh, je veux dire, ah, mince. »


- « Nicoletti avoua rapidement la raison pour laquelle lui et ses compagnons étaient présents à Algésiras. Le chef de la police, Miguel Catalán, alerta le Premier ministre, Leopoldo Calvo Sotelo. Afin d'éviter des problèmes diplomatiques aussi bien avec les Argentins qu'avec les Britanniques, il ordonna de renvoyer discrètement les quatre saboteurs dans leur pays et de détruire toutes traces de leur présence en Espagne. »


- « Une raison de plus expliquant pourquoi je n'en sus rien ! »



1039 Samedi 11 janvier 2025


Contribuable or not contribuable 


Il n'existait aucun lien entre le fait qu'il fut plus chauve qu'une boule de billard et qu'aucune de ses connaissances ne le prit pour un révolutionnaire échevelé. Comparé à lui, le plus mesuré des modérés pouvait passer pour un activiste forcené. Il s'était donné comme devise :   oncques n'objecte, ni ne proteste, car ni pour, ni contre, je suis, bien au contraire. Aussi se tenait-il prudemment à distance de ce qui, de près ou de loin, pouvait ressembler à une forme de contestation. Une simple critique suffisait à l'effaroucher et lui aurait fait dresser les cheveux sur la tête, si elle en avait été garnie.


Cependant, cet esprit plan plan ne l'empêchait nullement de fustiger furieusement l'imprécision. La moindre approximation l'irritait. Il trouvait la chose inacceptable, intolérable, insupportable. Les   « au jugé », les « en gros », les « à vue de nez », les « à la louche », l'horripilaient. Que penseriez-vous, disait-il, si sur l'emballage de votre maroilles, vous lisiez : poids, ben... grosso modo, environ, 200, 210 grammes. Parmi tous les à-peu-près, celui estimant à 46% la proportion des Français ne se trouvant pas soumis à l'imposition, remportait la palme dans son palmarès de l'exaspération. 

 

Quand il entendait quelqu'un user de ce pourcentage, il lui venait une rageuse envie de lui mordre sauvagement le mollet jusqu'à l'os. Ce chiffre ne prenait en considération que l'impôt sur le revenu. Il ne tenait aucun compte de la taxe foncière, de la taxe d’habitation et surtout de la taxe sur la valeur ajoutée, qui ne sont pas des taxes, mais bel et bien des impôts. A la différence d'un impôt, une taxe correspond à la rémunération d'une prestation rendue par un service public, par exemple l'établissement d'une carte grise. Par ailleurs, la taxe sur la valeur ajoutée s'appliquant sur tous les biens marchands faisait, qu'en France, seuls les morts ne payaient pas d'impôt.



1040 dimanche 12 janvier2025


Adjudant intersidéral


Héracles, le fils d'Alcmene et de Zeus, était grand, beau et vachement musclé. Lui aussi l'était. Ce demi dieu héllène possédait une physionomie puissante, un courage surhumain, un grand cœur et un sens de la justice pas piqué des hannetons. Lui aussi les possédait. Ce divin grec était vêtu de la peau du lion de Némée, se baladait avec une massue et aimait la purée. Pas lui, lui était vêtu d'un treillis bien repassé, se baladait avec un PA et aimait le maroilles. Eux préféraient ça, parce que, honnêtement, si leur adjudant était venu au rassemblement habillé d'une peau bête et trainant une massue, son prestige en aurait quand même pris un coup. 


- « Section rassemblée, à vos ordres mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, entre gros pêchus, on va pas se raconter d'histoires. A l'évidence, la présence de plus en plus fréquentes dans nos cieux d'aéronefs d'origine incertaine, vous a forcément conduit à vous interroger sur la réalité de l'existence des entités extraterrestres. »


- « Non, non, absolument pas, mon adjudant.  »


- « Si, si, vous, vous interrogez. Puisque je vous le dis.»


- « A vos ordres, mon adjudant. »


- « Donc pour répondre à votre questionnement, je commencerai par vous rappeler les termes du paradoxe de Fermi. Notre Voie Lactée existe depuis 13 milliards d'années. Elle compte 400 milliards d'étoiles et au moins 100 milliards de planètes. Avec une telle ancienneté et ce nombre incommensurable de planètes, mathématiquement, la vie intelligente s'est obligatoirement développée aux quatre coins de la galaxie. Alors, comment se fait-il que nous n’ayons détecté aucun signe de civilisations extraterrestres ? »


- « Pffut... On sait pas, mon adjudant » 


- « Contrairement à vous, l'écrivain chinois Liu Cixin a émis une explication intéressante, dans un des derniers chapitres de son roman La forêt sombre. »


- « Vous lisez le chinois, mon adjudant ? »


- « Evidemment, pas vous ? Selon la théorie de cet auteur, les extraterrestres savent que le but ultime de toute civilisation est la survie. Or, le développement d’une civilisation entraîne obligatoirement un accroissement constant de l'exploitation de ressources qui, elles, n’augmentent pas. Il en découle que, pour assurer sa survie, une civilisation qui en découvre une autre, n’hésitera pas à l'éradiquer pour   accaparer ses ressources. Elle agira également de la sorte afin de préventivement empêcher toute attaque de la part de cette civilisation. Dans ces conditions, manifester sa présence au reste de l’univers revient, d'une manière ou d'une autre, à se condamner à mort. Voilà pourquoi, les extraterrestres n'ont aucune envie de révéler leur existence. »


- « Mon adjudant, si une civilisation A ne possède pas les moyens technologiques d'attaquer une civilisation B, cette dernière n'a rien à craindre de la civilisation A et par conséquent n'a nulle raison de la détruire de façon préventive. »


- « Liu Cixin a envisagé cette situation, judicieux caporal. Epargner une civilisation sans danger pour la vôtre représente un risque qui ne peut être pris. »


- « Quel risque, mon adjudant ? »


- « Celui de laisser à cette inoffensive civilisation la possibilité                d'atteindre, au fil du temps, un niveau scientifique égal ou supérieur au vôtre, qui lui donnera les moyens de vous éliminer. »


- « Mais alors, mon adjudant, si les extraterrestres refusent de se manifester, qui pilotent les OVNI ? »


- « Des extraterrestres qui n'ont pas lu Liu Cixin. »



 

1041 samedi 18 janvier2025


« On risque autant à croire trop qu'à croire trop peu » 


S'il avait été saint Thomas, à l'annonce de la résurrection du Christ, il n'aurait certainement pas déclaré : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets pas ma main dans son côté, je ne croirai pas ». A la seule vue du sang, il se sentait défaillir, alors vous pensez bien qu'aller tripatouiller dans des blessures sanguinolentes, il ne fallait même pas y penser. Cette émotivité de pintade effarouchée, ne l'empêchait cependant   pas de se réclamer de cet incrédule apôtre, parce que comme lui, il ne croyait que ce qu'il voyait.


Croire sans avoir vu, c’est courir le risque de l'erreur, aimait-il à clamer  crânement. Beaucoup admettaient la sagesse de l'affirmation et exprimaient leur approbation par de vigoureux : ah ben ça, c'est ben vrai, mon bon monsieur ! Ceux-là concevaient-ils sans peine, qu'il était hasardeux de se montrer convaincu de l'existence du maroilles à barbe, alors que personne n'en avait jamais vu un seul au supermarché du coin. Néanmoins, certains autres lui glissaient discrètement à l'oreille que l'œil donnait parfois une perception trompeuse des choses. Il pouvait créer l'illusion au lieu de nous montrer la réalité. Par exemple, si vous vous fiez aveuglément à votre vue, vous considérerez benoîtement que le soleil tourne autour de la Terre.  


S'il ne contestait pas cette opinion, il n'en devint pleinement persuadé que le jour où il trinqua avec un professeur. En lui montrant la coupe en verre qu'il tenait à la main, il lui avait dit : « ce que vous voyez en regardant cet objet, vous donne la certitude qu'il fait partie de la catégorie des solides. Pourtant, en l'observant au microscope, vous constaterez que le verre possède une structure complètement désordonnée, caractéristique des liquides. Ce qui signifie, qu'en fait, le verre est un liquide qui ne coule pas. Depuis, par sécurité, il ne boit que dans des gobelets en étain.




1042 dimanche 19 janvier2025


Superstitieux mais néanmoins virils 


A la fin de chaque cours de pieternelle auquel leurs épouses respectives les traînaient hebdomadairement depuis un trimestre déjà, ils se trouvaient près de défaillir de soif. Aussi, était ce une question de vie ou de mort avaient-ils expliqué à leurs conjointes, qu'après avoir vaillamment pieterneller, ils devaient impérativement se désaltérer, avant de penser pouvoir  rallier le foyer conjugal. Ils se dirigeaient donc d'un pas preste et décidé vers l'estaminet qu'ils avaient repéré il y a trois mois et qu'ils fréquentaient désormais chaque semaine. A peu de distance de ce dernier, l'un des deux déshydratés prit la parole.

  

- « Dikastès, j'aimerais te demander quelque chose. »


- « Demande-moi, Hylotomos. »


- « Alors voilà : est-ce que tu crois que les femmes portent malheur ? »


- « Hein ? »


- « Est-ce que tu crois que les femmes portent malheur ? »


- « Mais d'où te vient une question aussi étrange ? » 


- « Ecoute, tu connais le Titanic ? »


- « Bien sûr, cependant je ne vois pas le rapport ni avec ton histoire de porteuses de malheur, ni même avec le maroilles. » 


- « Les marins pensent qu'une femme sur un bateau porte malheur. Sur le Titanic, il y avait plein de femmes, eh ben le Titanic a coulé. »  


- « Et du coup, tu estimes qu'il existe un lien de cause à effet ? » 


- « Je m'interroge. Tiens, dans le même ordre d'idée. Une étude menée aux Etats-Unis sur les ouragans a mis en évidence que ceux portant un prénom féminin sont trois fois plus meurtriers que ceux désignés par un prénom masculin. »


- « Je reconnais que tout cela donne à réfléchir. Nous qui sommes mariés à des femmes, nous ferions peut-être bien de nous chacun acheter un fer à cheval. Juste comme ça, au cas où... »  



1041 samedi 25 janvier2025


Idée géniale


Des civilisations d'hier, aujourd'hui disparues, ont laissé des vestiges, aux quatre coins de la planète. Le caractère monumental de plusieurs d'entre eux semblent défier les capacités technologiques de leurs siècles. Tout naturellement, cela amène certains à s'interroger. Comment diable s'y sont-ils pris pour ériger les dolmens, Stonehenge, les pyramides, les murs de la forteresse de Sacsayhuamán, j'en passe et des meilleurs ? Ne trouvant aucune réponse rationnelle à cette question, parmi ces certains, certains ne voient qu'une explication : ces réalisations sont dues à des extraterrestres. Eux seuls possédaient les maîtres d'œuvre , les engins de chantier, les gars du bâtiment, capables d'effectuer des travaux aussi colossaux. 


Que dans des temps très lointains, des êtres du cosmos fussent venus en villégiature en Bretagne, en Angleterre, en Egypte, au Pérou et ailleurs,  ne lui posait aucun problème. Par contre, qu'ils se fussent lancés dans le BTP durant leurs vacances, là, il bloquait. Tout d'abord,  chacun sait qu'en  matière d'architecture, les compétences d'un touriste, même cosmique, ne cassent pas trois pattes à un canard. Elles se limitent aux pâtés de sable et, pour les plus doués, aux châteaux, également de sable. Ensuite, il avait du mal à concevoir que l'on puisse se taper un voyage de plusieurs milliers d'années-lumière, aux seules fins d'épater les foules en jouant au bâtisseur    de l'impossible. Enfin et surtout, il ne supportait pas que l'on puisse se permettre de penser que son arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père ait été trop couillon pour bâtir lui-même des trucs maous.


Par exemple, expliquait-il, les dalles de pierre blanche de 200 tonnes constituant les fondations de la Cité Interdite de Pékin, construite au Moyen Age, proviennent de la ville de Fangshan, située à 70 km de la capitale chinoise. Des chercheurs ont récemment découvert un document de cette époque, montrant de quelle manière les Chinois ont transporté ces énormes blocs rocheux. Au bord de la route allant de Fangshan à Pékin, ils ont creusé des puits tous les kilomètres. Puis, ils ont attendu le mois de janvier où la température moyenne se situe à -4 degrés. Ils ont alors versé l'eau des puits sur la route. Sous l'effet des températures négatives, elle a gelé, créant ainsi une piste de glace sur laquelle ils ont pu faire glisser leurs gigantesques roches.  

  

Donc, les fils du Céleste Empire n'ont eu nul besoin d'un coup main d'E.T, surtout qu'E.T n'a que quatre doigts.



1042 - Dimanche 26 janvier2025


C'était mieux avant


Des gens et même des individus se répandent en maint propos sur la vérité de mon être profond, soliloquait-il. Ils ne possèdent aucun doute sur ce qu'ils appellent ma vraie nature. Ils affirment hautement l'avoir mise au jour et bien cernée. En sus de considérer que ces pékins feraient mieux de s'occuper de leurs oignons, je ne me reconnais nullement dans l'image qu'ils ont de moi. Je la réfute avec toute la force d'un taureau charolais haltérophile. Ils m'envisagent sous un jour qui ne saurait sérieusement me correspondre. 


Ces ahuris me croient rétrograde. Ils en veulent pour preuve que, selon eux, j'idéaliserais le passé par rapport au présent. Je préférerais le mode de vie, les us et coutumes, les valeurs, d'antan. Je me montrerais réticent au changement, au progrès. Je refuserais de m'adapter aux évolutions de la société. En un mot, je serais un anachronique figé dans la nostalgie d'ères révolues, comme le pâté de tête l'est dans sa gelée.  Tout ceci n'est qu'une vision exagérément démesurée des choses qui ne correspond à aucune réalité. 


En fait d'horrible conservateur attardé, je ne suis, d'abord, qu'un simple citoyen qui aime le maroilles au lait cru. Ensuite, je pense humblement que nos Anciens effectuaient les choses plus simplement. Ils n'éprouvaient pas, comme nous, le besoin de déployer des débauches de technologies. Par exemple, quand, le 21 novembre 1921, il fallut assurer le premier ravitaillement en vol d'un avion, un certain Wesley May s'équipa d'un sac à dos contenant un bidon de 20 litres d'essence. A un peu plus de 300 mètres d'altitude au dessus des côtes de Californie, il se laissa tomber de l'aile d'un Lincoln Standard sur celle d'un Curtiss JN-4, puis il vida tranquillement le bidon d'essence dans le réservoir. Voilà, c'est tout, les gars de cette époque ne se compliquaient pas la vie. 



1043 - Samedi 01 février 2025


Effondrement des certitudes


Il aidait son ami à récolter ses derniers chicons. Il lui avait d'ailleurs également prêté main-forte pour leur forçage. Après un peu plus, mais guère moins, d'environ un bon moment, ils s'accordèrent une pause, juste le temps de manger sur le pouce deux maroilles chacun. Chose qui ne lui ressemblait guère, son camarade affichait l'air perdu du gars   qui ne se rappelle plus où il a garé sa voiture sur le parking d'Auchan, avant de se rappeler qu'il était venu à pied. Aussi, lui demanda-t-il avec bienveillance :             


- « Euteikhès, me trompe-je ou tu ne m'as pas l'air d'être dans ton assiette ? »        


- « En effet, Orissos, tel que tu me vois, je me sens plus désorienté qu'une boussole démagnétisée. »   

 

- « Bigre, comment se fait-il que te voilà dans un si inconfortable état ? » 


- « Depuis hier, je doute de tout ce à quoi je croyais jusqu'à aujourd'hui. »


- «  Mon Dieu ! Seigneur ! Ciel ! Fichtre ! Ouah ! Oh !  »


- « Oui, c'est dur, très dur. Je vais t'expliquer. Pour toi, une tomate, c'est quoi ? »


- « Ben, un fruit »


- « Bien et une endive ? »


- « Ben, un légume »


- « Une carotte ? »


- « Ben, un légume itou»


- « Comme toi, je le pensais aussi, mais elle ne l'est plus, d'où mon terrible désarroi existentiel. »


- « C'est quoi ce délire ? »


- « Parce que la réglementation de l'U.E définit la confiture comme un produit à base de fruits, le Conseil de l'Union européenne a décrété, en novembre 1988,  que la carotte était un fruit, afin que le Portugal  puisse vendre ses confitures de carottes sous ce nom. »


- « Ah, oui ? Et parce qu'on fait de la confiture de lait, ils vont venir nous raconter que nos vaches sont une variété de fraisiers à cornes ? »  


 

1044- Dimanche 02 février 2025


Ein gesunder geist in einem gesunden körper


Mens sana in corpore sano, il ne se montrait nullement contre, au contraire, il se déclarait ouvertement pour. Il ne voyait en cela rien d'original. A sa connaissance, il n'existait personne pour contester ce principe de Juvénal. Qui irait conseiller aux foules de joyeusement se    détruire le mental et le physique ? L'homme de bon sens sait d'instinct où se trouve son intérêt. 


Il n'en demeurait pas moins, qu'il pensait la chose plus facile à dire qu'à faire. Pour le corpo sano, sans vouloir se vanter, il s'en sortait plutôt bien. Il veillait à avoir une alimentation bio et bienfaisante. Il ne mangeait pas cinq fruits et légumes par jour, mais dix, ainsi que dix larges tranches de maroilles. Il s'adonnait régulièrement à plusieurs activités sportives. Du lundi au vendredi, de 18h00 à 20h00, il pratiquait le javelot et chaque samedi après-midi, il jouait au billon. Il ingurgitait quotidiennement cinq litres d'eau. Plus précisément, il consommait celle présente dans les cinq litres de bière qu'il s'enfilait dans la journée.


Une seule règle pour maintenir son corpos sano lui posait problème : ne pas fumer. Non pas que cela lui parut difficile, mais en le faisant, il craignait de porter  atteinte à sa men sana. Dans les années 1930, les nazis menèrent très sérieusement une grande campagne antitabac en Allemagne. Ils imposèrent une taxe sur le tabac et les allumettes. Ils interdirent de fumer dans certains lieux publics, comme les bus, les tramways, les restaurants, les hôpitaux. Hitler lui-même détestait le tabac et ne permettait pas que l'on fumât en sa présence. Dans ces conditions, se demandait-il, dans la mesure où tendre le bras vous transformait immédiatement en nazi, ne risquait-on pas également de le devenir si l'on ne fumait pas ?   



1045- Samedi 8  février 2025


Joyeux Teutons volants


- « Monsieur Morphile Bovinoderme s'enorgueillit d'être producteur de bentazothinile de bismutholinophénole, molécule destinée, comme nul ne l'ignore, au traitement de l'hoplophobie. Habitant à Raillencourt-Sainte-Olle, il a pris le TUC de 7h09, pour venir nous toucher un mot d'un fait historique injustement méconnu. Il va nous conter cela pas plus tard que tout de suite. Alors, ne perdons pas de temps, Morphile, touchez, touchez-nous, sans attendre. » 


- « Aérien Nervien, que pouvez-vous me dire des L44, L45, L49, L50 et L55 ? »  


- « Peu de choses, aérophile Morphile, car contrairement au Maroilles, je n'en sais pratiquement rien. Je peux seulement vous raconter qu'il  s'agissait de dirigeables militaires allemands Zeppelin de la classe P. Ils faisaient 163,50 m de  long, pour un diamètre de 18,69 m et un volume de       32920 m3. Leur plafond de service se situait à 3500 m. Entre parenthèses, le L55 le dépassa largement en atteignant l'altitude record de 7300 m. Leurs 4 moteurs Maybach 3M C-X de 6 cylindres en ligne de 210 ch     permettaient de voler à une vitesse maximum de 92 km/h. Les équipages comptaient 19 hommes. Ils possédaient un armement composé de 7 ou 8 mitrailleuses. Ils pouvaient emporter 2000kg de bombes. »


- « Et quand vous connaissez bien un sujet, c'est comment ? Je pense que vous devez être également au courant de ce qu'il advint de ce quintette de L. »


- « A la vérité, mon bon Morphile, je n'en ai absolument aucune idée. »


- « C'est pas vrai ! Donc, faut que je vous narre. Les L44, L45, L49, L50 et L55 firent partie d'une flotte de onze dirigeables partit bombarder l'Angleterre, dans la nuit du 19 au 20 octobre 1917. Ce raid causa la mort de 36 civils et de deux chevaux. »


- « Tiens, les Allemands ont massacré du non militaire alors qu'ils n'étaient pas encore nazis ? » 


- « Ils ont exécuté plusieurs milliers de civils, y compris des femmes et des enfants, en Belgique et chez nous, dans le Nord, dès 1914. Pour en revenir à  nos onze grosses baudruches germaniques, sur le chemin du retour, six d'entre elles se sont égarées dans la nature. Les L44, L45, L49, L50 et L55, se sont, eux, retrouvés au-dessus de la France. Les servants de DCA et les pilotes de chasse français se firent un devoir d'en abattre un et de forcer les quatre autres à se crasher. L'un de ces quatre derniers manqua son atterrissage forcé, repris l'air et dériva jusqu'au cœur de la Méditéranée d'où il ne revint jamais. »  


- « Une justice immanente avait vengé les victimes britanniques. »


- « Je ne crois pas.»


- « Pourquoi ? »  


- « Eh bien, que ces onze Zeppelin  soient pour les uns partis à Tataouine et pour les autres vers l'espace aérien français, ne doit rien au hasard. Pour assurer leur navigation, les Zeppelin n'utilisaient pas un GPS ou un Tomtom, mais la radiogoniométrie. Les stations de brouillage, secrètement créées par le colonel Gustave Ferrier, ont détecté les onze dirigeables, puis déréglé les signaux radio les guidant. Concernant les L44, L45, L49, L50 et L55, elles sont, en plus, parvenues à les amener à mettre le cap sur les lignes françaises. Le commandement allemand, fort marri de ce fiasco aérostatique, n'envoya plus jamais de Zeppelin sur l'Angleterre. Par ailleurs, cette histoire nous montre que l'on n'a pas attendu les Américains et les années 60 pour inventer la guerre technologique. » 

 

- « De toute façon, dans les années 60, on a rien inventé d'intéressant, exception faite, bien sûr, du tricotin. »

  

Commentaire


Mon ami, Gustave Ferrié a évité à ma tour d'être démontée, en convainquant  l'Armée d'y installer un récepteur de télégraphie sans fil. Si le cœur vous en dit, vous pouvez visionner un film d'époque montrant   les restes du L44 abattu par la DCA et le L49 après son attérrissage forcé, en allant sur : 

https://imagesdefense.gouv.fr/fr/la-fin-d-un-raid-19-20-octobre-1917.html


Gustave Eiffel

 


1046- Dimanche 09 février 2025


C'est bon pour la santé et le moral 


Qu'existe-t-il qui vaille la peine que nous lui accordions quelque intérêt, se demandait-il, en passant une peau de chamois 100% polyuréthane sur les vitrines d'exposition de sa collection de maroilles ? Eh bien, se répondit-il, Ie sport ! Oui, le sport, ça, c'est bien. Il stimule la sécrétion  d'endorphine, de dopamine, d'adrénaline. Ce sont des hormones qui favorisent la réduction du stress, améliorent la qualité du sommeil, amenuisent les douleurs et agissent comme antidépresseur. Le sport représente un bienfait et même, n'ayons pas peur des mots, un facteur de plaisir, en tout bien tout honneur.


Et se trouve-t-il quelque chose d'autre que nous puissions estimer autant que le sport ? Non... Je ne vois pas... Ah, si... pardon, il y a l'humour, ça aussi, c'est bien. Rire fait travailler de nombreux muscles, dont le cœur et les abdominaux, avec une intensité comparable à un exercice physique modéré. Ce qui, allié à la sensation de bien-être qu'il procure, permet de brûler des calories. De plus, le rire accroît les défenses de l'organisme en favorisant l’oxygénation du sang, en réduisant le cortisol et en  augmentant le taux d'anticorps. 


Tout cela me fait penser au Tunnel. Il s'agit d'une course à pied organisée chaque année, en Angleterre, à Bath. Les participants courent en boucle le long des 2,5 km d'un ancien tunnel ferroviaire, plongé dans une obscurité et un silence complets. Ils n'ont le droit de porter sur eux qu'une lampe frontale. Les montres, les écouteurs, ou tous autres accessoires, sont interdits. Ils doivent parcourir 321 km en 55 heures  maximum. S’ils n'ont pas atteint les 160 km dans un délai 27 h 30, ils sont purement et simplement éliminés. Le taux d'abandon atteint 95 %. En 2019, un seul participant parvint à franchir la ligne d'arrivée.


Cette épreuve est la seule qui, à ma connaissance, allie sport et humour, parce que les conditions dans lesquelles elle se déroule, j'en suis persuadé,  ne peuvent être qu'une grandiose expression du merveilleux et si particulier humour anglais.



1047- Samedi 15 février 2025


Un vrai chef ne commande pas, il se fait obéir1


Ils furent tous pris d'une illumination lorsque, dans la Vie de Calligula, de Suetone, leur livre de chevet, ils lurent : Omnes Germanico corporis animique uirtutes, et quantas nemini cuiquam, contigisse satis constat : formam et fortitudinem egregiam, ingenium in utroque eloquentiae doctrinaeque genere praecellens, beniuolentiam singularem conciliandaeque hominum gratiae ac promerendi amoris mirum et efficax studium. 

Ou autrement dit : On sait que Germanicus réunissait, à un degré que n'atteignit jamais personne, tous les avantages du corps et les qualités de l'esprit, une beauté et une valeur singulières, une profonde érudition et une haute éloquence dans les lettres grecques et les lettres latines, une bonté d'âme admirable, le plus grand désir de se concilier et de mériter l'affection de ses semblables, et le plus merveilleux talent pour y réussir. 


De ces lignes ressortait une conclusion évidente. Elle crevait les yeux. Leur adjudant était purement et simplement la réincarnation, en mieux,  de Germanicus. Le savait-il ? Si tel n'était pas le cas, fallait-il l'en informer ? Ces questions occupaient leurs esprits tandis qu'il arrivait au rassemblement.


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, je tenais à vous donner un conseil aussi paternel qu'essentiel. Méfiez-vous comme de la peste de celles ou ceux qui se montrent sympa avec vous. » 


- « Même s'il s'agit de gens qui nous offrent du maroilles, mon adjudant ? »  


- « Non, pas eux, soldat, par contre, pour tous les autres, oui, si vous en rencontrez, je le réaffirme et j'insiste, tenez-vous fermement sur vos gardes ! Ils cachent leur vrai visage derrière leur soi-disant affabilité, afin de mieux vous embobiner »


- « Mon Germanicus, pardon, je voulais dire, mon adjudant,         pourriez-vous nous donner un exemple susceptible d'illustrer vos propos ? »


- « Fort de l'autorité dont je suis réglementairement investi, je pourrais te répliquer : et pis quoi, encore ! Cependant, pour être adjudant, je n'en suis pas moins pédagogue dans l'âme, aussi vais-je répondre à ta demande, sergent . » 


- « Vous êtes trop bon, mon adjudant. »


- « Je sais. Or donc, durant la Seconde Guerre Mondiale, Hanns Schaff,  obergefreiter dans la Luftwaffe, était le responsable des l'interrogatoires de pilotes alliés abattus et capturés en France ou en Allemagne. Il se montrait particulièrement gentil avec ces derniers. Il allait même jusqu'à partager avec eux les petits plats préparés par son épouse. Cette ligne de conduite s'opposait totalement à celle des agents de la gestapo ou de l'abwehr qui usaient fort largement de l'intimidation et de la torture » 


- « Veuillez m'excuser, mon adjudant, mais qu'est-ce qu'un   obergefreiter ? »


- « C'est un caporal, caporal. N'allez surtout pas croire qu'Hanns refusait la manière forte parce qu'il était un bon petit gars rempli à ras bord d'empathie et de bonté d'âme. Il appliquait cyniquement les principes d'une étude, qui avait démontré qu'il était plus facile de faire parler un prisonnier en se montrant amical avec lui, plutôt qu'en le malmenant. »


- « Sinon, qu'est-ce que vous pensez de Germanicus et de la réincarnation, mon adjudant. »


- « Hein, quoi ? »


1 : je sais, ce titre n'a rien à voir avec le sujet, mais il me plaisait bien - Note de Nervien



1048 - Dimanche 16 février 2025


« Un homme ne se mêlant pas de politique mérite de passer, non pour un citoyen paisible, mais pour un citoyen inutile»


D'un naturel pondéré, il ne se laissait pas facilement aller à critiquer son prochain. Il se refusait toujours à lui jeter la première pierre, d'autant plus que, très maladroit, il était pratiquement assuré de le rater. Il ne jugeait jamais d'autrui à la légère. Il rejetait les primes impressions et les présupposés. Par exemple, il pensait que l'on ne devait pas qualifier un individu de créature putride et répugnante, simplement parce qu'il n'aimait pas le maroilles. Même si pour ne pas aimer le maroilles, il fallait forcément être une créature putride et répugnante. 


Pourtant, malgré cette réelle volonté de ne point accabler à priori ses semblables, certaines gens ne trouvaient d'emblée aucune grâce à ses yeux. Elles se répartissaient en quatre catégories : les non-respectueux des lois dont le comportement nuisait à la société, les désengagés civiques qui refusaient de s'intéresser au débat public, de voter, les individualistes qui privilégiaient leurs intérêts privés au détriment du bien-être collectif, les indifférents qui se fichaient des injustices, des  inégalités. En résumé, il n'aimait pas et condamnait tous ceux qui se comportaient en mauvais citoyens.


Sans se considérer meilleur qu'un autre, lui, se voulait un citoyen scrupuleusement irréprochable. Il se masquait, se vaccinait, baissais, éteignais, décalais. Aussi à l'heure où le gouvernement de la République cherchait désespérément de nouvelles ressources fiscales, il ne pouvait qu'apporter sa contribution. Il envoya un courrier au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Dans cette missive, il lui suggérait respectueusement de s'inspirer d'Henri VIII d'Angleterre. En 1535, ce roi décréta une taxe sur les barbes. Elle était fonction de la position sociale du barbu et de la longueur de sa pilosité. Elisabeth Ier, sa fille, réduisit le nombre des assujettis à cette contribution en ne l'imposant qu'aux barbes de plus de quinze jours.


Afin de résoudre les problèmes budgétaires du pays, il lui semblait que la remise au goût du jour de cette taxe sur les barbes, était vraiment une idée au poil.  


1: c'est pas moi qui le dit, c'est Thucydide - Note de Nervien  



1050 - Samedi 22 février 2025


Gros Bison Mâle qui se Roule dans la Poussière1 dit : eau de feu, dangereux, hugh !


Pour être triviale, la formule n'en convenait pas moins à décrire parfaitement la situation : il n'était pas le dernier à lever le coude. D'ailleurs, la fréquence avec laquelle il pratiquait aurait, sans aucun doute, valu une sérieuse tendinite à tout autre que lui. Il ne faisait cependant pas partie des boit-sans-soif, des picoleurs, des pochards, décérébrés. Sa consommation de boissons alcoolisées s'inscrivait dans le cadre d'une véritable réflexion intellectuelle. Il considérait l'alcool comme un vecteur de partage, de convivialité. Il facilitait l'expression, libérait la parole. Il permettait également de communier avec l'âme d'un terroir, d'une province, d'un pays. 


Pourtant, le jour de la Saint-Louis, il avait pris la décision de se mettre au régime sec. Dès lors, pas une seule goutte de raide ne franchit ses lèvres. Ce revirement, aussi brusque qu'inattendu, en avait surpris plus d'un. Dans les milieux autorisés, il se murmurait, sous le sceau du secret, qu'il avait été touché par le message des mouvements de tempérance, comme les apôtres le furent par l'Esprit Saint. Il lui aurait fait prendre conscience des effets négatifs des spiritueux sur l'individu, la famille et la société. Voilà pourquoi il s'était engagé sur la voie de l'abstinence éthylique. 


Eh bien, absolument pas, la vérité, la seule, la vraie, était que, depuis qu'il avait eu connaissance d'une certaine histoire, l'alcool lui fichait une trouille de tous les diables. Dans la nuit du 2 au 3 juillet 2019, la foudre déclencha un incendie dans l'entrepôt de la distillerie Jim Beam, dans le Kentucky. Le sinistre détruisit 45000 tonneaux. Près de  trois millions de litres de bon bourbon se déversèrent alors dans la rivière adjacente. Le cours d'eau gorgé de whisky s'enflamma lorsqu'il fut à son  tour frappé par la foudre. Comme si cela ne suffisait pas, il fut touché par une tornade qui, à son contact, se transforma en un tourbillon feu qui embrasa la forêt avoisinante.


Si je ne veux pas un jour risquer de finir brûlé vif, avait-il pensé en frissonnant de peur, il faut que je me mette au vitmo, au soda à la crème, à la salsepareille, à l'infusion de bardane, ou bien à la limonade de pissenlit. Si je n'y arrive pas, alors je n'aurai d'autre solution que de me laisser mourir de soif. Bon sang ! Mais pourquoi l'alcool demeure-t-il  inflammable tandis que le maroilles a toujours été ignifugé  ?


1 : Gros Bison Mâle qui se Roule dans la Poussière est le chef de la tribu indienne des Padsachémoa  - Note de Nervien


 


1051 – Dimanche 23  février 2025


N'importe qui ne peut pas faire n'importe quoi


Rien ne l'énervait davantage que ce discours laissant à croire que l'on pouvait passer d'une profession à une autre aussi facilement que vous passez de votre salle à manger à votre salon. Une telle idée méritait haut la main la palme d'or de l'ineptie. On ne pouvait sérieusement penser changer d'activité comme on change de chaussettes. Il ne suffisait pas d'un claquement de doigts pour qu'un professeur devînt plombier, un pâtissier, couvreur-zingueur, ou un chirurgien, fabricant de maroilles.


Démonter et remonter un moteur de machine à laver, tailler un arbre, faire une pièce-montée ou assurer la circulation d'un train, c'est un métier. Et quel que soit le métier, il faut du temps et de la sueur pour l'apprendre, du temps et de la sueur, il en faut encore pour acquérir la précieuse expérience qui permet de pleinement le maîtriser. Ceux qui ignorent des principes aussi basiques, sont gens de peu qui n'ont de supérieur que leur niveau de débilité. On devrait, fulminait-il, obliger ces démoulés trop chaud à s'enfoncer dans leurs crânes d'oeuf l'histoire de Percy Terry. S'ils sont  capables de comprendre quelque chose à quoi que ce soit, elle leur apprendrait, la réalité des choses.


Durant la Première Guerre mondiale Percy Terry, Américain de son état, voulu créer une crème pour la peau. Il mit ainsi au point un onguent qu'il testa le 28 août 1915. Il l'appliqua sur l'une de ses joues, qu'il avait déjà enduite tous les jours, pendant une semaine. Puis, il tira trois balles de révolver dans la joue susdite. Oui, parce que sa crème devait rendre la peau résistante aux coups de feu. Bon, finalement, les trois balles lui transpercèrent la joue sans encombre. Pas vraiment satisfait de ce résultat, mais pas découragé pour autant, notre gaillard estima qu'il devait réitérer l' expérience en son modifiant le mode opératoire. Il entreprit donc d'effectuer un second essai avec un fusil de chasse, chargé de cartouches à plomb. Ce tir lui arracha complètement la partie inférieure du visage  Il mourut le 29 août 1915, à l'hôpital où il avait été transporté inconscient. 

  

Voilà ce qui, malheureusement, arrive lorsque l'on s'improvise dermatologue.  



Bêtise 1052 - Samedi 1 mars 2025


Une belle bande de von


Monsieur Raymondien Mairesy de Riain possède un vaste ranch à Doignies. Il y élève des hypsignathes monstrueux, également appelés hammer-headed fruit bats par les Texans . Passionné d'Histoire et de démolition à l'explosif, mais aussi altruiste distingué, Raymondien se propose de laisser le fort Noroit de son savoir gonfler le grand hunier de nos connaissances. Or donc, Raymondien, illustre  Doigniesien, allez-y, gonflez, gonflez-nous, bien. »  


- « Dans les choses qui se ouïssent dire sur les débuts de la Première Guerre mondiale, il s'entend couramment évoquer l'implacable solidité des généraux de l'état-major général du kaiser et l'excellence de leur plan Schliffen. »


- « J'ai effectivement ouï dire ces choses. »


- « Voilà pourquoi je propose que le fort Noroit de mon savoir vienne  gonfler le grand hunier de vos connaissances. Guillaume II nomma à la   la tête de cet état major, le comte Helmuth Johann Ludwig von Moltke. Perso, je n'aurais pas pris dieser typ. »


- « Warum ? » 


- « Parce qu'il se trouvait physiquement et intellectuellement diminué, à cause de problèmes de santé provoqués par son foie et son gros intestin. De plus et surtout, le generalstabschef von Moltke était malade des nerfs. Plutôt gênant pour un gaillard devant occuper un poste qui justement demande des nerfs d'acier. » 


- « Bien que germanique, il n'avait pas la deutsche qualität. »


- « Effectivement et on pourrait affirmer la même chose des kamaraden qui composèrent son état major. Il choisit d'abord, von KlucK, 68 ans, qui pensait avant tout retraite bien mérité plutôt que service actif en temps de guerre. Alexander von Khul, l'un des meilleurs élèves du comte Alfred von Schlieffen et théoricien remarquable, ne possédait cependant aucune expérience du terrain. Karl von Bülow, tout comme KlucK, était âgé de 68 ans et souffrant d'artérosclérose, il n'était pas au mieux de sa forme, tout comme Moltke. Hermann von Stein n'avait rien à envier à Bülow. Il souffrait de la maladie de Basedow qui lui causait, entre autres, des crises à répétition de tachycardie et de nervosité. »   

 

- « Les amateurs de foot crieraient : waouh ! la mannschaft de rêve ! Maintenant, il me semble que l'alter ego français de Moltke, Joseph Joffre, n'était pas non plus la baïonette la plus pointue de l'armurerie. » 


- « Si vous me le permettez, j'aimerais aborder le cas de cet éminent officier général, demain. Pour l'heure, je dois vous quitter et enfourcher mon mustang, afin de m'en retourner nourrir mes troupeaux d'hypsignathes monstrueux. » 


- « Bon alors, à demain, et je souhaite un bon appétit à vos hypsignathes monstrueux1. »    


1: ayant interrogé Raymondien à ce sujet, je peux répondre à ceux qui se posent la question : non les hypsignathes monstrueux ne se nourrissent pas de maroilles - Note de Nervien


Bêtise 1053 - Dimanche 2 mars 2025


Attaquons, attaquons, attaquons ! 1


- « Cher Raymondien Mairesy de Riain, j'espère que vos sympathiques hypsignathes monstrueux, bien qu'ils ne se nourrissent point de maroilles, ont bien mangé, ont bien bu, ont la peau du ventre bien tendu. Nous sommes à nouveau prêts à laisser le fort Noroit de votre savoir gonfler le grand hunier de nos connaissances.»


- « Or donc, que dire de Joseph Joffre ? Il n'avait qu'un mot d'ordre : attaquons, attaquons, attaquons ! En cela, il résumait sa volonté de   scrupuleusement appliquer le principe de l'offensive à outrance, alors enseignée à l'école de guerre.  

 

- « L'offensive à outre rance ? »


- « Non, à outrance, concrètement, il s'agissait de lancer à l'assaut de belles lignes de fantassins, en terrain découvert, sans appui feu ou soutien d'artillerie. Evidemment, face aux tirs des mitrailleuses et des canons allemands, ces charges conduisirent au massacre de dizaines de milliers d'hommes, sans que cela perturbe les certitudes tactiques et trouble la quiétude du sommeil de ce brave Joffre. Il faut dire que rien ne pouvait le contraindre à ne pas ronfler consciencieusement. Par exemple, quand l'ennemi arriva à moins de 80 km de Paris, cela ne l'empêcha pas de faire sa bonne grosse nuit quotidienne de douze heures.  Visionaire, il fit prendre quatre mois de retard dans la livraison des casques, parce qu'il prévoyait que la guerre serait terminée avant qu'ils ne soient livrés aux soldats. »


- « Cher Raymondien, dès lors, je me pose une question : comment diantre, est-on parvenu à gagner la bataille de la Marne avec aux commandes un traineur de sabre aussi ras du képi ? »


- « Premièrement, il bénéficia des actions menées sur le terrain par de   bons généraux, tel que Maunoury, Castelnau, qui fut celui qui sauva réellement Verdun, en 1916, ou Lanzerac, qui exprima en une phrase ce que lui et nombre de ces collègues pensaient de Joffre : attaquons, attaquons, attaquons, comme la lune. Deuxièmement, il fut aidé par le plan Schliffen lui-même. »


- « Hein ! »


- « Oui, les meilleurs stratèges allemands à l'origine de ce plan réfléchi, organisé, peaufiné, pendant 23 ans, avaient calculé que la traversée de la Belgique ne prendrait que deux jours. La rapidité de cette avancée, priverait l'Armée française du temps nécessaire pour se porter sur sa frontière nord, ce qui permettrait de s'emparer de Paris en quatre jours. En fait, les Belges arrivèrent à s'opposer héroïquement à l'armée du kaiser durant 12 jours, du coup, ensuite, pour prendre Paris en 96 heures... Et puis et surtout, comme l'a écrit Kluck dans ses mémoires en parlant des soldats français : que des hommes ayant reculé pendant 15 jours, que des hommes couchés par terre et à demi-mort de fatigue puissent reprendre le fusil et attaquer au son du clairon, c'est une chose avec laquelle, nous autres Allemands, n'avions jamais appris à compter, c'est là une possibilité dont il n'a jamais  été question dans nos écoles de guerre. Ces hommes, vous pouvez lire les noms de milliers d'entre eux sur nos monuments aux Morts. »


1: voir  bêtise 1052 du samedi 1 mars  février 2025



Bêtise 1054 - Samedi  8 mars 2025


S'il y a bien un jour pour en parler , c'est bien aujourd'hui 


Qu'évoque en mon for intérieur la date du 8 mars, s'introspectait-il ? Me rappelle-t-elle cet an de grâce 960, année bénie de la naissance du maroilles ? Non et cela pour une simple et bonne raison. Si je ne doute pas un seul instant de l'apparition du maroilles en 960, par contre, je me montre, pour le moins, incertain sur le fait que ce divin avènement survint précisément un 8 mars. En revanche, je sais avec certitude que la saint-Jean de Dieu se fête ce jour-là. Néanmoins, lorsque je pense 8 mars, je ne pense pas en premier lieu à la Saint-Jean Dieu.


Alors, à quoi songé-je ? A la naissance d'Amago Haruhisa, en 1514, à la promulgation, en France, de la loi de 1886 rendant fériés les lundis de Pâques et de Pentecôte, ou alors au début de la Révolution de Février, en 1917, à George Ati Sokomanu qui redevint président de la République du Vanuatu en 1984, au département des Côtes-du-Nord qui changea son nom en Côte d'Armor, en 1990, à cette astéroïde de 50 mètres de diamètre qui passa à 463000km de la Terre, en 2002 ? Que nenni point, ce qui me vient à l'esprit est le nom de Marie Adrienne Anne Victurnienne Clémentine de Rochechouart de Mortemart duchesse d'Uzès. 


Pourquoi donc, me demandera-t-on ? Eh bien, il se trouve que le 8 mars est la journée internationale des droits de la Femme. En ce jour, nous honorons joyeusement les femmes et les filles du monde entier et nous saluons, bien bas, tous les résultats qu'elles ont obtenus dans la lutte pour l'égalité. Or, pour moi, Marie Adrienne Anne Victurnienne Clémentine de Rochechouart de Mortemart duchesse d'Uzès représente l'une des figures majeures, sinon la figure majeure, de la cause féministe. Non pas parce qu'elle fut, tout à la fois, héritière de la maison de champagne Veuve Clicquot, lieutenant de louveterie, maître d'équipage de vénerie et soutien actif du général Boulanger, mais parce qu'elle fut la première femme titulaire d'un permis de conduire, en 1897.


Afin que ce portrait soit complet, je dois ajouter, sans qu'il faille y voir  une marque de misogynie de ma part, qu'elle fut également, un an plus tard, en 1898, la première personne à recevoir une contravention, à la suite d'un  excès de vitesse.


Bêtise 1054 - Dimanche  9 mars 2025


« Je me souviens »


Ansfride et Arhnegonde, leurs épouses respectives, ayant décidé d'effectuer conjointement quelques emplettes, en maris serviables et attentionés, ils  acceptèrent courageusement de les accompagner au supermarché. Cependant, nul n'étant tenu à l'impossible, ils ne poussèrent pas l'esprit de sacrifice jusqu'à franchir avec elles l'entrée de la grande surface commerciale. Respectueux de leurs viriles coutumes ancestrales, ils les attendirent sur l'aire de stationnement, tranquillement assis dans la voiture. Ils entamèrent une conviviale conversation afin de tromper la longue attente qu'ils allaient immanquablement subir (parce que les femmes, quand elles font les magasins, même si c'est pour juste acheter un morceau de maroilles, bon, ben, hein, vous m'avez compris).


- « Crinippos, réponds-moi en toute franchise et sans honte : depuis combien de temps n'as-tu pas dédié l'une de tes pensées à la Belle Province ? »


- « A qui ? »


- « La Belle Province, le Québec, si tu préfères. »


- « Ah, d'accord, eh bien Boubalos, figure-toi que je pense très, très, souvent au Québec, où plus exactement une actrice québécoise : Mélissa Désormeaux-Poulin. Bien entendu, ce que je te dis là, doit strictement rester entre nous. »  


- « Tu peux compter sur mon silence. Je resterai plus muet que le cinéma d'avant le 6 octobre 1927. Pour ma part, la Belle Province m'occupe souventement l'esprit, tant je me sens meurtris par le manque de considération dont elle fut victime. Par le traité de Paris, du 10 février 1763, Louis XV la céda à l'Anglais parce que l'on considérait qu'il ne s'agissait, comme l'écrivit Voltaire, que de quelques arpents  couverts de neige et de glace huit mois de l'année, habités par les barbares, les ours et les castors. Fallait vraiment être bête, et je suis poli, à bouffer du fumier avec des baguettes, pour sortir une connerie pareille, sans parler du côté insultant de la chose. » 


- « Oui, bien sûr, mais cela commence à dater, tout de même. »


- « Oui, mais plus près de nous, en 1967, monsieur Jean Drapeau, maire de Montréal, réussit à persuader le général de Gaulle d'exposer la tour Eiffel dans sa ville, à l'occasion de l'exposition universelle qui allait s'y tenir. Il prévoyait de démonter la tour, de lui faire traverser l'Atlantique en bateau et en pièces détachées, puis de la remonter en plein cœur de Montréal. Malheureusement, les responsables de la société gérant la tour Eiffel retoquèrent le projet. »


- « Tu m'étonnes, Simone, les gars ont tout de suite compris que le truc était injouable. »


- « Absolument pas, la raison de leur refus était qu'ils craignaient que les Québécois ne leur rendissent jamais leur tour. » 


- « Fallait vraiment être bête, et je suis poli, à bouffer du fumier avec des baguettes, pour sortir une connerie pareille, sans parler du côté insultant de la chose. »


- « Et puis, vu l'état actuel de la France, si on volait la tour Eiffel, ce n'est certainement pas à Montréal, en 1967, mais plutôt aujourd'hui et à Paris. » 



Bêtise 1055 - Samedi 15 mars 2025


Anti macho actif


La cause lui tenait si viscéralement à cœur, qu'il lui apportait un soutien d'une sauvage indéfectibilité. Cependant, cet appui demeurait uniquement verbal. Pourtant, il ne possédait pas de voeux plus cher que de le traduire en un acte concret et spectaculaire. Il souhaitait même le faire lors de la journée internationale dédiée à la cause en question. Malheureusement, à son plus grand regret, aucun de ses multiples louables efforts ne donnait de résultat tangible. Il avait beau se creuser la cervelle jusqu'au plus profond de chacun de ses neurones, il ne parvenait pas à trouver d'idée satisfaisante. 


Une fois encore, cette année, comme toutes les précédentes, le 8 mars se passa sans qu'il s'illustrât par une action retentissante. Une fois encore, la journée internationale des droits de la Femme se termina donc sans qu'il la marquât de son empreinte. Une fois encore, il se sentit tellement dépité qu'il allait perdre son bel appétit durant 48 heures. Dans un tel état d'abattement, il ne s'attendait pas à avoir l'illumination qui pourtant le frappa bel et bien. Elle lui procura une joie sans mélange, même s'il était ballot et rageant qu'elle survint le 9 mars.  


Or donc, cette inspiration lui suggéra de s'intéresser à Maria Anna Walburga Ignatia. Dès sept ans, la susdite Maria Anna Walburga Ignatia présenta d'évidentes dispositions d'enfant prodige. Outre qu'elle composait de la musique, elle jouait du clavecin et du piano forté avec une exceptionnelle virtuosité. Tous les publics des grandes villes d'Europe, dont Vienne et Paris, où son père la fit se produire, reconnurent avec enthousiasme son talent. Lorsque qu'elle atteignit l'âge de se marier, son paternel l'obligea à mettre un terme à ses activités musicales. Son frère ne fit rien pour la défendre. Il s'appelait Wolgang Amadeus et avait pour nom de famille Mozart, comme Maria Anna Walburga Ignatia, évidemment


Un telle attitude prouvait que le divin Mozart n'était rien qu'un sale gros dégoûtant de macho. Alors, quand reviendrait le 8 mars, il demanderait, au nom du droit des Femmes, l'interdiction de jouer ses œuvres musicales, ainsi que de vendre leurs enregistrements. Il exigerait également la débaptisation des rues portant son nom, le déboulonnage de ses statues, l'autodafé des livres parlant de lui, la destruction des réalisations tant cinématographiques, que télévisuelles, et radiophoniques, l'évoquant, le décrochage des tableaux le représentant, la lacération des t-shirts floqués de son portrait.

 

Oui, le 8 mars de l'année prochaine, il allait frapper un grand coup. Du moins le crut-il jusqu'au moment où un ami, qui pour sa part défendait les droits du maroilles, lui demanda laconiquement : « Et en quoi tout  ça va améliorer la vie des femmes, mon p'tit vieux ? ».

 


Bêtise 1056 - Dimanche 16 mars 2025


La guerre, c'est pas comme au cinéma 


Il se démarquait du commun par la majesté de son allure, son physique bien charpenté, son port altier, sa grâce féline, la finesse de ses traits, la noblesse de sa voix, sa démarche virile, son goût pour le maroilles. Il n'en tirait aucun orgueil et demeurait fort naturel et très simple, se montrant toujours mesuré en tout, ne se permettant jamais un mot ou un geste plus haut que l'autre, sans que cela n'entamât en rien la fermeté de son autorité. Voilà pourquoi, ils n'ignoraient pas, qu'où qu'il se trouvât, dans quelques milieux qu'il fût, on ne pouvait que se pâmer d'admiration devant leur adjudant, en face duquel, ils se trouvaient présentement au garde-à-vous. 


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, me connaissant comme vous me connaissez, je ne vous apprendrai rien en vous disant que parmi mes innombrables qualités, la cinéphilie n'est pas la moindre. »


- « Ah, ça ! c'est bien vrai que vous aimez beaucoup les chiens et puis les chats aussi, mon adjudant. »


- « Oui, mais là je vous parle cinéphilie, la passion du cinéma et pas  cynophilie, la passion des chiens, caporal. » 


- « Alors, en plus des chiens, vous aimez le cinéma, mon adjudant. Conséquemment vos films préférés sont certainement La fidèle Lassie et Didier. »


- « Entre autres, caporal, entre autres, cependant je ne veux pas vous exposer mes penchants filmiques mais vous faire profiter de ma longue expérience en matière d'art cinématographique. Les gars, ce qu'il vous faut avant tout retenir est que le cinéma peut légitimement faire l'objet de critiques. »


- « Vous pensez, au prix des places qui, contrairement au talent de nombre de producteurs, de scénaristes, de réalisateurs et d'acteurs, ne court pas à la baisse. Si ça continue, pour se payer une séance, faudra    bientôt vendre un rein de sa femme. Pas vrai, mon adjudant ? »  


- « Effectivement, caporal, effectivement, pour en revenir à notre sujet, j'attire tout particulièrement votre attention sur les n'importe quoi que l'on voit dans certains films dits de guerre, comme le coup des mines terrestres. Elles n'éclatent qu'après avoir fait entendre un petit clic sournois et que le gars qui lui a marché dessus relève bêtement le pied. En réalité, vous le savez tous, ces saloperies explosent sans crier gare et vous font mochement la peau, dès que vous avez à peine posé le bout de  votre ranger dessus. » 


- « C'est pour ça que moi je suis comme vous, mon adjudant, je préfère les films avec des chiens.»



Bêtise 1057 -  Samedi 22 mars 2025


« L'information est un pouvoir »


Bien que cela datât de ce fameux temps qu'il ne pouvait connaître parce qu'il avait moins de vingt ans, il n'en savait pas moins bien des choses, en somme, sur les primes années de la carrière de monsieur Jacques Dutronc. Par ailleurs, à l'instar de ceux qui avaient connu ce fameux temps que les moins de vingt ans ne pouvaient pas connaître, il aimait manger du maroilles, tout en écoutant, avec ravissement, les chansons de cet ex-aventurier qui rêve d'être une hôtesse de l'air quand Paris s'éveille.


Que cet artiste allie à la fois les talents de chanteur à ceux d'auteur et de compositeur, l'impressionnait, tout comme le fait que ses chansons les plus anciennes demeurassent étonnamment actuelles. A ce propos, rien ne l'agaçait tant que ces metteurs en scène de théâtre qui, à chaque fois  qu'ils veulent vous fourguer une vieille pièce toute moisie, vous parlent  de sa remarquable modernité. En réalité, ces blaireaux choisissent  des œuvres hors d'âge, tombées dans le domaine public, pour s'exonérer   des droits d'auteur.     


En 1967, monsieur Dutronc chantait déjà :  


On nous cache tout, on ne nous dit rien
Plus on apprend, plus on ne sait rien
On nous informe vraiment sur rien 


Quand d'aucun affirmait que ces paroles prouvaient simplement que le complotisme ne datait pas d'hier, réfrénant difficilement son envie de   dévisser la tête de ce d'aucun dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, il rétorquait par l'énoncé des deux cas qui le scandalisaient le plus. On nous fait passer Justin Bridou pour un bon Français à béret, alors qu'il a d'abord été Espagnol, avant de devenir Américain, pour finir Chinois. Quant à Panzani, ce prétendument Italien a vu le jour à Paris et son siège social se trouve dans la capitale des Gaules et pas à Reggio de Calabre !


Lorsque de telles choses ont cours, concluait-il, bien aveugle, sot ou malhonnête, est celui qui soutient que :


On ne nous cache rien, on nous dit tout
Plus on apprend, plus on sait tout
On nous informe vraiment sur tout



Bêtise 1058 - Dimanche 23 mars 2025


Les Anglais sont nos amis, il faut les aimer aussi


Si nous nous retournons sur notre passé, songeait-il, force est de constater que pendant des siècles, l'Anglais a eu pour fâcheuse habitude de se montrer plutôt désagréable à notre endroit. Guerre de cent ans, Guerre d'Espagne, Waterloo, Fachoda, Jeanne d'Arc, Napoléon, j'en passe et des meilleurs, durant des lustres et des lustres, l'Anglais s'est ingénié à  nous casser, disons, pour rester poli, les pieds. Il joua toujours à la perfection le rôle d'ennemi héréditaire, jusqu'à ce que l'Allemand ne le lui ravisse. Là, il fallait reconnaitre que nous n'y avons pas gagné au change.    


Cependant, il ne gardait pas rancune à l'Anglais de son hostilité passée, parce qu'il s'était largement racheté par son attitude en 14-18 et 39-45.      Il nous avait donné un sacré bon coup de main pour déloger de chez nous, manu militari, les squatteurs Teuton et les obliger à rentrer chez eux avec une main devant, une main derrière. Par ailleurs, tout au long de son Histoire, l'Anglais s'en était pris à bien d'autres que nous. Seuls vingt-deux pays, soit 10% des nations du monde, n'ont jamais été attaqués ou envahis par lui. Encore faut-il savoir que ces derniers constituaient des puissances qui ne risquaient pas de faire de l'ombre à Albion, comme le Luxembourg ou le Vatican.                  


Et puis, il considérait que des gens qui certes n'avaient pas inventé le maroilles, mais l'humour et le flegme, tout de même, ne pouvaient pas être tout à fait mauvais. Il pensait en particulier au plus illustre d'entre eux : Winston Churchill. Alors qu'il était invité à la Maison Blanche par Franklin Delanoe Roosevelt, il lui prit de déambuler dans les appartements qui lui avaient été alloués, en tenue d'Adam. Le président américain vint lui rendre visite à l'improviste. Sa surprise n'eut d'égal que sa confusion en découvrant le Premier Ministre de sa Gracieuse Majesté plus nu que la vérité sortant de son puits. Sans se démonter,  Churchill dit à Roosevelt : « Entrez donc, l'Angleterre n'a rien à cacher ».  

    


Bêtise 1059- Samedi 29 mars 2025

« Comme on connait ses saints, on les honore »


La maxime bien connue : « Il vaut mieux s'adresser à Dieu qu'à ses saints », dérivée du proverbe du XVIIIeme siècle : « Il vaut mieux prier Dieu que ses saints », lui posait question. Bien que la chose ne l'empêchât pas de dormir et de digérer normalement le maroilles, il n'en demeurait pas moins que cela ne laissait pas de véritablement le préoccuper.  Contrairement à l'immense monsieur Pierre Dac qui écrivit : « Si Dieu existe, qu'Il le prouve, s'Il n'existe pas, qu'Il le dise », il ne s'interrogeait pas sur la réalité de l'existence de Dieu. Les gens savaient parfaitement à quoi s'en tenir, n'est-ce pas ? Alors, comme il faisait partie des gens, il savait également parfaitement à quoi s'en tenir.  

Non, pour sa part, il se demandait ce qu'il convenait de raisonnablement penser de la définition du saint, que l'on s'adressât ou non à lui. Si l'on en croyait celle-ci, en premier lieu, il fallait surtout savoir que nous sommes tous appelés à être saints. Sans vouloir contester cette flatteuse augure, il ne pouvait pourtant s'empêcher de considérer qu'affirmer que nous sommes tous susceptibles de devenir saints, relevait d'un optimisme pour le moins débridé. Le saint se distingue par une vie de vertu aussi exceptionnelle qu'exemplaire ainsi que par sa capacité à effectuer des miracles. Or, honnêtement, combien d'entre nous croient sérieusement pouvoir un jour indiquer ce genre de compétences sur leurs C.V ?   

A partir de là, que devait-il objectivement penser de Saint Guinefort. Ce saint du XIIIeme siècle vivait humblement dans le château de son maître, sis à Villars-les-Dombes, situé, comme son nom l'indique, dans la Dombes, au nord de Lyon, dans l'actuel département de l'Ain. Un jour, alors qu'il dormait dans son berceau, il advint que le fils du seigneur se trouva en grand danger d'être mordu par un grand serpent. Saint Guinefort, présent dans la chambre de l'enfant, au péril de sa vie, se jeta courageusement sur le perfide animal et après une lutte acharnée, l'occis. 

Lorsqu'il rentra lui, le châtelain découvrit son enfant et Saint Guinefort couverts de sang. Croyant alors que ce dernier avait tué son héritier, fou de rage, sans plus de cérémonie, il le passa au fil de l'épée. Puis voyant le bébé se réveiller et remarquant enfin la dépouille déchiquetée du malfaisant reptile, il comprit sa terrible méprise. Dévoré de remords, il organisa en grandes pompes les funérailles du saint. Bientôt, les femmes de la région se rendirent avec leurs enfants malades sur sa tombe, car le saint possédait le posthume pouvoir de miraculeusement les guérir. 

Bon, avait-il conclu, Guinefort avait eu une conduite édifiante et fait des miracles, donc on ne pouvait effectivement que lui reconnaître sa condition de saint.

Cependant, il y avait un petit détail qui rendait ce saint un peu particulier par rapport aux autres. Guinefort était un chien.


 

Bêtise 1060 - Dimanche 30 mars 2025



Les Anglais sont nos amis, il faut les aimer aussi, chapter two1 


Il avait précédemment eu l'occasion de disserter sur la fâcheuse habitude que l'Anglais avait naguère à se comporter de manière plutôt désagréable à notre endroit. Il ne fait aucun doute que nos relations avec lui se révélèrent fréquemment des plus tumultueuses. Nous dûmes même lui rentrer franchement dedans plus souvent qu'à notre tour. Certains se  montraient persuadés que cette propension de l'Anglais à nous contrarier lui venait de sa détestation de la France. Il pensait exactement le contraire, sinon comment expliquer qu'il ait cherché, pendant si longtemps, à envahir nos contrées afin de pouvoir s'y installer ?


D'aucun disait aussi que l'Anglais aimait à consommer moult quantité de thé. Il ne niait pas le fait, néanmoins il tenait également pour vrai que les sujets de sa gracieuse majesté ne crachaient pas sur le plaisir de s'enfiler quelques bonnes pintes de bière. En autres particularités, il leur reconnaissait aussi celle de faire les choses différemment de nous : ils roulaient à gauche, ils mesuraient en miles, ils payaient en livres, ils parlaient en anglais, au lieu du maroilles, ils mangeaient du cheddar. De plus, il leur imputait un don particulier pour aboutir à de l'improbable en matière de créations culinaires. Pour finir, il les prenait pour des modèles de ténacité, de courtoisie, de flegme et d'humour.


Quoique... Il semble qu'il ait autrefois existé un sujet avec lequel l'Anglais ne plaisantait pas et qui lui faisait perdre son naturel courtois et flegmatique,  à savoir la haute trahison. Durant une période qui s'étendit du XIIIeme siècle à 1870, la peine prévue pour celui qui avait eu la mauvaise idée de se rendre coupable de ce crime, ne faisait pas du tout dans la dentelle. Le condamné était d'abord traîné nu sur une claie, ensuite il était pendu sans que mort s'en suive, puis  il était éventré, éviscéré, émasculé, après quoi ses organes étaient brûlés devant ses yeux. Enfin, il était décapité et équarri.  


En France, constatait-il, sur ce point, nous nous montrons beaucoup moins susceptibles. Le crime de haute trahison du président de la République a été tranquillement supprimé par la loi constitutionnelle  nᵒ 2007-238 du 23 février 2007.


1 : voir Bêtise 1058 - Dimanche 23 mars 202




Bêtise 1061- Samedi 5 avril  2025


« Soldat, la mort, tu donneras sans haine, ni passion »


Il refusait de sacrifier à la mode du tatouage. S'inscrire sur le derme : Ad honorem, ad gloriam, ou le décorer d'une tête de mort, il trouvait que cela faisait éfféminé. Lui, c'était un dur, un vrai, le style à se raser au chalumeau et à remplacer l'après-rasage par de l'alcool à brûler. Le genre qui, même mort, fait peur aux vautours. D'aucuns racontaient même qu'il avait mangé du cannibale cru et sans sel. Si vous vous demandez s'il existe une vie après la mort, touchez à son maroilles et vous le saurez. En  résumé, un garçon adorable, que ses hommes vénéraient. Alors pour eux, tout n'était qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté, lorsqu'il venait au rassemblement.   


- « Section rassemblée, à vos ordres, mon adjudant ! »


- « Merci sergent, repos messieurs. Messieurs, je vous ai jadis livré le fond de ma brillante pensée sur les balivernes dont sont trop souvent parsemés  les films dits de guerre1. Vous en souvient-il ? »


- « IL NOUS EN SOUVIENT, MON ADJUDANT ! »


- « Je n'en attendais pas moins de vous, les enfants. Aujourd'hui, vingt-et-unième jour avant... »


- « … Avant la chasse aux œufs en chocolat, mon adjudant ! »


- « … Avant la célébration de Pâques, caporal, donc, en ce vingt-et-unième jour avant la célébration de Pâques, après les films dits de guerre, je veux vous entretenir des jeux vidéos guerriers, ou plus précisément des couillonnades que l'on y trouve à profusion. Notamment, ils font acroire au néophyte que pour toucher une cible, il suffit de regarder dans le viseur.  Or, beaucoup d'autres facteurs entrent en ligne de compte et vous le savez mieux que quiconque. »


- « OUI ! NOUS LE SAVONS MIEUX QUE QUICONQUE, MON ADJUDANT ! »  


- « Je ne vous apprendrais rien en vous expliquant qu'un tir efficace requiert un bon maintien de l'arme, une position de tir adaptée, une visée conforme, une respiration maîtrisé et l'action progressive de la deuxième phalange de l'index sur la queue de détente.»


- « OUI, VOUS NE NOUS APPRENEZ RIEN, MON ADJUDANT ! »


- « Pour autant, aussi vrai que vous ne pouvez espérer battre le record de vitesse des Vingt-Quatre Heures du Mans en Deux Chevaux, n'escomptez pas battre le record de Simo Häyhä avec une arme à la one again. Par exemple, si un modèle de fusil est doté d'un canon qui se dilate trop sous l'effet de la chaleur provoquée par les tirs, la trajectoire de ses balles va avoir méchamment tendance à faire dans le fantaisiste.   


- « CA, C'EST BIEN VRAI, MON ADJUDANT ! »


- « Quant aux cartouches, qu'elles manquent de puissance et la balle ne possédera pas la vitesse nécessaire à la rectitude de sa course et à la       force de son pouvoir d'arrêt 2. Par temps très humide, l'air se sature de molécules d'eau en suspension. Avec une forte pression atmosphérique, il devient plus dense. Dans les deux cas, la pénétration du projectile dans l'air devient plus difficile, ce qui réduit sa vitesse et affecte donc, là aussi, sa trajectoire et son pouvoir d'arrêt. Il y aurait encore bien des choses à dire sur le sujet, mais je m'arrêterai là, afin de ne pas devenir pédant. » 


- « Comme toujours, votre merveilleuse parole est d'or, mon adjudant. Cependant, si je peux me permettre, il n'y a pas lieu de se formaliser, car les jeux vidéo, ne sont, après tout, que des jeux »


- « Si, il y a lieu, candide caporal, parce que les courageux Rambo de salon, qui parlent de guerre, croient que ça se passe comme dans les jeux vidéo. Ils ne se représentent pas que, dans la réalité, ils auraient à faire face à de  solides gaillards qui, sans forcément être antipathiques, n'en possèdent pas moins une inquiétante propension à clairement vouloir vous expédier dans un monde meilleur. Et, là, tous ces va-en-guerre surexités se planqueront et appelleront leurs mères en pleurant. Alors, qu'ils aillent jouer à la marelle et nous fichent la paix. »  


1 : voir Bêtise 1056 du dimanche 16 mars 2025

2 : capacité d'une munition à mettre un ennemi hors de combat dès le premier impact.




Bêtise 1062 - Dimanche 6 avril  2025


Mettre le pain à l'envers sur la table, passer sous une échelle, briser un miroir, toucher du bois, croiser les doigts, avoir un fer à cheval, garder un trèfle à quatre feuilles, etc... etc... 



Pourquoi ai-je besoin de me poser ce genre de question, s'admonestait-il ? Pourquoi ne me contentais-je pas de demeurer pépère dans mon coin, à manger tranquillement mon maroilles. Franchement, je vous demande, aller s'interroger sur les superstitions ! Voilà bien un truc à se faire bêtement des noeuds au cerveau. Je le sais, mais il faut que j'en ai le coeur net, alors voyons ce qu'en disent les doctes auteurs d'ouvrages savants. D'après eux, il s'agit de croyances irraisonnées fondées sur la crainte ou l'ignorance, exemple : la triskaïdékaphobie. 


La quoi ?! Eh ben maintenant, je suis bon pour chercher la définition de  la triskaïdékaphobie. Donc, la  triskaïdékaphobie est la peur du chiffre 13. Très bien, je me coucherai moins bête ce soir. Sinon, la croyance   irrationnelle dans les superstitions peut influer, de manière plus ou moins importante, sur la façon dont les individus se conduisent. A l'extrême, elle  se transforme en pathologique quand elle devient obsessionnelle chez l'individu qui y croit. A quand même... cela explique sans doute pourquoi l'Eglise condamne la superstition.


Euh, non, en fait, elle condamne parce qu'elle considère que la superstition est contraire aux principes de la foi. Cependant, il me semble,   que dans la première bulle de l'Histoire, vox in rama, fulminée en 1233,    le pape Grégoire IX a largement essuyé ses mules papales sur cet anathème. Dans ce texte, il accusait les chats noirs d'être des instruments du démon, d'être associés aux rites païens, d'être des suppôts de Satan. Sauf erreur de ma part, il ne se trouve dans les Saintes Ecritures aucune trace de telles affirmations. Quoi qu'il en soit, les allégations de    Grégoire IX engendrèrent deux conséquences.


D'abord, les moyenâgeux amis des matous, minets, mistigris et autres greffiers, opérèrent une sélection naturelle afin d'obtenir des chats noirs aux poitrails ornés d'une tache blanche. Pour le commun de l'époque, cette dernière représentait le signe que l'animal avait été sauvé par Dieu, d'où le nom de baiser d'un ange ou d'empreinte de Dieu qui lui fut donné. Ensuite, le massacre des felis catus, déclenché par cette bulle, causa un notable amoindrissement de la population de chats, dans toute l'Europe occidentale. Cette diminution entraîna une forte augmentation de la prolifération des rats, ce qui eut pour répercussion de favoriser le déclenchement et la dissémination des épidémies de peste.


Plutôt que les chats noirs, il eut été plus judicieux de choisir les rats pour jouer le rôle de disciples du diable. N'est-il pas ?   



Bêtise 1063- Samedi 12 avril  2025


« Dans les gestes, des histoires silencieuses sont racontées. » 


« Monsieur Willibal de Teynisse, non seulement, réside à Vendegie sur Ecaillon, mais de plus, il y a vu le jour. Distillateur autodidacte de son état, il produit des spiriteux virils et musclés que ses clients les plus téméraires boivent et que les plus raisonables utilisent pour démarrer leurs tronçonneuses. Ce cher Teynisse a momentanément quitté ses alambics en acier trempé blindé, pour venir nous ouvrir les yeux sur des propos tenus par des gens dont on ne peut douter du savoir, puisqu'ils vous affirment qu'ils savent. Mâle Willibal, je vous en prie, ayez donc l'obligeance de nous ouvrir, de nous ouvrir largement »


- « Mon bon Nervien, je vous sais honnête homme et bon comme du bon maroilles, aussi ne doutais-je pas un instant que vous n'émettrez aucune objection à ce que je cite monsieur Fernand Raynaud qui disait : quand je vois ce que je vois et que j'entends ce que j'entends, je suis bien content de penser ce que je pense.»


- « Et réciproquement, ai-je envie d'ajouter. »


- « J'ignorai qu'à l'occasion, vous ne répugnez pas à philosopher. Les mots de monsieur Raynaud résument parfaitement ce que m'inspire la manière dont certains malmènent l'Histoire. »


- « Pouvez-vous, vous montrer plus précis concernant ces certains ? »


- « Je le peux. D'une part, il s'agit de ceux qui se prétendent historiens et qui le sont autant que je suis danseuse étoile à l'opéra de Paris et de l'autre, il s'agit d'individus pour qui la crétinerie est une vocation. »


- « Pouvez-vous nous donnez un échantillon des méfaits de ces gens ? »


- « Avec grand plaisir, je vais donc vous parler de Napoléon. D'aucuns expliquent que Bonaparte glissait la main à l'intérieur de son gilet pour      se réchauffer l'estomac, afin d'atténuer les douleurs qu'il lui occasionnait. »


- « Je ne sais pourquoi, mais ces d'aucuns, je subodore que vous allez méchamment les démonter .»  


- « Oui, parce qu'ils se mettent le doigt dans l'œil  jusqu'au coude. A l'époque de l'Empereur, pour un gentilhomme mettre la main dans son gilet était une manière élégante et bien éduquée de se tenir. Ainsi trouve-t-on de nombreux portraits de contemporains de Napoléon posant dans cette attitude. »


- « J'imagine que si les d'aucuns avaient connu l'existence de ces tableaux, ils en auraient déduit que, sous le Premier Empire, il y avait une épidémie d'ulcère à l'estomac.  »



Bêtise 1064- Dimanche 13 avril  2025


Principe de précaution précautionneux


S'il ne comptait pas au nombre des créatures appartenant à l'espèce des rebelles invétérés, pour autant il ne faisait pas preuve d'une déférence démesurée envers les conventions. Ainsi, en contravention avec tous les principes en usage, de temps à autre, il n'hésitait pas à consommer le maroilles entre les repas. Preuve, on ne peut plus flagrante, qu'il lui arrivait parfois de se comporter en individu à peine civilisé. Cela étant dit,  concernant le respect de l'autorité légale, il se montrait des plus empressés.  


D'ailleurs, il ne comprenait pas les gens qui contestent, revendiquent protestent et poussent des cris d'orfraie, à chaque fois que de nouvelles obligations réglementaires apparaissent. Ces mauvais coucheurs hurlent tant et plus à la scandaleuse atteinte aux libertés individuelles et en appellent à la contestation. Pourquoi vous arrêtez en si bon chemin, raillait-il ? Faites preuve de davantage d'ambition. Ne vous  contentez pas de la demi-mesure. Voyez plus grand ! Les gars, faut viser, l'insurrection,  la révolution, le grand soir !


Pour lui, tous ces excités se montraient aussi inconscients qu'ingrats. Ils ne se rendaient absolument pas compte que ceux qui décident pour nous, ne décrètent pas par plaisir, mais pour notre bien. Ils devraient donc les remercier sincèrement au lieu de râler. Il pensait en particulier à l'interdiction du port de l'Opinel. Les mécontents écervelés pestent parce que d'abord, faisaient-ils remarquer, jamais personne n'a jamais eu l'idée saugrenue d'user d'un couteau de ce type, pour aller joyeusement planter son prochain. Ensuite, ils se plaignent de désormais se trouver privés du moyen de couper leur saucisson et leur camembert.


Mais, qu'ils arrêtent leurs jérémiades, s'indignait-il ! Il suffit d'acheter le saucisson en rondelles et le camembert en portions, ou de manger de la Vache qui Rit ! Il trouvait même que nos dirigeants ne poussaient pas les choses assez loin. Si cela n'avait tenu qu'à lui, en premier lieu, il aurait également proscrit le sucre. Il représente un danger bien plus important que l'Opinel. Mélangé à une certaine dose d'un certain type de désherbant, il devient un explosif très efficace. Par précaution, il aurait aussi fait prohiber les sucrettes d'acésulfame de potassium, de thaumatine, d'aspartame et autres édulcorants. On ne sait jamais, des fois qu'en leur ajoutant de la moutarde, ça donnerait du napalm.


   

Bêtise 1065- Samedi 19 avril  2025


On choisit pas sa famille


L'heure de la fermeture des portes ayant sonné, ils quittaient le salon du livre de Cambrai. Toute la journée, ils y avaient dédicacé leur livre, intitulé : « Le maroilles, sa vie, son œuvre ». Ils avaient eu tant de dédicaces à rédiger, qu'il avait fallu les réapprovisonner plusieurs fois en cartouches d'encre. Après un tel succès, ils pensaient qu'ils avaient bien mérité le droit de se désaltérer.       


- « Elaphos, où se situe cet estaminet que tu m'as promis ? » 

  

- « Eh ben mon Khoïros, nous nous trouvons à quelque minutes à peine de cet établissement, où nous attendent une ambiance chaleureuse et un large choix de délicieuses bières servies généreusement. » 


- « Waouh, qu'est-ce que tu causes bien, mon copain.»


- « Euh, j'ai juste récité l'accroche de leur site internet.»


- « A propos, sais-tu que pendant la Seconde Guerre mondiale Hitler s'est engagé dans l'armée américaine ? »


- « Hein ?! »


- « Sais-tu-que-pendant-la-Seconde-Guerre-mondiale-Hitler-s'est-engagé dans-l'armée-américaine ? »


- « Te rends-tu compte de ce que tu racontes ? Tu dérailles pire qu'une loco qui se prend un bloc-d'arrêt à pleine vitesse. »


- « Je t'assure que je suis aussi parfaitement équilibré qu'un couteau de lancer. » 


- « Un couteau de lancer n'a jamais nagé en pleine extravagance comme tu le fais. »


- « Extravagance toi-même, je persiste et signe mon affirmation, » 


- « Ma parole, tu es plus inconscient qu'un parachutiste qui saute de l'avion sans parachute. En racontant une énormité pareille sur Adolf, tu te rends coupable de révisionnisme, délit passible d'un an d'emprisonnement et de 45 000 €  d'amende !»


- « Je ne te parles pas d'Adolf Hitler, mais de William Patrick Hitler, son neveu, fils de son demi-frère Aloïs. Aparemment, le fürher ne l'appréciait pas vraiment. Il l'appelait mon répugnant neveu. En 1939, William Patrick effectue un voyage touristique aux Etats-Unis. Lorsque la guerre éclate, il ne choisit pas le camp de son oncle Adolf, mais celui de l'Oncle Sam. Il écrivit une lettre au président Franklin Delano Roosevelt pour lui faire part de son désir de s'engager dans l'U.S Navy. Roosevelt accepta sa requête. Je ne vois pas en quoi cette petite histoire pourrait m'attirer les foudres de la justice. De toute façon, la loi ne punit pas le révisionnisme, mais le négationnisme.»


- « Ah d'accord... Sinon, le neveu de de Gaulle, il fait quoi en ce moment ?  »



Bêtise 1066- Dimanche 20 avril  2025


Dur, dur, d'être écologiste


L'écologie lui paraissait une cause que l'on se devait de soutenir sans aucune hésitation. De n'importe quelles manières, s'interrogeait-il, qui pouvait refuser de sauver la planète ? Personne, assurément, à part, bien entendu, il ne fallait pas les oublier, les postulants au suicide. Bon, il est  vrai que la Terre ne courait aucun risque à cause du réchauffement climatique. Il le savait. Quelle que soit la hausse des températures, elle ne disparaîtrait pas et tournerait toujours tranquillement en rond autour du soleil. Par contre, toutes les formes de vie qu'elle hébergeait, elles, inéluctablement cesseraient  d'exister.     


Encore que, les espèces animales et végétales de types xérophiles ou thermophiles, ne se trouveraient pas particulièrement indisposées par un réchauffement. Elles continueraient leur train-train quotidien et à s'occuper de leurs petites affaires, comme si de rien n'était. Quoi qu'il en soit, il entendait prêter main forte, d'un pied ferme, à la préservation de l'environnement. Il se refusait de vivre avec l'épée de Damoclès de la menace climatique, au-dessus de la tête. Alors, il disait oui à la voiture électrique, oui à l'isolation thermique et oui aux produits bio.


Mais en fait non, parce qu'il ne possédait pas le début du commencement des moyens pécuniaires nécessaires au financement de tout cela. Dans ces conditions, comment prendre sa part du fardeau de l'effort écologique ? Il avait envisagé de contribuer à la réduction du cheptel de bovins laitiers, en mettant un terme définitif à sa consommation de maroilles. Il mit moins de temps pour abandonner cette idée qu'il en avait mis pour l'avoir. Le sacrifice qu'elle impliquait, était tout simplement surhumain. Et puis, il aimait bien les vaches. Il ne lui restait donc que le recyclage. 


Le geste ne coûtait pas cher et demeurait dans les limites du faisable pour un simple mortel. Mais voilà, il avait appris que le plastique ne se recyclait pas réellement. En effet, le processus de recyclage altère la matière plastique, la détériore, jusqu'à lui faire perdre ses qualités. Ainsi, une bouteille ne pouvait être recyclée que d'une à trois fois environ, avant de devenir définitivement un déchet, qui mettra quatre cent cinquante ans pour se dégrader complètement. Lui, il ne faudrait pas autant de temps avant que cette histoire de réchauffement ne commence finalement à sérieusement lui échauffer les oreilles.



Bêtise 1067- Samedi 26 avril  2025


Nomen est  omen 


Je considère, disait-il, qu'un nom de famille ne correspond pas seulement à une mention inscrite sur un acte de naissance ou une pièce d'identité. Il nous relie à nos ancêtres les plus lointains et par là même à une famille, à un peuple, à un pays, à un terroir, à une culture. Il nous enracine dans une tradition antérieure à notre existence. Un nom de famille est un bloc d’Histoire dont nous héritons. Chaque nom de famille possède une signification. Ainsi, contrairement à ce que l'on croit, celui de Jeanne d'Arc ne fait aucunement allusion à l'arme permettant de lancer des flèches. Il se réfère au mot latin "Arco", qui signifie "pont", en français. De nos  jours, Jeanne d'Arc se nommerait donc Jeanne Dupont.  


Sinon, j'avais toujours pensé, songea-t-il, qu'il n'existait rien de plus " ça va de soi " que d'avoir un nom de famille. Quel bel ingénu, quel grand candide, quel gros naïf, étais-je de le croire. En fait, la loi n°2003-516 du 18 juin 2003 et la circulaire CIV 18/04 du 6 décembre 2004, régissent la chose. En résumé, l'enfant déclaré à l'état civil portera le nom de famille de son  père ou de sa mère ou des deux, dans l'ordre décidé par ces derniers. En cas de désacord, l'ordre alphabétique s'imposera. Le nom de famille attribué à l'aîné sera obligatoirement celui des autres enfants de la fratrie


Heureusement que la loi nous précise tout cela, se félicitait-il. Sans elle, aucun parent n'aurait l'idée de donner son nom à ses enfants. Par exemple, sans elle, il ne fait pas de doute, qu'un type s'appelant disons, au hasard, Nervien, ne s'avisera jamais de transmettre son patronyme à sa fille Arabella et à son fils Amalvine. De sorte que certainement cette dernière s'appellerat Arabella Skłodowska et ce dernier, Amalvine de la Vega. Tiens, s'interpella-t-il, il me vient tout soudain une interrogation qui, jusqu'ici, n'avait jamais traversé mon brillant esprit. Le maroilles porte-t-il le nom de son père ou de sa mère ?

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